LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 24-81.295 F-D
N° 00719
ECF
28 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 28 MAI 2025
M. [X] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 29 janvier 2024, qui, pour transfert de capitaux sans déclaration et blanchiment, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, une confiscation et une amende douanière.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. [X] [K], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction interrégionale des douanes et droits indirects de Normandie et de la direction générale des douanes et droits indirects, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 30 avril 2020, les agents des douanes ont procédé au contrôle et à la fouille du véhicule dont M. [X] [K] était passager, et y ont découvert la somme de 63 050 euros en espèces.
3. Le tribunal correctionnel a annulé la procédure douanière et relaxé M. [K].
4. Le ministère public et l'administration des douanes ont relevé appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur les deuxième à septième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté l'exception de nullité tirée de la retenue contrainte dans les locaux des services des douanes, alors :
« 1°/ que l'exercice du droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes ne peut donner lieu au maintien des personnes concernées à la disposition des agents des douanes au-delà de ce qui est strictement nécessaire à l'accomplissement de cette mesure et à l'établissement du procès-verbal qui la constate ; que, dans ce cadre, les agents des douanes peuvent recueillir des déclarations en vue de la reconnaissance des objets découverts mais ne disposent pas d'un pouvoir général d'audition de la personne contrôlée ; que les agents ne peuvent entendre la personne contrôlée qui n'est pas placée en rétention douanière au cours de l'exercice du droit de visite lorsqu'il s'accompagne d'une mesure de contrainte ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt et des procès-verbaux que M. [K], qui a été conduit au siège de la brigade de sécurité intérieure de [Localité 1] après la fouille de son véhicule, a été maintenu à la disposition des agents des douanes au-delà du temps nécessaire aux opérations de visite ; que les auditions auxquelles les agents ont procédé au cours du droit de visite étaient par conséquent irrégulières ; qu'en rejetant le moyen de nullité de la procédure douanière pris de ce que le requérant a été maintenu à la disposition des agents des douanes au-delà du temps nécessaire au contrôle, la cour d'appel a méconnu l'article 60 du code des douanes et l'article 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après la notification des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale ; qu'il résulte du procès-verbal de saisie établi par les agents des douanes le 30 avril 2020 que M. [K] a fait l'objet d'une première audition sans qu'aucune des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale ne lui ait été d'abord notifiée ; qu'en relevant qu'il résultait des procès-verbaux que les droits de l'article 61-1 du code de procédure pénale avaient été notifiés à M. [K] à l'occasion de ses auditions devant les services des douanes et que les diligences prévues par ces textes ont été respectées, la cour d'appel a méconnu les articles 67 F du code des douanes et 61-1, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. Pour écarter l'exception de nullité de l'audition de M. [K] réalisée par les agents des douanes, l'arrêt attaqué énonce que l'intéressé a fait l'objet de la fouille du véhicule et de la saisie des sommes découvertes, d'une audition libre de 17 heures 50 à 21 heures, puis qu'il a été procédé, entre 21 heures 40 et 23 heures, avec l'intéressé, à la notification de la saisie effectuée, diligence qui justifiait pleinement sa présence dans les locaux du service des douanes, qu'il a quittés à 23 heures.
8. Les juges ajoutent que l'audition de M. [K] dans les locaux du service des douanes, après le contrôle, portait exclusivement sur l'infraction douanière de transfert de capitaux sans déclaration, non réprimée par de l'emprisonnement, et ne permettant donc pas une mesure de retenue douanière.
9. Ils relèvent également qu'il résulte des procès-verbaux signés par l'intéressé qu'il avait accepté de se rendre librement dans les locaux des douanes, et que le seul fait qu'il soit resté dans ces lieux après son audition, pour procéder aux formalités de saisie de la somme découverte, ne saurait constituer la preuve d'une retenue contraire aux dispositions de l'article 323-1 du code des douanes.
10. Ils considèrent établi que M. [K] a été entendu librement par les agents des douanes, et en concluent que l'audition pouvait être effectuée dans les conditions prévues par l'article 67 F du code des douanes, notamment quant aux droits devant être notifiés, en l'occurrence ceux prévus par l'article 61-1 du code de procédure pénale.
11. C'est à tort que la cour d'appel a rejeté l'exception de nullité.
12. En effet, il résulte de ses constatations et des procès-verbaux de la procédure douanière que la personne contrôlée, invitée à suivre les agents des douanes dans leurs locaux, où elle a été maintenue à leur disposition, a fait l'objet d'une audition formelle sur sa situation personnelle, notamment financière, et sur l'origine des fonds transportés, audition à laquelle les agents des douanes ne pouvaient procéder, fût-ce en application de l'article 67 F du code des douanes, au cours de cette visite et qui a conduit à retenir l'intéressé au-delà du temps strictement nécessaire à la mise en oeuvre du contrôle.
13. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure dès lors que les juges pour retenir la culpabilité du prévenu se sont fondés sur d'autres éléments, soumis au débat contradictoire, notamment sur les constatations matérielles contenues dans les procès-verbaux et les déclarations sommaires effectuées par l'intéressé lors de la visite du véhicule.
14. Le moyen sera donc écarté.
15. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt-cinq.