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22/05/2025 | FRANCE | N°22500479

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 mai 2025, 22500479


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


LM






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 22 mai 2025








Cassation partielle




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 479 FS-D


Pourvoi n° H 22-23.232








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 MAI 2025


M. [D] [E], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 22-23.232 contre l'arrêt n° RG : 22/03220 rendu le 10 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 22 mai 2025

Cassation partielle

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 479 FS-D

Pourvoi n° H 22-23.232

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 MAI 2025

M. [D] [E], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 22-23.232 contre l'arrêt n° RG : 22/03220 rendu le 10 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 10), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Commissions import export (Commisimpex), dont le siège est [Adresse 4] (République du Congo),

2°/ à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à la République du Congo, représentée par son ministre de la justice, des droits humains et de la promotion des peuples autochtones, domicilié en cette qualité ministère de la justice, [Adresse 5] (République du Congo),

défenderesses à la cassation.

La société Commissions import export (Commisimpex) a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque également, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de Me Descorps-Declère, avocat de M. [E], de la SARL Ortscheidt, avocat de la société Commissions import export (Commisimpex), et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 avril 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, Mme Grandemange, M. Delbano, Mmes Vendryes, Caillard, M. Waguette, conseillers, Mmes Bohnert, Techer, Latreille, Bonnet, Chevet, conseillers référendaires, Mme Nicolétis, avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 novembre 2022), la société Commissions import export (société Commisimpex) a fait délivrer à la République du Congo, le 30 août 2016, un commandement de payer valant saisie immobilière portant, notamment, sur un immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 6].

2. Par un jugement du 16 décembre 2021, le bien saisi a été adjugé à la société Commisimpex.

Recevabilité du pourvoi examinée d'office

3. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application des articles 606, 607, 608 et 611 du code de procédure civile.

4. Il résulte des articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile que, sauf dans les cas spécifiés par la loi, les jugements en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation, indépendamment du jugement sur le fond, que s'ils tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal. Il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.

5. M. [E] s'est pourvu en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel rejetant une demande de sursis à statuer et déclarant irrecevable l'appel formé contre le jugement d'adjudication.

6. Cependant, en application de l'article 611 du code de procédure civile, le pourvoi est recevable même lorsqu'une condamnation a été prononcée au profit ou à l'encontre d'une personne qui n'était pas partie à l'instance.

7. Dès lors, le pourvoi principal formé par M. [E], non partie à l'arrêt attaqué, est immédiatement recevable, nonobstant le fait que celui-ci n'a ni tranché une partie du principal, ni mis fin à l'instance.

8. En revanche, le pourvoi incident formé par la société Commisimpex, partie à l'arrêt attaqué, n'est pas recevable, sauf si un excès de pouvoir est caractérisé, ce qu'il convient d'examiner.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

9. La société Commisimpex fait grief à l'arrêt de condamner uniquement la République du Congo à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter, en conséquence, de sa demande tendant à ce que M. [E] soit condamné in solidum à supporter les frais exposés et non compris dans les dépens, alors « qu'il résulte de la combinaison des articles 698 et 700 du code de procédure civile que l'auxiliaire de justice condamné à supporter les dépens afférents aux instances, actes et procédure d'exécution injustifiés, peut être condamné à payer à une partie une somme que le juge détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en écartant la demande de la société Commisimpex, qui sollicitait la condamnation in solidum de M. [E] avec la République du Congo au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens, motifs pris qu'il « n'y a pas lieu de mettre à sa charge des frais irrépétibles dans la mesure où aucune disposition du code de procédure civile ne le prévoit », la cour d'appel a violé par fausse application, les dispositions des articles 698 et 700 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. Selon l'article 700 du même code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

11. Seule la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès pouvant être condamnée à des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile, le moyen, qui postule le contraire, manque en droit.

12. Le pourvoi incident, dont le moyen ne caractérise pas un excès de pouvoir, n'est, dès lors, pas recevable.

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. M. [E] fait grief à l'arrêt de dire qu'il était tenu in solidum aux dépens d'appel avec sa cliente, la République du Congo, en application des dispositions de l'article 698 du code de procédure civile, alors « que nulle partie ne peut être jugé sans avoir été entendue ou appelée et que le juge doit, en toutes circonstances, observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'un avocat ne peut pas être condamné aux dépens sur le fondement de l'article 698 du code de procédure civile sans avoir été préalablement appelé et avoir été invité à présenter ses observations ; que, pour condamner M. [E] personnellement aux dépens d'appel, la cour d'appel a retenu que l'appel était particulièrement injustifié ; qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement appelé M. [E] personnellement à l'audience et l'avoir invité à présenter ses observations sur les faits qu'elle lui imputait personnellement, la cour d'appel a violé les articles 14 et 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

14. La société Commisimpex conteste la recevabilité du moyen, comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit.

15. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations de l'arrêt attaqué, est de pur droit.

16. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

17. La société Commisimpex ayant sollicité dans ses dernières conclusions, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, la condamnation in solidum de la République du Congo, appelante, et de ses avocats postulant et plaidant, ce dont il résulte que M. [E] avait été mis en mesure de présenter ses observations, c'est sans violer les articles 14 et 16 du code de procédure civile que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de l'appeler en la cause, a examiné la demande dont elle était saisie.

18. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

19. M. [E] fait le même grief à l'arrêt, alors « que seuls les dépens afférents aux instances, actes et procédure d'exécution injustifiés peuvent être mis à la charge des auxiliaires de justice qui les ont faits ; qu'en se bornant à affirmer que l'appel étant particulièrement injustifié pour dire que M. [E], avocat plaidant de l'appelante, sera tenu in solidum aux dépens d'appel avec sa cliente, la République du Congo, sans préciser les raisons pour lesquelles cet appel était particulièrement injustifié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 698 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

20. La société Commisimpex conteste la recevabilité du moyen, comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit.

21. Cependant, le moyen est né de la décision attaquée.

22. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 698, alinéa 1er, du code de procédure civile :

23. Aux termes de ce texte, les dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution injustifiés sont à la charge des auxiliaires de justice qui les ont faits, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

24. Pour dire que M. [E], avocat plaidant de l'appelante, sera tenu in solidum aux dépens d'appel avec sa cliente, l'arrêt retient, après avoir rappelé dans les commémoratifs que la République du Congo est représentée par Mme [T] et qu'elle plaide par M. [E], que l'appel est injustifié et qu'il convient de faire application de l'article 698 du code de procédure civile.

25. En se déterminant ainsi, sans établir que M. [E] aurait effectué un acte de procédure qu'un exercice normalement attentif, diligent et loyal de sa profession aurait dû le conduire à ne pas accomplir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. [E], avocat plaidant, est tenu in solidum aux dépens d'appel avec sa cliente, la République du Congo, en application des dispositions de l'article 698 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Commissions import export (Commisimpex), la société Orange et la République du Congo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Commissions import export (Commisimpex) et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-deux mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22500479
Date de la décision : 22/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 novembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 mai. 2025, pourvoi n°22500479


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : Me Descorps-Declère, SARL Ortscheidt, SCP Gouz-Fitoussi

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:22500479
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