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21/05/2025 | FRANCE | N°52500528

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mai 2025, 52500528


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


HE1




COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 21 mai 2025








Rejet




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 528 F-D


Pourvoi n° R 23-23.796






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 MAI 2025


La société Mi-Gso, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-23.796 contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2023 pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HE1

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 21 mai 2025

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 528 F-D

Pourvoi n° R 23-23.796

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 MAI 2025

La société Mi-Gso, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-23.796 contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2023 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant à M. [C] [W], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Redon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Mi-Gso, de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [W], après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Redon, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 novembre 2023), M. [W] a été engagé en qualité d'ingénieur projet junior, statut cadre, par la société Mi-Gso, selon contrat conclu le 10 février 2020, devant prendre effet à la date du démarrage d'une mission ou au plus tard le 11 mai 2020.

2. Par avenant du 26 mars 2020, il a été convenu que la date d'entrée du salarié dans la société serait fixée au 8 juin 2020, au lieu du 11 mai 2020.

3. Par lettre du 11 mai 2020, la société Mi-Gso a « annulé » le contrat de travail du salarié en invoquant la crise de la Covid-19 comme cas de force majeure.

4. Contestant cette rupture, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant dit que le licenciement ne reposait sur une aucune cause réelle et sérieuse et ayant par conséquent condamné l'employeur à payer au salarié des sommes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et des congés payés afférents, alors :

« 1°/ qu'est constitutif d'un cas de force majeure un événement présentant un caractère imprévisible, lors de la conclusion du contrat, et irrésistible dans son exécution ; que constitue un cas de force majeure, l'impossibilité pour un employeur de fournir au salarié nouvellement embauché et non encore entré en fonction, du travail, en raison des mesures sanitaires successives et imprévisibles prises par les autorités publiques pour la lutte contre la pandémie de covid et de leur impact sur l'activité de la société ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'au jour de la signature de l'avenant du 26 mars 2020 repoussant la prise de fonction du salarié au 8 juin suivant, l'employeur ne pouvait pas prévoir la teneur exacte des mesures législatives et gouvernementales qui seraient prises les mois et années à venir et qu'il qualifiait de "fait du Prince" ; que pour refuser de retenir l'existence d'un cas de force majeure lié à l'épidémie de Covid-19, la cour d'appel a retenu qu'au jour de la signature de cet avenant, l'employeur comme le salarié avaient connaissance de l'ampleur et de la gravité du phénomène impliquant une gestion publique de la crise sanitaire au gré des évolutions de la pandémie et ne pouvaient légitimement occulter le fait que des mesures exceptionnelles mises en place, notamment l'état d'urgence sanitaire, étaient susceptibles d'être renouvelées, voire adaptées, jusqu'à l'issue de la crise sanitaire, que la situation sanitaire, économique et juridique du pays était déjà bouleversée et devenue incertaine et que le 11 mai 2020, lorsqu'il a été mis fin au contrat de travail du salarié, le déconfinement avait été annoncé quelques jours plus tôt, avant la date d'embauche nouvellement fixée au 8 juin 2020 ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait le caractère imprévisible des mesures législatives et gouvernementales prises postérieurement à la conclusion de l'avenant du 26 mars 2020, a violé l'article 1218 du code civil ;

2°/ qu'est constitutif d'un cas de force majeure un événement présentant un caractère imprévisible, lors de la conclusion du contrat, et irrésistible dans son exécution ; que constitue un cas de force majeure, l'impossibilité pour un employeur de fournir au salarié nouvellement embauché et non encore entré en fonction, du travail, en raison des mesures sanitaires successives et imprévisibles prises par les autorités publiques pour la lutte contre la pandémie de covid et de leur impact sur l'activité de la société ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait, preuves à l'appui, que le dispositif de l'activité partielle, fût-il aménagé pendant la gestion de la crise sanitaire du covid 19, était collectif et temporaire et supposait un engagement en matière d'emploi des salariés concernés par ladite mesure alors mise en place, et que dès lors qu'un tel engagement ne pouvait pas être souscrit à l'égard de M. [W] par l'employeur, compte tenu de l'effondrement structurel du secteur aéronautique et des annulations fermes des contrats avec ses principaux clients sans engagement de leur part visant à reconsidérer ultérieurement cette décision, l'employeur ne pouvait pas assurer l'adéquation de ce dispositif, qui perdait alors tout objet, à sa situation réelle (conclusions d'appel de l'exposante p.14 et 15 ; productions n°6 et 7) ; que la cour d'appel a constaté que l'employeur justifiait de ce que le secteur aéronautique dans lequel il intervenait avait été fortement touché par la crise sanitaire mondiale ; qu'en se bornant à retenir qu'il ne pouvait pas se prévaloir d'une annulation des missions de ses clients et d'une projection économique impossible empêchant la prise de poste du salarié, et que dès lors qu'il avait fait usage du dispositif de l'activité partielle, ses explications sur l'impossibilité d'identifier une période de sous-activité pour obtenir l'autorisation d'activité partielle étaient inopérantes ou injustifiées, sans expliquer en quoi l'impossibilité pour l'employeur d'assurer au salarié la fourniture de missions à l'issue de la mise en oeuvre du dispositif d'activité partielle, compte tenu des annulations des missions par ses clients les plus importants, ne privait pas ce dispositif de son objet et en quoi elle ne caractérisait pas le caractère irrésistible de la force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1218 du code civil et R. 5122-1 et suivants du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. La force majeure permettant à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des obligations nées de la rupture d'un contrat de travail s'entend de la survenance d'un événement extérieur, imprévisible lors de la conclusion du contrat, et irrésistible dans son exécution.

8. La cour d'appel a, d'abord, constaté qu'au moment de la conclusion de l'avenant, le 26 mars 2020, la crise sanitaire était déjà en cours puisque le confinement était mis en place depuis le 17 mars 2020, ce qui lui retirait son caractère imprévisible à cette date.

9. Elle a, ensuite, relevé que la mise en place du chômage partiel, dont l'employeur ne démontrait pas qu'il n'était pas applicable au salarié, alors qu'il y avait eu recours massivement par ailleurs, ne rendait pas irrésistible la crise sanitaire et que l'employeur s'était injustement précipité de mettre fin au contrat de travail du salarié le 11 mai 2020, alors que le déconfinement avait été annoncé le 7 mai 2020, soit avant la date d'embauche nouvellement fixée au 8 juin 2020.

10. De ces constatations, elle a exactement déduit que la force majeure n'était pas caractérisée.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Mi-Gso aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Mi-Gso et la condamne à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt et un mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500528
Date de la décision : 21/05/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 10 novembre 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mai. 2025, pourvoi n°52500528


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500528
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