La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2025 | FRANCE | N°52500519

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mai 2025, 52500519


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 21 mai 2025








Cassation partielle




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 519 F-D


Pourvoi n° F 23-23.028




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________

________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 MAI 2025


La société GCA Logistique, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° F 23-23.028 contre l'arrêt rendu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 21 mai 2025

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 519 F-D

Pourvoi n° F 23-23.028

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 MAI 2025

La société GCA Logistique, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° F 23-23.028 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2023 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [V] [R], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Pôle emploi, devenu France travail dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société GCA Logistique, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [R], après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société GCA Logistique du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre France travail venant aux droits de Pôle emploi.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 19 septembre 2023), M. [R], engagé en qualité de directeur par la société CGA Trans à compter du 4 novembre 2002, a été affecté à la société GCA Logistique par avenant du 9 décembre 2014.

3. Convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement par lettre remise en mains propres le 7 septembre 2018, il a été licencié pour faute grave par lettre du 12 octobre 2018.

4. Contestant son licenciement et sollicitant le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, il a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié diverses sommes au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, d'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour perte de chance de levée des stock-options de 2015 et de dommages-intérêts pour non-délivrance des documents de fin de contrat de travail, alors « qu'un fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que ce délai concerne le déclenchement des poursuites disciplinaires et non le prononcé de la sanction ; que la convocation à l'entretien préalable interrompt la prescription de deux mois prévue à l'article L. 1332-4 du code du travail ; qu'en l'espèce, pour juger prescrit le grief mentionné dans la lettre de licenciement du 12 octobre 2018, indiquant que l'employeur avait reçu des plaintes du client Ikea durant l'été s'agissant de son comportement à l'encontre du chef de poste du service de sécurité incendie et de ses collaborateurs, et d'avoir donné des ordres, en outre contradictoires aux consignes de sécurité, au personnel de Ikea, la cour d'appel a retenu que la SAS GCA Logistique a eu connaissance de problèmes liés au comportement de M. [R] dénoncés par le service sécurité de la société Ikea ''dès le 8 juillet 2018'', qu'il n'est pas démontré qu'elle ait eu connaissance de nouveaux faits ou de la persistance du comportement ''à la suite du mail du 6 août 2018'', que la société ''n'a pris aucune mesure depuis le 8 juillet 2018 s'agissant des faits dénoncés à l'encontre de M. [R]'' de sorte que ''ces faits invoqués dans la lettre de licenciement du 12 octobre 2018 sont prescrits'' ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il est constant et qu'il ressort des mentions de l'arrêt que, par lettre remise en mains propres le 7 septembre 2018, le salarié a été convoqué à un entretien préalable le 17 septembre 2018, ce dont il résultait que la convocation avait eu lieu dans les deux mois du 8 juillet 2018 et que les faits dénoncés n'étaient pas prescrits, la cour d'appel, qui a fait courir le délai de prescription non pas jusqu'au 7 septembre 2018, date de la convocation à l'entretien préalable, mais jusqu'au 12 octobre 2018, date de la lettre de licenciement, a violé l'article L. 1332-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail :

6. Aux termes de ce texte, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'engagement de poursuites pénales.

7. Il en résulte que cet article n'exige pas que la sanction disciplinaire intervienne dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance d'un fait fautif mais seulement que dans ce délai soient engagées des poursuites disciplinaires.

8. Pour condamner l'employeur à payer diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour perte de chance de levée des stock-options de 2015, l'arrêt relève, d'abord, que l'employeur indiquait dans la lettre de licenciement du 12 octobre 2018 qu'il avait reçu des plaintes du client Ikea « durant l'été » sans autre précision, s'agissant du comportement du salarié à l'encontre du chef de poste du service de sécurité incendie et de ses collaborateurs et d'avoir donné des ordres en outre contradictoires aux consignes de sécurité au personnel de Ikea.

9. L'arrêt constate, ensuite, que l'employeur verse aux débats un mail du 8 juillet 2018 de M. [P] (operations developper Ikea) adressé à M. [N] de la société GCA Logistique avec pour objet « dossier [R] [V] société CGA » comme suit « ce mail fait suite à mon message téléphonique de ce matin. Merci d'en prendre connaissance et de faire un rappel aux différentes personnes concernées stp. Je me tiens à ta disposition pour en discuter tout comme [G] [H], le responsable du site de [Localité 3], qui m'a remonté également quelques problèmes d'attitude concernant ces deux personnes ayant leur bureau à [Localité 3] » et un mail de M. [E], formateur sécurité à M. [P] le 6 août 2018 de mécontentement vis-à-vis de M. [R].

10. L'arrêt en déduit que l'employeur a eu connaissance de problèmes liés au comportement du salarié dénoncés par le service sécurité de la société Ikea dès le 8 juillet 2018, qu'il n'est toutefois pas démontré qu'il ait eu connaissance de nouveaux faits invoqués ou de la persistance de son comportement à la suite du mail du 6 août 2018, dont il n'est par ailleurs pas démontré qu'il a été transmis à l'employeur.

11. L'arrêt retient, enfin, qu'il ressort également de la réponse du 6 septembre 2018 de M. [C] du groupe Charles André au mail du 8 juillet 2018 de M. [P], comme suit « l'objet du mail Ikea est malheureusement explicite. A ta dispo pour en parler », que l'employeur n'a pris aucune mesure depuis le 8 juillet 2018 s'agissant des faits dénoncés à l'encontre du salarié et en conclut que ces faits sont prescrits.

12. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait été convoqué à l'entretien préalable à un éventuel licenciement par lettre remise en mains propres le 7 septembre 2018, soit moins de deux mois après la connaissance par l'employeur, le 8 juillet 2018, du comportement fautif du salarié à l'égard du client Ikea, en sorte que le grief relatif à ces faits n'était pas prescrit, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

13. Le moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision de condamner l'employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts pour non-délivrance des documents de fin de contrat, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de l'arrêt critiquées par ce moyen.

14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif condamnant l'employeur à payer au salarié diverses sommes au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour perte de chance de levée des stock-options de 2015 entraîne la cassation des chefs de dispositif condamnant l'employeur au paiement des congés payés afférents au rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et lui ordonnant de rembourser les indemnités chômage perçues par le salarié du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de six mois qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

15. La cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur à payer au salarié diverses sommes au titre de rappel sur mise à pied conservatoire, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour perte de chance de levée des stock-options de 2015 n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société GCA Logistique à payer à M. [R] les sommes de 7 024, 87 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et 702, 48 euros au titre des congés payés afférents, 24 400 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2 444, 98 euros au titre des congés payés afférents, 52 159, 68 euros au titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 97 799,39 euros au titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 25 000 euros au titre de dommages-intérêts pour perte de chance de levée des stock-options de 2015 et ordonne le remboursement des allocations de chômage perçues par le salarié du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 19 septembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne M. [R] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt et un mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500519
Date de la décision : 21/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 19 septembre 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mai. 2025, pourvoi n°52500519


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Boutet et Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500519
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award