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13/05/2025 | FRANCE | N°C2500593

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 mai 2025, C2500593


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° T 24-85.097 F-D


N° 00593




ODVS
13 MAI 2025




CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 MAI 2025




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La société [2] [Localité 3] et M. [O] [S] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 30 mai 2024, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'homicide ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° T 24-85.097 F-D

N° 00593

ODVS
13 MAI 2025

CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 MAI 2025

La société [2] [Localité 3] et M. [O] [S] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 30 mai 2024, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur leurs demandes d'annulation d'actes de la procédure.

Par ordonnance du 16 décembre 2024, le président de la chambre criminelle a joint les pourvois et prescrit leur examen immédiat.

Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy et de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocats de la société [2] [Localité 3] et M. [O] [S], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. [X] [B] a été mortellement blessée le [Date décès 1] 2019 par un autobus appartenant à la société [2] [Localité 3] (la société [2]), conduit par M. [O] [S].

3. M. [S] a été mis en examen du chef d'homicide involontaire.

4. Mme [U] [B], mère de la défunte, s'est constituée partie civile.

5. Le juge d'instruction a ordonné une expertise en accidentologie, le 5 juillet 2021, et délivré aux enquêteurs une commission rogatoire du même jour.

6. Saisi par réquisitions supplétives du 20 octobre 2023, il a notifié à la société [2] une mise examen pour homicide involontaire par personne morale, le 1er février 2024.

7. Les personnes mises en examen ont présenté des requêtes en annulation d'actes et pièces de la procédure.

Examen des moyens

Sur le moyen proposé pour M. [S], pris en ses première, deuxième et troisième branches, et le moyen proposé pour la société [2], pris en ses première et deuxième branches

8. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le moyen proposé pour la société [2] et le moyen proposé pour M. [S], pris en leur quatrième branche

Enoncé des moyens

9. Le moyen proposé pour la société [2] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a limité l'annulation à l'ordonnance de commission d'experts du 5 juillet 2021 figurant à la cote D 170, à l'ordonnance de modification de l'ordonnance de commission d'experts en date du 23 juillet 2021 figurant à la cote D 175, au pré-rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 145 et au rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 186, a limité la cancellation dans l'audition de la partie civile D 128 à D 129 à la question : « je vous indique au sujet de cette expertise » jusqu'à « en avez-vous connaissance » et à la question « en ce qui concerne l'article paru dans la presse le 16 janvier 2021 que l'expertise en cours a pour mission » jusqu'à « toutes observations utiles à la manifestation de la vérité » et a rejeté la requête et les moyens de nullité pour le surplus, alors :

« 4°/ qu'en retenant, pour rejeter la demande d'annulation de la mise sous scellés de deux vidéogrammes, que « l'officier de police judiciaire [était] saisi en vertu de la commission rogatoire [du 5 juillet 2021 (D 148)] », quand elle rappelait elle même les termes de cette « commission rogatoire d'assistance à experts » dont il résultait qu'elle était accessoire à l'ordonnance de commission d'experts annulée (D 170) et que l'officier de police judiciaire n'était saisi qu'afin d'« assister » les experts dans la réalisation de leur mission, en sorte que cette commission rogatoire devait elle-même être annulée et ne pouvait fonder la mise sous scellés, la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire et 174 du code de procédure pénale. »

10. Le moyen proposé pour M. [S] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a limité l'annulation des actes de procédure à l'ordonnance de commission d'experts du 5 juillet 2021 figurant à la cote D 170, à l'ordonnance de modification de l'ordonnance de commission d'experts en date du 23 juillet 2021 figurant à la cote D 175, au pré-rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 145 et au rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 186, puis a rejeté la requête et les moyens de nullité pour le surplus, alors :

« 4°/ que, enfin, lorsque la chambre de l'instruction prononce l'annulation d'actes de procédure, les actes ultérieurs doivent être annulés s'ils procèdent des actes viciés ; qu'en se bornant à annuler l'ordonnance de commission d'expert du 5 juillet 2021, l'ordonnance modificative du 23 juillet 2021, le pré-rapport d'expertise et le rapport d'expertise, sans en tirer les conséquences en annulant, par voie de conséquence, la commission rogatoire d'assistance à expert du 5 juillet 2021 (D148), les trois procès-verbaux du 2 août 2021 (D149 et D150 et D151) ainsi que l'inventaire des pièces à conviction du 2 août 2021 (D152) et l'ordonnance de prorogation du délai d'expertise du 21 novembre 2022 (D155) procédant directement de l'ordonnance de commission d'expert et sa commission rogatoire, la chambre de l'instruction a violé l'article 174 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

11. Les moyens sont réunis.

Sur les moyens, en ce qu'ils concernent le placement sous scellés des enregistrements de vidéosurveillance et les procès-verbaux y afférents

12. L'arrêt attaqué, après avoir annulé l'expertise et les actes subséquents, a rejeté les demandes tendant notamment à l'annulation du procès-verbal de mise sous scellés des enregistrements de la vidéosurveillance interne de l'autobus, coté D 150, de l'inventaire des pièces à conviction, coté D 152, et du placement sous scellés desdits enregistrements.

13. Ainsi que la Cour de cassation, qui a le contrôle des pièces de la procédure, est en mesure de le constater, la commission rogatoire du 5 juillet 2021, malgré son intitulé, ne limite pas la mission des enquêteurs à l'assistance aux opérations d'expertise mais ordonne également à ceux-ci de poursuivre l'enquête et procéder à toutes saisies et investigations utiles à la manifestation de la vérité. Cet acte ne trouve donc pas son support nécessaire dans l'ordonnance de commission d'expert et l'expertise annulées.

14. Les juges ont donc justement considéré que le placement sous scellés des enregistrements et l'inventaire des pièces à conviction, réalisés à la demande et sous le contrôle du juge d'instruction en application des articles 80,151 et 152 du code de procédure pénale, n'encouraient pas l'annulation, en l'absence d'atteinte démontrée aux intérêts de M. [S] et de la société [2].

15. Les griefs doivent en conséquence être écartés.

Mais sur les moyens, pris pour le surplus

Vu l'article 174, alinéa 2, du code de procédure pénale :

16. Selon ce texte, lorsque la chambre de l'instruction constate la nullité d'un acte de la procédure, doivent être annulés par voie de conséquence les actes qui ont pour support nécessaire l'acte vicié.

17. L'arrêt attaqué, après avoir annulé l'expertise et les actes subséquents, a rejeté les autres demandes.

18. En omettant d'annuler d'autres actes et pièces qui trouvent leur support nécessaire dans les actes annulés, tels que le procès-verbal d'assistance à expert, coté D 151, l'ordonnance de prorogation du délai d'expertise, cotée D 155, et les observations sur le pré-rapport d'expertise adressées par les parties au juge d'instruction, cotées D 168 et D 169, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

19. La cassation est encourue de ce chef.

Et sur le moyen proposé pour la société [2], pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

20. Le moyen proposé pour la société [2] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a limité l'annulation à l'ordonnance de commission d'experts du 5 juillet 2021 figurant à la cote D 170, à l'ordonnance de modification de l'ordonnance de commission d'experts en date du 23 juillet 2021 figurant à la cote D 175, au pré-rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 145 et au rapport d'expertise en accidentologie figurant à la cote D 186, a limité la cancellation dans l'audition de la partie civile D 128 à D 129 à la question : « je vous indique au sujet de cette expertise » jusqu'à « en avez-vous connaissance » et à la question « en ce qui concerne l'article paru dans la presse le 16 janvier 2021 que l'expertise en cours a pour mission » jusqu'à « toutes observations utiles à la manifestation de la vérité » et a rejeté la requête et les moyens de nullité pour le surplus, alors :

« 3°/ qu'en toute hypothèse, doivent être cancellés les actes partiellement annulés, ainsi que toute référence directe et explicite aux actes irréguliers ; qu'en refusant d'ordonner la cancellation du procès-verbal d'interrogatoire de première comparution de la société [2] [Localité 3] (D 205), quand le juge d'instruction avait interrogé à plusieurs reprises la société [2] [Localité 3] sur les conclusions du rapport d'expertise dont elle prononçait l'annulation (D 205/2, § 15 ; D 205/3, § 4 ; D 205/5, § 4 ; D 205/5, § 13 ; D 205/6, § 6), la chambre de l'instruction a violé les articles 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire et 174 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 174, alinéa 3, du code de procédure pénale :

21. Selon ce texte, doivent être cancellés les actes partiellement annulés, ainsi que toute référence directe et explicite aux actes irréguliers.

22. L'arrêt attaqué, après avoir annulé l'ordonnance de commission d'expert, l'ordonnance modifiant la mission des experts, le pré-rapport et le rapport des experts, cotés D 170, D 175, D 145 et D 186, a ordonné la cancellation du procès-verbal d'audition de la partie civile, coté D 128, et rejeté les autres demandes.

23. C'est à tort que les juges ont omis de canceller certaines mentions figurant dans l'interrogatoire de première comparution de la société [2], coté D 205, faisant expressément référence au rapport d'expertise et aux conclusions des experts annulés.

24. La cassation est de nouveau encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

25. La cassation, n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 30 mai 2024, en ce qu'il n'a pas annulé les pièces cotées D 151, D 155, D 168 et D 169, et n'a pas cancellé certaines mentions figurant dans l'interrogatoire de première comparution coté D 205, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

PRONONCE l'annulation des pièces cotées D 151, D 155, D 168 et D 169 ;

ORDONNE le retrait des pièces annulées du dossier et leur classement au greffe de la chambre de l'instruction ;

ORDONNE la cancellation du procès-verbal d'interrogatoire de première comparution de la société [2], coté D 205 :

- dans la cote D 205/2 : le passage de la question commençant par « Les investigations ont été complétées par une expertise » et se terminant par « au regard de la sécurité en matière de transport de voyageurs » ;

- dans la cote D 205/3 : l'intégralité de la question commençant par « Les experts expliquent » et se terminant par « Qu'en pensez-vous ? » ;

- dans la cote D 205/3 : le passage de la réponse commençant par « en l'état les experts concluent » et se terminant par « en invisibilité par trois personnes » ;

- dans la cote D 205/3 : le passage de la réponse commençant par « Vous m'indiquez que les experts précisent » et se terminant par « agir pour éviter l'irréparable » ;

- dans la cote D 205/5 : le début de la question « Les experts rappellent » et le passage de ladite question commençant par « Toutefois, la vidéo interne » et se terminant par « ont effectué leur trajet à cet endroit » ;

- dans la cote D 205/5 : le passage de la question commençant par « Le rapport d'expertise conclut » et se terminant par « dans le bus ce jour-là (D 186, page 131) » ;

- dans la cote D 205/6 : l'intégralité de la question commençant par « Les experts concluent enfin... » et de l'intégralité de la réponse commençant par « La présence de personnes ... » ;

DIT qu'il sera établi une copie certifiée de la pièce cancellée qui sera classée au greffe de la chambre de l'instruction ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2500593
Date de la décision : 13/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, 30 mai 2024


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 mai. 2025, pourvoi n°C2500593


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 20/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:C2500593
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