LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CH10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 30 avril 2025
Cassation partielle sans renvoi
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 400 F-D
Pourvoi n° W 22-20.830
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 AVRIL 2025
M. [W] [M], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-20.830 contre l'arrêt rendu le 30 juin 2022 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à l'association d'actionnaires minoritaires de Figesbal, dont le siège est [Adresse 5], ayant élu domicile chez M. [Z] [B], [Adresse 3],
2°/ à M. [O] [L], domicilié [Adresse 4],
3°/ à Mme [J] [U], domiciliée [Adresse 6],
4°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [M], de la SCP Richard, avocat de M. [L] et de Mme [U], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mars 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 30 juin 2022), la société Compagnie financière calédonienne (la Cofical) a assigné en référé la société Figesbal et M. [L] afin d'obtenir, sur le fondement de l'article L. 225-103, II, 2°du code de commerce, la désignation d'un mandataire ad hoc de la société Figesbal, chargé de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. [L] et [Y] de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société pour désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général.
2. Le mandataire ad hoc, désigné par une ordonnance du 4 octobre 2017, a convoqué l'assemblée générale qui, le 16 mars 2018, a révoqué MM. [L] et [Y] et désigné la société Figespart et la société Cofical aux fonctions d'administrateur. Le même jour, le conseil d'administration a, dans sa nouvelle composition, élu Mme [U] en qualité de président du conseil d'administration et désigné M. [M] en qualité de directeur général.
3. Par un arrêt du 27 septembre 2018, une cour d'appel a infirmé l'ordonnance du 4 octobre 2017 et rejeté les demandes de la société Cofical.
4. Le 1er octobre 2018, M. [L] et l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal (l'AAMF) ont sollicité en référé la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018, du conseil d'administration du même jour et des décisions ultérieures de ces organes.
5. Par un arrêt du 29 novembre 2018, la cour d'appel a dit que, par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. [L] était remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal et a ordonné en conséquence la suspension des effets des assemblées générales et conseils d'administration postérieurs à la nomination d'un administrateur en application de l'ordonnance du 4 octobre 2017.
6. Par un arrêt du 13 janvier 2021 (Com., 13 janvier 2021, pourvoi n° 19-11.302, 18-24.853), la Cour de cassation a cassé, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société Cofical et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 septembre 2018, constaté l'annulation de l'arrêt rendu le 29 novembre 2018, remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les a renvoyé devant la cour d'appel autrement composée.
7. Entre-temps, selon requête introductive d'instance déposée le 28 janvier 2019, M. [L] et l'AAMF avaient sollicité l'annulation de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du même jour et des décisions ultérieures du conseil d'administration et de l'assemblée générale des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018.
8. Par un jugement du 12 juin 2020, dont la société Figesbal a interjeté appel, un tribunal mixte de commerce a fait droit à ces demandes.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
9. M. [M] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à la suspension des effets de sa démission du conseil d'administration de la société Figesbal, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le juge ne peut statuer sur une demande subsidiaire qu'en cas de rejet de la demande principale ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, M. [M] demandait à titre principal de rejeter les demandes fins et conclusions de l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal, de M. [L] et de Mme [U], et à titre subsidiaire et s'il était fait droit aux demandes formées par les parties adverses, de voir prononcer la suspension des effets de sa démission du conseil d'administration de la société Figesbal et dire en conséquence qu'il faisait partie du conseil d'administration ressuscité issu de l'assemblée générale du 16 mai 2018 et qu'il était également rétabli dans son mandat de directeur général ; qu'après avoir débouté ou déclaré irrecevable l'intégralité des demandes de M. [L], de l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal et de Mme [U], conformément à la demande principale de M. [M], l'arrêt a cependant statué sur sa demande subsidiaire pour l'en débouter ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette demande subsidiaire devenue sans objet, la cour d'appel a méconnu l'article 4 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
10. M. [L] et Mme [U] contestent la recevabilité du moyen. Il soutiennent que M. [M] ne justifie pas d'un intérêt à agir, sa demande n'ayant pas été accueillie par la cour d'appel.
11. Cependant, M. [M] justifie d'un intérêt à voir censurer l'arrêt l'ayant débouté de sa demande.
12. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 4 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie :
13. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
14. L'arrêt infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau, déboute M. [L] et l'AAMF de leur demande tendant à l'annulation des décisions prises lors des assemblées générales et des conseils d'administration tenus les 16 mars 2018, 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, déboute M. [M] de sa demande tendant à la suspension des effets de sa démission du conseil d'administration de la société Figesbal et déclare irrecevable la demande de M. [L], de l'AAMF et de Mme [U] tendant à l'annulation des décisions prises lors des assemblées générales et des conseils d'administration tenus les 26 février 2020 et 10 décembre 2020 voire à leur suspension.
15. En statuant ainsi, alors que, dans le dispositif de ses conclusions, M. [M] avait conclu, à titre principal, au rejet des demandes de l'AAMF, de M. [L] et de Mme [U] et n'avait demandé de prononcer la suspension des effets de sa démission qu'à titre subsidiaire, s'il était fait droit aux demandes formées par les parties adverses, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
16. Tel que suggéré par M. [M], il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
17. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il déboute M. [M] de sa demande tendant à la suspension des effets de sa démission du conseil d'administration de la société Figesbal, l'arrêt rendu le 30 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne M. [L] et Mme [U], l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal et la société Figesbal aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] et Mme [U] et les condamne à payer à M. [M] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le trente avril deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.