LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CH10
COUR DE CASSATION
______________________
Arrêt du 30 avril 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 388 F-D
Pourvoi n° D 22-23.482
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 AVRIL 2025
1°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 32]", dont le siège est [Adresse 4], [Localité 21], représenté par son syndic, la société Logepargne, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8], [Localité 16],
2°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 28]", dont le siège est [Adresse 10], [Localité 21], représenté par son syndic, la société Novadb, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 13], [Localité 18],
3°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 30]", dont le siège est [Adresse 7], [Localité 21], représenté par son syndic, la société Foncia [Localité 26] rive droite, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 9], [Localité 17],
4°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 1] - [Adresse 2], dont le siège est [Adresse 1] - [Adresse 2], [Localité 20], représenté par son syndic, la société Novadb, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 13], [Localité 18],
5°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "Perspective 2", dont le siège est [Adresse 6], [Localité 21],
6°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 31]", dont le siège est [Adresse 3], [Localité 21],
7°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 27]", dont le siège est [Adresse 14], [Localité 21],
8°/ le syndicat des copropriétaires de l'immeuble "[Adresse 29]", dont le siège est [Adresse 12], [Localité 21],
tous quatre représentés par leur syndic, la société Foncia [Localité 26] rive droite, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 9], [Localité 17],
ont formé le pourvoi n° D 22-23.482 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Dalkia, société anonyme, dont le siège est [Adresse 11], [Localité 15],
2°/ à la société Sofratherm, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 22], [Localité 23],
3°/ à la société Engie énergie services, société anonyme, dont le siège est [Adresse 25], [Localité 24],
4°/ à la société Compagnie parisienne de chauffage urbain, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 19],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Delbano, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat des syndicats des copropriétaires des immeubles "[Adresse 32]", "[Adresse 28]", "[Adresse 30]", "Perspective 2", "[Adresse 31]", "[Adresse 27]", "[Adresse 29]", et de l'immeuble situé [Adresse 1] - [Adresse 2], de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société Compagnie parisienne de chauffage urbain, de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de la société Dalkia, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mars 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Delbano, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2022), les syndicats des copropriétaires des immeubles « Tour rive gauche », « Tour de Mars », « Tour évasion 2000 », « Perspective 2 », « [Adresse 31] », « [Adresse 27] », « [Adresse 29] » et de l'immeuble situé [Adresse 1] - [Adresse 2] (les syndicats de copropriétaires) ont interjeté appel du jugement les ayant déboutés de leur action indemnitaire, dirigée contre la société d'économie mixte, chargée de leur assurer la distribution de chaleur, directement ou par l'intermédiaire des sociétés Dalkia et Sofratherm.
2. Un conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de leur déclaration d'appel du 2 juillet 2021, par une ordonnance qui a été déférée à la cour d'appel.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Les syndicats de copropriétaires font grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui a prononcé la caducité de leur déclaration d'appel, alors :
« 1°/ que si l'article 542 du code de procédure civile qui dispose que « l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel », définit l'objet de l'appel, l'article 954 du code de procédure civile, relatif au contenu des conclusions, n'impose aux parties que de mentionner dans le dispositif de leurs conclusions d'appel leurs « prétentions », lesquelles fixent l'objet du litige, et non l'objet de l'appel qui consiste en la réformation ou l'annulation du jugement ; que l'article 908 du code de procédure civile ne sanctionne par la caducité de la déclaration d'appel que le non-respect par l'appelant du délai de trois mois qui lui est imparti à compter de sa déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe ; que la nouvelle interprétation de ces dispositions en vertu de laquelle l'appelant doit, à peine de caducité de son appel, mentionner dans le dispositif de ses premières conclusions d'appel, qu'il sollicite l'infirmation ou l'annulation du jugement en plus de ses prétentions, bien que l'objet de l'appel a déjà été circonscrit dans la déclaration d'appel qui doit mentionner les chefs de jugement critiqués, constitue une charge procédurale excessive par le formalisme qu'elle implique et la sanction disproportionnée qui l'assortit, qui porte atteinte au droit d'accès au juge ; que dès lors en jugeant qu'était caduque la déclaration d'appel formée par les syndicats de copropriétaires qui tendait à l'infirmation du jugement entrepris, après avoir constaté que le dispositif de leurs premières conclusions d'appel, qui énonçait leurs prétentions, ne rappelait pas que l'infirmation du jugement était poursuivie, la cour d'appel a violé les articles 542, 562, 908, 954 du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;
2°/ que le dispositif des conclusions des parties n'a pas à reprendre les chefs de dispositif du jugement dont elles demandent l'infirmation ; qu'en jugeant que le dispositif des conclusions que l'appelant dépose devant la cour doit expressément énoncer d'abord ceux des chefs du jugement qu'il critique, avant d'indiquer celles des demandes qu'il entend voir juger et qu'en l'absence d'énoncé des premiers, la valeur et la portée des secondes ne peuvent être déduites logiquement par le juge d'appel et par les autres parties à l'instance, la cour d'appel a violé les articles 542 et 954 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. Il résulte de la combinaison des articles 542 et 954 du code de procédure civile que le dispositif des conclusions de l'appelant remises dans le délai de l'article 908 du code précité doit comporter une prétention sollicitant expressément l'infirmation ou l'annulation du jugement frappé d'appel.
5. A défaut, en application de l'article 908 du même code, la déclaration d'appel est caduque ou, conformément à l'article 954, alinéa 3, la cour d'appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif, ne peut que confirmer le jugement.
6. Il s'ensuit que l'appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu'il demande l' infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue de relever d'office la caducité de l'appel.
7. Cette obligation de mentionner expressément la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement a été affirmée pour la première fois par un arrêt publié le 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié). Faisant peser sur les parties une charge procédurale nouvelle, son application immédiate dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de cet arrêt, a été différée aux instances introduites par une déclaration d'appel postérieure au 17 septembre 2020, dès lors qu'elle aboutissait à priver les appelants du droit à un procès équitable.
8. Ainsi reportée dans le temps, l'application de cette règle devenue prévisible, dénuée d'ambiguïté pour un professionnel avisé comme un auxiliaire de justice et qui poursuit le but légitime de célérité et de bonne administration de la justice, ne constitue pas une charge procédurale excessive par le formalisme qu'elle implique, sa sanction n'étant en outre pas disproportionnée, de sorte qu'elle ne porte aucune atteinte au droit d'accès au juge.
9. L'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le dispositif des premières conclusions des appelants, transmises le 28 septembre 2021, dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile, ne comporte aucune demande d'infirmation, totale ou partielle, du jugement déféré, pas plus que d'annulation, de sorte que l'objet du litige ne peut être déterminé au regard de l'article 542 du même code.
10. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que la déclaration d'appel était caduque.
11. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, qui vise des motifs surabondants, n'est, dès lors, pas fondé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les syndicats des copropriétaires des immeubles « Tour rive gauche », « Tour de Mars », « Tour évasion 2000 », « Perspective 2 », « [Adresse 31] », « [Adresse 27] », « [Adresse 29] » et de l'immeuble situé [Adresse 1] - [Adresse 2], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les syndicats des copropriétaires des immeubles « Tour rive gauche », « Tour de Mars », « Tour évasion 2000 », « Perspective 2 », « [Adresse 31] », « [Adresse 27] », « [Adresse 29] » et de l'immeuble situé [Adresse 1] - [Adresse 2] et les condamne à payer à la société Dalkia la somme globale de 3 000 euros et à la société Compagnie parisienne de chauffage urbain la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le trente avril deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.