LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 avril 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 347 F-D
Pourvoi n° B 22-24.101
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 AVRIL 2025
L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 22-24.101 contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2022 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, protection sociale), dans le litige l'opposant au [3], dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommé [4], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Labaune, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Rhône-Alpes, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du [3], anciennement dénommé [4], et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 mars 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Labaune, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 13 octobre 2022), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2012 et 2013, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Rhône-Alpes (l'URSSAF) a adressé au [3], anciennement dénommé [4] (l'établissement public), une lettre d'observations suivie, le 6 juillet 2015, d'une mise en demeure, portant notamment redressement au titre de la réduction générale des cotisations patronales sur les bas salaires.
2. L'établissement public a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
3. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler le redressement portant sur la réduction générale des cotisations patronales sur les bas salaires, alors « que la réduction des cotisations patronales au titre de la loi Fillon n'est applicable qu'aux employeurs qui ont l'obligation de s'assurer contre le risque de privation d'emploi ; qu'il en résulte qu'un établissement public adhérant volontairement à l'assurance chômage de manière révocable au titre de son personnel non statutaire n'est pas éligible à la réduction Fillon ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si, comme le faisait valoir l'URSSAF, le syndicat n'avait pas adhéré volontairement, et de manière révocable, à l'assurance chômage au titre de son personnel non statutaire, ce qui l'aurait exclu du bénéfice de la réduction Fillon, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, ensemble des articles L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail, en leur rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 241-13, II, du code de la sécurité sociale, L. 5424-1, 3°, et L. 5424-2 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses :
4. Selon le premier de ces textes, la réduction générale des cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas salaires est appliquée aux gains et rémunérations versés aux salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 5422-13 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de l'article L. 5424-1 du même code.
5. Selon la combinaison des deux derniers, ont la faculté d'adhérer au régime d'assurance chômage, de manière irrévocable, les employeurs inscrits au répertoire national des entreprises contrôlées majoritairement par l'État et ceux ayant la qualité juridique, soit d'établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, soit de sociétés d'économie mixte dans lesquelles les collectivités ont une participation majoritaire.
6. Il en résulte que la réduction générale des cotisations patronales sur les bas salaires ne s'applique aux rémunérations versées aux salariés des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales ou des sociétés d'économie mixte dans lesquelles les collectivités ont une participation majoritaire que si ces derniers ont adhéré au régime d'assurance chômage, pour leurs salariés, par une option irrévocable.
7. Pour accueillir le recours de l'établissement public, l'arrêt retient que, nonobstant la nature de son inscription au système national d'identification et du répertoire des entreprises et de leurs établissements et son défaut d'inscription au registre du commerce et des sociétés, l'établissement public est fondé à se prévaloir de la qualité d'établissement public à caractère industriel et commercial compte tenu de l'objet de son activité, consistant principalement en l'exploitation d'un domaine skiable, de l'origine de ses ressources, principalement constituées des redevances perçues en contrepartie du service rendu, et de son mode de fonctionnement, comparable à celui d'une entreprise privée.
8. En statuant ainsi, alors qu'elle devait vérifier, au besoin d'office, si les conditions requises pour bénéficier de la réduction des cotisations patronales sur les bas salaires étaient réunies durant la période considérée et qu'il ne résulte pas de ses constatations que l'établissement public ait effectivement adhéré, de manière irrévocable, pour ses salariés, au régime d'assurance chômage, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en tant qu'il déclare recevable le recours du [3], l'arrêt rendu le 13 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne le [3], anciennement dénommé [4], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le [3], anciennement dénommé [4], et le condamne à payer à l'URSSAF de Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille vingt-cinq.