LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
FC
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 27 février 2025
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 114 F-D
Pourvoi n° B 22-24.860
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2025
M. [G] [T], domicilié [Adresse 6], a formé le pourvoi n° B 22-24.860 contre l'arrêt rendu le 9 novembre 2022 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des urgences), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [P] [X],
2°/ à Mme [W] [Z], épouse [X],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Choquet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [T], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. et Mme [X], et l'avis de Mme Compagnie, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Choquet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 9 novembre 2022) et les productions, M. et Mme [X] ont, sur deux parcelles cadastrées section AK n° [Cadastre 3] et [Cadastre 5], la première acquise par eux par acte des 4 et 5 janvier 1993 et la seconde issue de la division d'une parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 2], acquise par M. [X] seul par acte du 12 février 1987, leur maison à usage d'habitation, constituée de deux bâtiments reliés l'un à l'autre par un escalier intérieur d'une largeur de cinquante-huit centimètres.
2. Ils ont assigné M. [T], propriétaire de la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 7], en reconnaissance de l'existence d'une servitude de passage grevant celle-ci au profit de la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 3] et fixation de son assiette.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. [T] fait grief à l'arrêt de constater l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 3] et de fixer l'assiette de la servitude de passage sur la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 7] lui appartenant suivant le tracé figurant sur le plan annexé au rapport d'expertise de M. [E], sur une largeur de 150 centimètres et une longueur de 980 centimètres, suivant l'axe, alors « que le droit de réclamer le passage pour cause d'enclave est exclu en présence d'une desserte suffisante du fonds enclavé vers la voie publique via une autre parcelle appartenant également à la partie qui réclame un passage suffisant sur les fonds de ses voisins ; qu'en constatant l'état d'enclave de la parcelle AK [Cadastre 3], cependant qu'il n'était pas contesté que la maison appartenant à M. et Mme [X] étaient constituée de deux bâtiments situés sur les parcelles AK [Cadastre 3] et AK [Cadastre 5], que la parcelle AK [Cadastre 5], appartenant aussi à M. et Mme [X], avait toujours disposé d'un accès à la voie publique, et que les parcelles AK [Cadastre 3] et AK [Cadastre 4] étaient reliées entre elles par un escalier intérieur, la cour d'appel a violé l'article 682 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
5. Pour retenir l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 3], l'arrêt relève, d'une part, qu'en proposant l'instauration d'une servitude de tour d'échelle, M. [T] reconnaît que l'accès au fonds de M. et Mme [X] n'est pas suffisant pour qu'il puisse être procédé à des travaux, alors qu'il s'agit d'une maison à usage d'habitation, laquelle doit pouvoir disposer depuis la voix publique d'une ouverture suffisante à la circulation automobile pour en permettre la desserte, d'autre part, qu'il s'évince du rapport d'expertise que les deux parcelles dont sont propriétaires M. et Mme [X] sont distinctes et ne constituent pas une unité foncière, la maison d'habitation édifiée sur cette parcelle ayant vocation à disposer d'un accès direct sur la voie publique, eu égard à la configuration des lieux.
6. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. [T], qui soutenait qu'il n'était pas contesté que la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 5], sur laquelle est édifiée une partie de la maison d'habitation, également construite sur la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 3], les deux étant reliées par un escalier intérieur, avait toujours disposé d'un accès direct à la voie publique, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
7. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt constatant l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 3] et fixant l'assiette de la servitude de passage sur la parcelle cadastrée section AK n° [Cadastre 7] suivant le tracé figurant sur le plan annexé au rapport d'expertise de M. [E], sur une largeur de 150 centimètres et une longueur de 980 centimètres, suivant l'axe, entraîne la cassation des chefs de dispositif ordonnant la publication du jugement au service de la publicité foncière, accompagné dudit plan, à la requête de la partie la plus diligente, et déclarant irrecevable la demande en indemnisation formée par M. [T], qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. et Mme [X] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [X] et les condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt-cinq