LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° E 24-83.567 F-D
N° 00130
GM
5 FÉVRIER 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 5 FÉVRIER 2025
M. [X] [S] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 8e section, en date du 7 juin 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre en bande organisée et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 16 septembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Diop-Simon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [X] [S], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Diop-Simon, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces la procédure ce qui suit.
2. Le 11 septembre 2019, une information a été ouverte des chefs susvisés et M. [S] a été mis en examen le 13 décembre 2021.
3. Le 28 novembre 2022, son avocat a déposé une requête en nullité de pièces de la procédure.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à renvoi, dit n'y avoir lieu d'ordonner une mesure d'instruction, dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure et dit que la procédure est exempte de nullité pour le surplus, alors « qu'il doit résulter des mentions de l'arrêt attaqué que la défense a eu la parole en dernier, et en particulier après les réquisitions du ministère public, sur la demande de renvoi qu'elle a présentée et qui n'a pas été jointe au fond ; qu'au cas d'espèce, il ne résulte pas des mentions de l'arrêt que la défense a eu la parole après le ministère public sur la demande de renvoi qui n'a pourtant pas été jointe au fond ; qu'au contraire, il est explicitement mentionné que la cour a entendu l'avocat de la défense en ses observations, puis l'avocat général en ses réquisitions, avant de statuer immédiatement sur cette demande pour ne pas y faire droit ; qu'en statuant ainsi au terme d'une procédure irrégulière, la chambre de l'instruction a méconnu le principe selon lequel la défense doit avoir la parole en dernier sur tous les incidents qui ne sont pas joints au fond, et violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire et 199 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 199 du code de procédure pénale :
5. Il se déduit de ces textes que la personne comparaissant devant la chambre de l'instruction, ou son avocat, doivent avoir la parole les derniers, et que cette règle s'applique à tout incident, dès lors qu'il n'est pas joint au fond.
6. Le rejet, dans ces conditions, de ladite demande de renvoi fait nécessairement grief à la personne qu'elle concerne.
7. Il résulte des mentions de l'arrêt attaqué qu'il a été statué, au cours des débats, sur une demande de renvoi présentée par la défense, pour la rejeter, sans que cette dernière ait eu la parole en dernier sur cette demande.
8. En l'état de ces énonciations, alors que l'incident n'avait pas été joint au fond, de sorte qu'il ne suffisait pas que la parole ait été donnée en dernier à l'avocat de M. [S] à l'issue des débats sur le fond, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
9. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 7 juin 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt-cinq.