LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 février 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 59 F-D
Pourvoi n° V 23-19.338
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 FÉVRIER 2025
La société Xerox financial services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 3], a formé le pourvoi n° V 23-19.338 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-4), dans le litige l'opposant à la société Earl [Adresse 4], exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Xerox financial services, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Earl [Adresse 4], après débats en l'audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juin 2023), le 27 février 2014, la société Earl château de Beaupré (L'EARL) a signé avec la société Copy management, devenue INPS group (la société INPS) un bon de commande portant sur un photocopieur et une imprimante, ainsi qu'un contrat de maintenance et de garantie, moyennant le paiement de 60 mensualités. Le matériel a été livré le 19 mars 2014. Le 12 septembre 2014, un contrat de location financière portant sur ce matériel a été signé entre l'EARL et la société Xerox financial services (la société XFS).
2. Le 28 octobre 2015, un contrat portant sur du matériel similaire a été conclu entre l'EARL et la société INPS, et financé par la société Locam-location automobiles matériels (la société Locam). Le matériel financé par la société XFS a été repris par la société INPS.
3. Le 23 février 2018, soutenant que les loyers du bail signé le 12 septembre 2014 étaient impayés depuis le mois de décembre 2016, la société XFS a assigné l'EARL en résiliation du contrat de location et en paiement de diverses sommes. Le 13 avril 2018, l 'EARL a appelé en garantie la société INPS. Celle-ci ayant été mise en liquidation judiciaire le 14 juin 2018, l'EARL a appelé en intervention forcée le liquidateur.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches
Enoncé du moyen
5. La société XFS fait grief à l'arrêt de dire que le contrat la liant à I'EARL est caduc à compter du 28 octobre 2015, de rejeter, en conséquence, les demandes de la société XFS tendant au paiement des sommes de 13 302,54 euros TTC correspondant aux factures impayées outre les intérêts légaux, de 360 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement et 500 euros au titre des frais d'enlèvement et de dossier et de la condamner à payer à l'EARL la somme de 5 912,24 euros, alors :
« 1°/ que le mandant ne peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent que si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que la société XFS avait contresigné le bon de commande du matériel fourni à l'EARL ; qu'en présence d'une signature émanant de l'établissement financier pour conclure le contrat de location, les circonstances selon lesquelles l'employé de la société INPS Groupe ait été "le seul interlocuteur de la société [Adresse 4]" et la livraison du matériel ait été effectuée par la société INPS Groupe ne suffisaient pas, à elles seules, à permettre à l'EARL [Adresse 4] à ne pas vérifier les pouvoirs du prétendu mandataire; qu'en en décidant pourtant ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la croyance légitime de l'EARL Château de Beaupré dans les pouvoirs de la société INPS et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1998 du code civil ;
3°/ que la société XFS soutenait que l'EARL [Adresse 4] n'avait pas pu légitimement croire que son contrat de location avec XFS avait été résilié dès lors que INPS n'aurait pas pu être mandatée par XFS pour permettre à l'EARL de prendre des engagements avec un concurrent ; que dès lors, en se bornant à retenir que "l'employé de la société INPS a été le seul interlocuteur de la société Earl [Adresse 4]" et que "la livraison du matériel (?) a été effectuée par la société INPS Groupe" sans rechercher, comme elle y avait été invitée si la conclusion d'un contrat avec un bailleur concurrent n'était pas de nature à exclure tout mandat entre la société XFS et INPS lors de la reprise du matériel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1998 du code civil ;
4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la société XFS avait fait valoir que l'EARL avait perçu une "participation au solde" en 2015 qui aurait dû être reversée à la société XFS à titre d'indemnité de résiliation, ce qui n'avait pas été fait et qu'au surplus, le bon de reprise mentionnait "pour stockage", cette mention étant de nature à démontrer que la remise volontaire du copieur n'avait pas pour corollaire la résiliation immédiate du contrat de location qui aurait entraîné l'application d'une indemnité de résiliation anticipée ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. Sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond qui ont estimé que les circonstances dans lesquelles la société INPS groupe était intervenue avaient autorisé la société Earl [Adresse 4] à ne pas vérifier la réalité des pouvoirs cette dernière, et que celle-là avait pu légitimement croire à l'existence d'un mandat apparent tant au stade de la conclusion du contrat qu'au moment son intervention pour une reprise du matériel commandé en 2014.
7. Le moyen ne peut donc être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Xerox financial services aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Xerox financial services et la condamne à payer à la société Earl [Adresse 4] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt-cinq et signé par Mme Schmidt, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de M. Vigneau président, empêché, le conseiller rapporteur et le greffier de chambre, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.