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18/12/2024 | FRANCE | N°52401315

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 décembre 2024, 52401315


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CH9






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 18 décembre 2024








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1315 F-D


Pourvoi n° R 23-12.618






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAI

S
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 DÉCEMBRE 2024


M. [J] [C], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 23-12.618 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 décembre 2024

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1315 F-D

Pourvoi n° R 23-12.618

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 DÉCEMBRE 2024

M. [J] [C], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 23-12.618 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 5e chambre sociale PH), dans le litige l'opposant à la société La Cévenole, société civile agricole, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. [C], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société La Cévenole, après débats en l'audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, Mme Deltort, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 janvier 2023), M. [C] a été engagé en qualité de cadre technique le 1er janvier 1988 par la société La Cévenole. En dernier lieu, le salarié occupait le poste de responsable technique de la coopérative.

2. Le 18 juin 2018 le salarié a adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle qui a entraîné la rupture de son contrat de travail.

3. Le 24 octobre 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le quatrième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire et de congés payés afférents au titre des heures supplémentaires accomplies sur la période de juin 2015 à décembre 2016, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts pour comportement déloyal et pour défaut de prise de repos compensateurs, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, de répondre en produisant ses propres éléments ; qu'en se fondant, pour rejeter la demande d'heures supplémentaires du salarié, sur le défaut de production par ce dernier de ses bulletins de paie de juin 2015 à décembre 2016, après avoir constaté que le salarié produisait un tableau représentant année par année, en numérotation par semaine, un décompte global représentant pour chaque semaine ''heures normales'', ''heures 25 %'' et ''heures 50 %'', une attestation confirmant qu'il était présent tôt le matin, en journée et tard le soir, des copies de calendriers pour les années 2012 à 2018 comportant des chiffres en bleu et en rouge présentés comme correspondant au nombre d'heures travaillées par jour, ce dont il résultait qu'il avait présenté des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

6. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition des membres compétents de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

7. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

8. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

9. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires pour la période de juin 2015 à décembre 2016, l'arrêt retient que le salarié ne verse pas aux débats ses bulletins de salaire pour la période alors qu'ils permettraient de connaître la réalité des heures de travail rémunérées sur cette période et que l'employeur verse quelques bulletins de salaire sur cette même période.

10. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le salarié produisait, au soutien de sa demande, un tableau représentant année par année, en numérotation par semaine, un décompte global comprenant pour chaque semaine les « heures normales », les « heures 25 % » et les « heures 50 % », des attestations, des copies de calendriers pour les années 2012 à 2018 comportant des chiffres présentés comme correspondant au nombre d'heures travaillées par jour et la retranscription par huissier d'une conversation téléphonique, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Et sur les deuxième et troisième moyens, pris en leur quatrième branche, réunis

Enoncé du moyen

11. Par son deuxième moyen, le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire et de congés payés afférents au titre des heures supplémentaires accomplies au cours de l'année 2017, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts pour comportement déloyal et pour défaut de prise de repos compensateurs, alors « que les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile ; qu'en procédant, pour débouter le salarié de sa demande d'heures supplémentaires, à un examen mensuel des heures de travail effectuées par ce dernier, cependant qu'il lui appartenait de décompter les heures de travail accomplies par le salarié par semaine civile, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-29 du code du travail. »

12. Par son troisième moyen, le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire et de congés payés afférents au titre des heures supplémentaires accomplies au cours de l'année 2018, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages-intérêts pour comportement déloyal et pour défaut de prise de repos compensateurs, alors « que les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile ; qu'en procédant, pour débouter le salarié de sa demande d'heures supplémentaires, à un examen mensuel des heures de travail effectuées par ce dernier, cependant qu'il lui appartenait de décompter les heures de travail accomplies par le salarié par semaine civile, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-29 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3121-20 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l'article L. 3121-29 du code du travail dans sa rédaction issue de cette loi :

13. Selon ces textes, les heures supplémentaires se décomptent par semaine.

14. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires pour les années 2017 et 2018, l'arrêt retient que le salarié ne verse pas aux débats les éventuels avenants à son contrat de travail qui auraient permis de connaître d'éventuelles dispositions contractuelles quant aux modalités de décompte ou de récupération des heures de travail en raison du caractère spécifique de l'activité qui implique des périodes de forte activité, notamment pendant la période des vendanges et des périodes de moindre activité. Il en conclut que l'examen du décompte des heures effectuées par le salarié se fera de manière mensuelle, aucune indication n'étant donnée quant à un décompte hebdomadaire ou journalier du temps de travail dans le cadre contractuel.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [C] de sa demande en paiement de rappel de salaire outre congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour travail dissimulé, pour comportement déloyal, pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires et pour non-respect des repos hebdomadaires et journaliers, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société La Cévenole aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La Cévenole et la condamne à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401315
Date de la décision : 18/12/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 10 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 déc. 2024, pourvoi n°52401315


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 31/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401315
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