LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 décembre 2024
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 664 F-D
Pourvoi n° Y 23-14.419
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 DÉCEMBRE 2024
La caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles (CRAMA) Bretagne Pays de la Loire, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 23-14.419 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant à la société Le Grand Hôtel des bains, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Le Grand Hôtel des bains, après débats en l'audience publique du 5 novembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 janvier 2023), la société Le Grand Hôtel des bains bénéficie, par arrêté préfectoral du 8 février 2011, d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime comprenant notamment un mur de défense contre la mer.
2. En 2011, la société Le Grand Hôtel des bains a confié les travaux de démolition et reconstruction du mur à une entreprise, assurée auprès de la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire (la CRAMA).
3. Se plaignant de la dégradation des fondations du mur, la société Le Grand Hôtel des bains a déclaré le sinistre à la CRAMA, laquelle a dénié sa garantie.
4. Par acte du 1er février 2021, la société Le Grand Hôtel des bains a assigné la CRAMA aux fins d'indemnisation au titre de la réparation des dommages affectant le mur de soutènement.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui est irrecevable.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. La CRAMA fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir de la société Le Grand Hôtel des bains, alors « qu'en décidant que l'obligation de reconstruction et d'entretien du mur de protection contre la mer mise à la charge de la société Le Grand Hôtel des bains par l'arrêté d'autorisation d'occupation du domaine public maritime du 8 février 2011 emportait mandat du représentant de l'Etat au profit de cette société d'agir en réparation des désordres de nature décennale affectant le mur, cependant que l'arrêté du 8 février 2011 ne comportait aucune disposition conférant mandat à la société Le Grand Hôtel des bains d'agir en garantie décennale ou de percevoir des indemnités à ce titre, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de l'arrêté du 8 février 2011, a méconnu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
7. La recevabilité du moyen est contestée, au visa des articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile, au motif que, l'arrêt attaqué rejetant une fin de non-recevoir sans trancher au principal ni mettre fin à l'instance, il n'est pas, de ce chef, susceptible de pourvoi immédiat.
8. Mais le pourvoi qui attaque une décision ayant notamment prononcé sur la compétence, sans statuer sur le fond du litige, et critique le chef de dispositif ayant prononcé sur la compétence ainsi que d'autres chefs de l'arrêt, entre dans les prévisions de l'article 607-1 du code de procédure civile (2e Civ., 9 juin 2022, pourvoi n°19-20.592, publié).
9. Il en résulte que, comme le moyen qui critique le chef de dispositif relatif à la compétence de la juridiction, le moyen, relatif au chef de dispositif de l'arrêt statuant sur une fin de non-recevoir, est recevable.
Bien-fondé du moyen
10. C'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté de ses termes rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu que l'arrêté d'autorisation d'occupation du domaine public, qui faisait obligation à la société Le Grand Hôtel des bains d'entretenir en bon état, à ses frais, les ouvrages confiés et de remédier immédiatement à ses frais, aux dégradations du domaine public maritime, emportait mandat implicite du représentant de l'Etat à son profit d'agir en réparation des désordres de nature décennale affectant le mur de défense contre la mer.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire et la condamne à payer à la société Le Grand Hôtel des bains la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille vingt-quatre.