LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 décembre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1155 F-B
Pourvoi n° N 22-17.579
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [T].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 février 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 DÉCEMBRE 2024
La Caisse autonome de retraite des médecins de France, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-17.579 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2022 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [E] [T], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pédron, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Caisse autonome de retraite des médecins de France, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [T], et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 23 octobre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pédron, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 7 avril 2022) et les productions, M. [T] (le cotisant) s'est vu notifier par la Caisse autonome de retraite des médecins de France (la CARMF) une mise en demeure, suivie d'une contrainte en vue du recouvrement des cotisations et majorations dues au titre de l'année 2013.
2. Le cotisant a formé opposition à la contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. La CARMF fait grief à l'arrêt d'annuler la contrainte, alors :
« 1°/ que si les textes du code de la sécurité sociale exigent l'exercice de la profession de médecin à titre libéral, ils ne requièrent pas que le médecin soit en règle, à l'égard de l'ordre des médecins, s'agissant de son inscription à celui-ci ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 621-1 à L. 621-3, L. 622-5, R. 641-1 et R. 643-1 du code de la sécurité sociale et 2 des statuts de la CARMF, dans leurs rédactions applicables à l'époque des faits ;
2°/ que si même les textes du code de la santé publique exigent que le médecin soit en règle à l'égard de son ordre s'agissant de son inscription, de toute façon, le seul fait pour le médecin d'exercer sa profession à titre libéral et d'encaisser des revenus en contrepartie de cet exercice justifie, au regard des textes du code de la sécurité sociale, l'affiliation à la CARMF et le paiement de cotisation ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 621-1 à L. 621-3, L. 622-5, R. 641-1 et R. 643-1 du code de la sécurité sociale et 2 des statuts de la CARMF, dans leurs rédactions applicables à l'époque des faits. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 622-5, devenu L. 640-1, L. 642-1 et R. 643-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige :
4. Selon le dernier de ces textes, les personnes exerçant une profession libérale sont affiliées à la section professionnelle dont relève cette profession.
5. En application du premier, sont affiliées aux régimes d'assurance vieillesse et invalidité-décès des professions libérales, notamment les personnes exerçant la profession de médecin.
6. Aux termes du deuxième, toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment les prestations de retraite.
7. Il en résulte que l'obligation, pour un médecin exerçant à titre libéral, d'affiliation et de paiement des cotisations au régime de protection sociale correspondant à son activité prend naissance par le seul effet de la loi dès que s'exerce l'activité concernée.
8. Pour annuler la contrainte, l'arrêt relève que le cotisant n'est inscrit à aucun tableau de l'ordre des médecins depuis le 5 novembre 2012, date à partir de laquelle il lui était interdit d'exercer la profession de médecin. Il en déduit que le cotisant ne peut, dès lors, être considéré comme ayant exercé en 2013 l'activité libérale de médecin au sens des dispositions relatives à l'assurance vieillesse des professions libérales, et qu'en conséquence, il ne devait, ni ne pouvait, être affilié à la CARMF.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté aux dispositions fixant les modalités d'affiliation et de cotisations à la CARMF une condition qu'elles ne prévoient pas, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. [T] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [T] et le condamne à payer à la Caisse autonome de retraite des médecins de France la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille vingt-quatre.