LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 novembre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1078 F-D
Pourvoi n° N 22-17.901
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
M. [W] [N], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-17.901 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant à la société Financière MC, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Caillard, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [N], de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de la société Financière MC, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Caillard, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 décembre 2021), M. [N] a été condamné à payer diverses sommes à la société Financière MC (la société), par jugement d'un tribunal de commerce du 1er avril 2019, qui lui a été signifié le 3 mai 2019, et dont il a relevé appel le 7 décembre 2020.
2. Par une ordonnance du 10 mai 2021 que M. [N] a déférée à une cour d'appel, un conseiller de la mise en état a déclaré cet appel irrecevable.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
3. M. [N] fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable, alors « que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré à domicile, l'huissier de justice devant relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances qui l'en ont empêché ; qu'en se bornant, pour juger que l'huissier avait bien relaté les tentatives faites pour rencontrer M. [N] en vue d'une signification à personne, à relever que les mentions de l'huissier selon lesquelles l'acte a été remis à Mme [B] qui a certifié le domicile et accepté de recevoir l'acte font foi jusqu'à inscription de faux, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants à caractériser la moindre tentative relatée par l'huissier pour rencontrer personnellement M. [N], a privé sa décision de base légale a regard des articles 654 et 655 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 654 et 655 du code de procédure civile :
4. Selon ces textes, la signification doit être faite à personne et l'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour l'effectuer à la personne de son destinataire, ainsi que les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.
5. Pour confirmer l'ordonnance ayant déclaré l'appel irrecevable, l'arrêt relève, d'une part que l'huissier a exposé dans un courrier du 5 janvier 2021 avoir tenté une signification aux adresses mentionnées dans le jugement et appris que M. [N] était parti sans laisser d'adresse, puis a obtenu après recherche l'adresse du [Adresse 3], d'autre part qu'il est mentionné dans l'acte du 3 mai 2019 que le jugement a été signifié à cette adresse, en la personne de Mme [B] qui a certifié le domicile et accepté de recevoir l'acte.
6. Il retient ensuite que ces mentions dans l'acte font foi jusqu'à inscription de faux et que M. [N] est mal fondé à reprocher à l'huissier de ne pas avoir justifié de diligences pour le joindre à personne au [Adresse 3], adresse qui s'est révélée exacte.
7. Il en déduit que l'acte de signification du 3 mai 2019 constitue le point de départ du délai d'appel et que l'appel formé par M. [N] est tardif.
8. En se déterminant ainsi, sans constater que l'huissier de justice avait relaté dans l'acte les diligences qu'il avait accomplies pour effectuer la signification à la personne de M. [N] et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt déclarant l'appel irrecevable entraîne la cassation des autres chefs de dispositif, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Financière MC aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Financière MC et la condamne à payer à M. [N] la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille vingt-quatre.