LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 24-85.343 F-D
N° 01533
GM
20 NOVEMBRE 2024
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 20 NOVEMBRE 2024
M. [X] [H] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 25 juillet 2024, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de viol aggravé, en récidive, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.
Des mémoires ampliatif et personnel, ainsi qu'un mémoire en défense ont été produits.
Sur le rapport de Mme Piazza, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [X] [H], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Piazza, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [X] [H] est mis en examen du chef susvisé et détenu depuis le 13 décembre 2023.
3. Il a formé le 2 juillet 2024 une demande de mise en liberté qui a été rejetée par ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 9 juillet 2024.
4. Il a relevé appel de cette décision.
Examen de la recevabilité du mémoire personnel
5. L'article 590 du code de procédure pénale prévoit que les mémoires doivent contenir les moyens de cassation et viser les textes de loi dont la violation est invoquée.
6. Ainsi, le mémoire de M. [H], qui ne vise aucun texte de loi et n'offre à juger aucun moyen de droit, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 590 du code de procédure pénale et est, dès lors, irrecevable.
Examen du moyen du mémoire ampliatif
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance ayant rejeté la demande de mise en liberté de M. [H], alors « que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que lorsque la personne détenue joint à sa déclaration d'appel formulée auprès du chef de l'établissement pénitentiaire une lettre précisant les motifs de sa demande, la chambre de l'instruction est tenue de viser cette lettre en tant que mémoire de répondre à l'argumentation essentielle qu'elle contient ; qu'en l'espèce, alors que le mis en examen a annexé à sa déclaration d'appel une lettre précisant les motifs de sa demande et qu'il n'a pas comparu ni été représenté par son avocat, la chambre de l'instruction, qui n'a pas visé ce mémoire et constaté qu'« aucun mémoire n'a été déposé », et qui n'a pas expressément répondu à l'argumentation qui y était présentée relative à l'inexistence d'un trouble à l'ordre public et de risques de fuite ou de pression sur la victime eu égard aux garanties qu'offre le mis en examen, a violé les articles 198 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article préliminaire et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 198 et 593 du code de procédure pénale :
8. Il résulte du premier de ces textes que les parties et leurs avocats sont autorisés à produire un mémoire devant la chambre de l'instruction jusqu'au jour de l'audience.
9. Il se déduit du second que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties, l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivalant à leur absence.
10. M. [H] a joint à sa déclaration d'appel un courrier indiquant notamment qu'il était innocent et qu'il avait une situation professionnelle stable.
11. Par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction, après avoir indiqué que M. [H] n'avait déposé aucun mémoire, a confirmé l'ordonnance rejetant sa demande de mise en liberté, au regard des critères énumérés à l'article 144 du code de procédure pénale.
12. En se déterminant ainsi, sans viser le courrier dans lequel le détenu explicite son appel, et sans répondre à l'argumentation qu'il pouvait contenir, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
13. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 25 juillet 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
DIT n'y avoir lieu de remettre en liberté M. [H] ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille vingt-quatre.