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20/11/2024 | FRANCE | N°52401196

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2024, 52401196


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 20 novembre 2024








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1196 F-D


Pourvoi n° J 23-15.625






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024


La société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pou...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 novembre 2024

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1196 F-D

Pourvoi n° J 23-15.625

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024

La société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° J 23-15.625 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-1), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [O] [D], épouse [S], domiciliée [Adresse 2],

2°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [S], après débats en l'audience publique du 16 octobre 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, Mme Le Quellec, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mars 2023), Mme [D], épouse [S], employée, en qualité de cheffe d'équipe, niveau CE2, au sein de la société Elior services propreté et santé (la société) depuis le 6 novembre 2014, a saisi la juridiction prud'homale le 15 mai 2018 de demandes en paiement d'un rappel de la prime de treizième mois et d'un rappel de la prime d'assiduité sur le fondement du principe d'égalité de traitement.

2. Le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône est intervenu à l'instance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de le condamner à verser à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour privation de la prime de treizième mois, alors « qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement de soumettre au juge, qui est tenu d'en contrôler concrètement la réalité et la pertinence, les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ou de traitement entre des salariés placés dans une situation identique ou similaire, afin que l'employeur apporte à son tour la preuve d'éléments objectifs et pertinents justifiant cette différence ; que pour condamner la société ESPS à verser à la salariée des dommages-intérêts pour privation de la prime de treizième mois, la cour d'appel a tout débord relevé qu'il résultait des pièces versées aux débats que ''la prime de treizième mois est attribuée aux salariés appartenant aux catégories des agents de maîtrise et des cadres'' et que ''la prime de treizième mois est également attribuée à des salariés employés de la filière administrative aux niveaux 3 et 4'' puis a affirmé que ''l'invocation par la société de la seule appartenance à une catégorie professionnelle (cadres, agents de maîtrise, employés de la filière administrative) est inopérante pour exclure Mme [S] du bénéfice de cette prime de treizième mois'', que les fiches de postes versées aux débats par la société ''reflètent les missions et responsabilités déjà prises en compte par les textes conventionnels pour la détermination de la rémunération conventionnelle applicable à chacune des catégories'' et que la société ESPS ''souligne également que les cadres et employés de la filière administrative ne bénéficient pas de la garantie conventionnelle d'emploi en cas de transfert d'un marché, sans démontrer toutefois que l'absence de garantie d'emploi pour les cadres, agents de maîtrise et employés de la filière administrative, qui ne connaissent pas de changement d'employeur au cours de l'exécution de leur contrat de travail, constituerait un critère objectif d'attribution de la prime de treizième mois au regard de l'avantage considéré'', de sorte que ''la SAS Elior services propreté et santé ne justifie pas, dans ces conditions, de l'existence de critères d'attribution objectifs de la prime de treizième mois permettant d'en exclure les agents de service'' ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser que la salariée, cheffe d'équipe de la filière exploitation, se trouvait dans une situation identique, au regard de la prime de treizième mois, à celles des salariés des filières cadre et administrative avec lesquels elle se comparait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement, de l'article L. 3221-4 du code du travail et de l'article 1315, devenu 1353, du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3221-4 du code du travail, l'article 1315, devenu 1353, du code civil et le principe d'égalité de traitement :

4. Aux termes du premier de ces textes, sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

5. Il résulte du second de ces textes qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement de soumettre au juge, qui est tenu d'en contrôler concrètement la réalité et la pertinence, les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ou de traitement entre des salariés placés dans une situation identique ou similaire, afin que l'employeur apporte à son tour la preuve d'éléments objectifs et pertinents justifiant cette différence.

6. Pour condamner l'employeur à payer une certaine somme au titre de la prime de treizième mois à la salariée, l'arrêt constate que cette prime est attribuée aux salariés appartenant aux catégories des agents de maîtrise et des cadres sans condition ni critère précis et qu'elle est également versée à des employés de la filière administrative, aux niveaux 3 et 4.

7. L'arrêt rappelle que la différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence. Il conclut que l'invocation par l'employeur de la seule appartenance à une catégorie professionnelle (cadres, agents de maîtrise, employés de la filière administrative) est inopérante pour exclure la salariée du bénéfice de cette prime de treizième mois.

8. L'arrêt ajoute que si l'employeur verse un organigramme, des fiches de poste d'agent de services, de chef d'agence, de responsable de secteur, de gestionnaire de paie et de chef d'équipe, ces éléments reflètent les missions et responsabilité déjà prises en compte par les textes conventionnels pour la détermination de la rémunération conventionnelle applicable à chacune des catégories.

9. L'arrêt relève que l'employeur invoque que les salariés de la filière exploitation bénéficient d'avantages qui ne sont pas accordés aux employés de la filière administrative ou aux cadres et agents de maîtrise et cite à ce titre uniquement la prime de transport, laquelle n'a pas le même objet que la prime de treizième mois. Il observe que l'employeur fait valoir que les cadres et employés de la filière administrative ne bénéficient pas de la garantie conventionnelle d'emploi en cas de transfert d'un marché, sans démontrer toutefois que l'absence de garantie d'emploi pour les cadres, agents de maîtrise et employés de la filière administrative, qui ne connaissent pas de changement d'employeur au cours de l'exécution de leur contrat de travail, constituerait un critère objectif d'attribution de la prime de treizième mois, au regard de l'avantage considéré.

10. La cour d'appel en a déduit que l'employeur ne justifiait pas de l'existence de critères d'attribution objectifs de la prime de treizième mois permettant d'en exclure les agents de service.

11. En se déterminant ainsi, alors qu'une prime de treizième mois, qui n'a pas d'objet spécifique étranger au travail accompli ou destiné à compenser une sujétion particulière, participe de la rémunération annuelle versée, au même titre que le salaire de base, en contrepartie du travail, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé en quoi la salariée, employée, en qualité de cheffe d'équipe dans la filière d'exploitation était dans une situation identique à celle des salariés de la filière administrative auxquels elle se comparait, a privé sa décision de base légale.

Portée et conséquences de la cassation

12. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée emporte cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur à verser au syndicat CGT une certaine somme pour violation de la règle « à travail égal, salaire égal », qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé à payer à Mme [D], épouse [S], la somme de 4 574,88 euros à titre de dommages-intérêts pour privation de la prime de treizième mois, et en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé à payer au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne Mme [D], épouse [S], aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401196
Date de la décision : 20/11/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix en Provence, 10 mars 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2024, pourvoi n°52401196


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401196
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