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20/11/2024 | FRANCE | N°52401177

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2024, 52401177


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 20 novembre 2024








Cassation




Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1177 F-D


Pourvoi n° C 23-19.897








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAI

S
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024


La société Eiffage route Centre Est, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 novembre 2024

Cassation

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1177 F-D

Pourvoi n° C 23-19.897

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024

La société Eiffage route Centre Est, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 23-19.897 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2023 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [D] [P], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Eiffage route Centre Est, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [P], après débats en l'audience publique du 15 octobre 2024 où étaient présentes Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 15 juin 2023), M. [P] a été engagé en qualité de conducteur d'engins coefficient 125, niveau 2, le 20 mai 1996 par la société Gerland routes, aux droits de laquelle vient la société Eiffage route Centre Est. Il exerçait en dernier lieu les fonctions de chauffeur classification niveau 3, position 2, coefficient 165 et était titulaire de différents mandats de représentation.

2. La relation de travail est régie par la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992.

3. Le 17 février 2021, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir condamner l'employeur à lui payer un rappel de salaire en application de l'accord collectif sur le développement du dialogue social au sein d'Eiffage travaux publics du 17 septembre 2013.

Examen du moyen.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié des sommes à titre de rappel de salaire et congés payés afférents, alors « que les juges du fond sont tenus, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que lorsqu'une convention collective manque de clarté, elle doit être interprétée comme la loi, c'est à dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte ; que l'article 3.4. de l'accord collectif du 17 septembre 2013 relatif au développement du dialogue social au sein d'Eiffage travaux publics prévoit que "l'évolution professionnelle et de rémunération des salariés exerçant des fonctions représentatives est déterminée comme pour tout autre salarié, en fonction des caractéristiques de l'emploi, de la nature des tâches accomplies et des aptitudes professionnelles de l'intéressé [?] les évolutions de rémunération des représentants du personnel consacrant une partie importante de leur temps de travail à leurs fonctions électives ou syndicales sont prononcées conformément aux règles en vigueur pour l'ensemble des salariés de la société d'appartenance et correspondent à minima avec l'évolution moyenne des salariés du même emploi" ; que l'article 12.2 de la classification des ouvriers dans la convention collective nationale des travaux publics, relatif à la définition générale des emplois précise que "la grille de classification des ouvriers de travaux publics comprend les définitions générales des emplois, répertoriés en quatre niveaux de qualification, à l'intérieur desquels se situent sept positions. A ces définitions d'emploi est annexé un tableau de critères classants permettant de faciliter l'adéquation entre le contenu des emplois et les capacités nécessaires pour les occuper. Ces critères sont les suivants : responsabilité dans l'organisation du travail ; autonomie/initiative ; technicité ; formation/expérience [?] ; qu'il en résulte que le respect de l'évolution minimale garantie aux salariés titulaires d'un mandat de représentation s'apprécie au regard de l'emploi effectivement occupé par le salarié représentant du personnel, en comparaison avec les salariés occupant le même emploi, tel qu'il a été conventionnellement défini ; qu'au cas présent, il est constant que M. [P] exerce l'emploi de chauffeur N3P2, coefficient 165 au sein de l'agence de [Localité 3] de la société Eiffage route Centre Est ; que la société exposante faisait valoir que, pour apprécier si M. [P] avait ou non correctement bénéficié de la garantie minimale d'évolution prévue par l'accord collectif du 17 septembre 2013, il convenait de comparer l'évolution des rémunérations de M. [P] à celle des autres chauffeurs N3 P2 - et non à celle de l'ensemble des chauffeurs, toutes classifications conventionnelles confondues, de la société comme le prétendait M. [P] ; qu'en refusant néanmoins de tenir compte de la classification conventionnelle de l'emploi de chauffeur N3 P2 occupé par M. [P] au motif que "l'accord du 17 septembre 2023, par l'expression "même emploi", se rapporte clairement s'agissant de M. [D] [P] à son emploi de chauffeur", pour faire droit à ses demandes de rappels de salaire, la cour d'appel a violé l'article 3.4. de l'accord collectif du 17 septembre 2017 relatif au développement du dialogue social au sein d'Eiffage travaux publics et l'article 12.2 de la classification des ouvriers dans la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992, ensemble l'article 12 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 12-2 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992, relatif à la définition générale des emplois et l'accord collectif du 17 septembre 2013 relatif au développement du dialogue social au sein d'Eiffage travaux publics :

5. Une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée
comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

6. L'article 12-2 de la convention collective énonce notamment que la grille de classification des ouvriers de travaux publics comprend les définitions générales des emplois, répertoriés en quatre niveaux de qualification, à l'intérieur desquels se situent sept positions.

7. L'article 3.4 de l'accord collectif prévoit que l'évolution professionnelle et de rémunération des salariés exerçant des fonctions représentatives est déterminée comme pour tout autre salarié, en fonction des caractéristiques de l'emploi, de la nature des tâches accomplies et des aptitudes professionnelles de l'intéressé, tout en prenant en considération les compétences acquises et le temps consacré à l'exercice des mandats de représentation du personnel. Les évolutions de rémunération des représentants du personnel consacrant une partie importante de leur temps de travail à leurs fonctions électives ou syndicales sont prononcées conformément aux règles en vigueur pour l'ensemble des salariés de la société d'appartenance et correspondent a minima avec l'évolution moyenne des salariés du même emploi.

8. Il résulte de ce texte que le respect de l'évolution minimale garantie aux salariés titulaires d'un mandat de représentation s'apprécie au regard de l'évolution des rémunérations des salariés relevant de la même position au sein du même niveau de qualification conventionnelle.

9. Pour condamner l'employeur à payer une somme à titre de rappel de salaire, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'article 12.2 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics utilise le terme "emploi" au pluriel au sein de chaque position : "Les emplois de cette position (...)", qu'il ne peut être considéré que le terme "même emploi" doit s'analyser en référence aux personnes occupant la même position au sein du même niveau de qualification, puisque ces positions et niveaux peuvent concerner plusieurs emplois différents, qu'un même emploi peut ainsi, au terme de cette convention, relever de plusieurs qualifications, que le contrat de travail mentionne la fonction de "conducteur d'engins", sa fiche de paye l'emploi de "chauffeur", qu'il résulte ainsi de ces éléments que l'accord du 17 septembre 2013, par l'expression "même emploi", se rapporte clairement s'agissant du salarié à son emploi de chauffeur et que l'employeur devait appliquer l'évolution moyenne de la rémunération des ouvriers occupés au poste de chauffeur.

10. En statuant ainsi, alors que les évolutions de la rémunération du salarié devaient correspondre a minima avec l'évolution moyenne des salariés chauffeurs niveau 3, position 2, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne M. [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401177
Date de la décision : 20/11/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 15 juin 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2024, pourvoi n°52401177


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401177
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