La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2024 | FRANCE | N°52401166

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2024, 52401166


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 20 novembre 2024








Rejet




Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1166 F-B


Pourvoi n° K 23-13.050








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024


La société Havas voyages, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 novembre 2024

Rejet

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1166 F-B

Pourvoi n° K 23-13.050

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 NOVEMBRE 2024

La société Havas voyages, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-13.050 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d'appel de Rennes (8e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à Mme [B] [H], épouse [P], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Leperchey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Havas voyages, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [H], après débats en l'audience publique du 15 octobre 2024 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Leperchey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Nirdé-Dorail, conseiller, M. Charbonnier, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 janvier 2023), Mme [H] a été engagée en qualité de responsable de point de vente, le 31 octobre 1994, par la société Havas voyages.

2. Ayant fait valoir ses droits à la retraite et contestant le montant de son indemnité de départ, elle a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la salariée une somme à titre de solde d'indemnité de départ à la retraite et une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°/ que selon les articles 22.4 et 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme du 12 mars 1993 (réécrite par avenant du 10 décembre 2013) en cas de départ à la retraite à la demande de l'employeur, le montant de cette indemnité est égal, par année d'ancienneté, à 20 % de sa rémunération telle que définie ci-dessus pour les 10 premières années d'ancienneté et à 35 % pour les années suivantes (art. 22.4) et en tout état de cause, ces indemnités ne pourront être inférieures à celles prescrites en cas de rupture du contrat de travail par la législation en vigueur et ne pourront donc pas être inférieures à l'indemnité légale de licenciement (art. 22.5) ; qu'il ressort de ces dispositions conventionnelles qu'en cas de mise à la retraite du salarié à l'initiative de l'employeur l'indemnité accordée correspond à 20 % de la rémunération annuelle par année d'ancienneté au titre des dix premières années d'ancienneté puis de 35 % pour les années suivantes, sous la réserve que cette indemnité ne soit pas inférieure à l'indemnité légale de licenciement ; que la précision apportée à l'article 22.5 de la convention collective ne s'applique qu'en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur et non en cas de départ à la retraite à l'initiative du salarié ; qu'en jugeant au contraire que les dispositions de l'article 22.5 s'appliquaient également en cas de départ à la retraite à l'initiative du salarié aux motifs impropres que la disposition litigieuse [ces indemnités] est formulée au pluriel, qu'elle avait fait l'objet d'un article distinct (l'article 22.5) sans avoir été portée à la suite du texte de l'article 22.4 et que l'intitulé du minimum visé, en ce qu'il détermine une modalité de calcul et une assiette précisément définie par la loi, ne permet pas de considérer qu'elle n'ait vocation à s'appliquer qu'aux départs à l'initiative de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 22.1 à 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme pris en leur version applicable au litige ;

2°/ que l'interprétation d'une disposition obscure d'une convention collective doit tenir compte des autres dispositions de l'accord qui peuvent la compléter, la préciser ou l'éclairer et, en dernier recours, de l'objectif social du texte ; que l'employeur faisait valoir qu'à les supposer obscures, les dispositions des articles 22.1 à 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme en leur version applicable étaient éclairées, d'une part, par la version de ces textes antérieure à leur réécriture par avenant du 10 décembre 2013 qui n'avaient vocation à s'appliquer que pour les indemnités de mise à la retraite à l'initiative de l'employeur et, d'autre part, par la rédaction de la convention collective nationale des opérateurs de voyage et des guides du 19 avril 2022 qui réserve expressément le minimum indemnitaire aux départs à la retraite à l'initiative de l'employeur ; qu'en ne tenant pas compte à tout le moins de ces dispositions éclairantes pour interpréter l'article 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme aux seuls motifs impropres que la circonstance qu'à l'occasion de la fusion des conventions collectives, la rédaction de la convention collective nationale des opérateurs de voyage et des guides du 19 avril 2022 ait modifié les dispositions antérieurement applicables en réservant expressément ce minimum aux départs à la retraite à l'initiative de l'employeur, est à cet égard indifférente, la cour d'appel a violé les articles 22.1 à 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme pris en leur version applicable au litige ;

3°/ que l'employeur faisait valoir que l'instauration par l'article 22.5 de la convention collective de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme d'une indemnité, qui ne peut pas être inférieure à celles prescrites en cas de rupture du contrat de travail par la législation en vigueur, n'a de raison d'être que dans les situations de rupture unilatérale du contrat par l'employeur, c'est-à-dire de mise à la retraite à son initiative, et non de départ à la retraite volontaire du salarié puisque dans cette dernière hypothèse l'indemnité prévue par l'article 22.3 de la convention collective (15 % de la rémunération annuelle par année d'ancienneté est par nature supérieure aux indemnités légales dues en cas de départ volontaire à la retraite ; qu'elle soutenait en conséquence que l'interprétation du texte défendue par la salariée revenait à vider l'article 22.3 de son objet ; qu'en retenant néanmoins que le droit à une indemnisation au moins égale à l'indemnité légale de licenciement s'appliquait également en cas de départ à la retraite à l'initiative du salarié, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en se fondant sur les motifs impropres selon lesquels si alors que la salariée invoque la situation de salariées parties à leur initiative et bénéficiaires des dispositions de l'article 22.5, l'employeur soutient que cela ne procéderait que d'erreurs dans la mesure où il ne faisait lui-même qu'application du taux de 15 % en cas de départ volontaire à la retraite. Même si l'erreur n'est effectivement pas créatrice de droit, l'argument tautologique invoqué par l'employeur consistant à revendiquer la justesse de son application de la disposition litigieuse par sa propre pratique, n'est pas à cet égard opérant, cependant que ces circonstances ne justifiaient pas que les dispositions conventionnelles en cause fassent l'objet d'une interprétation contraire à ce que prévoit leur texte, la cour d'appel a violé les articles 22.1 à 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme pris en leur version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

4. Une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

5. Aux termes de l'article 22.1 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme, au moment de son départ à la retraite, dans les conditions fixées à l'article précédent, le salarié recevra une indemnité de départ à la retraite en fonction de son ancienneté dans l'entreprise, telle que définie à l'article 31 de la présente convention collective.

6. Aux termes de l'article 22.2, l'indemnité de départ en retraite se calcule sur la base de 1/12 de la rémunération brute des 12 derniers mois précédant le départ en retraite ou, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, 1/3 des 3 derniers mois, étant entendu que, dans tous les cas, tous les éléments de rémunération confondus sont pris en compte, qu'ils soient réguliers ou non, obligatoires ou non.

7. Aux termes de l'article 22.3, en cas de départ à la retraite à la demande du salarié, le montant de cette indemnité est égal, par année d'ancienneté, à 15 % de sa rémunération telle que définie ci-dessus.

8. Aux termes de l'article 22.4, en cas de départ à la retraite à la demande de l'employeur, le montant de cette indemnité est égal, par année d'ancienneté, à 20 % de sa rémunération telle que définie ci-dessus pour les 10 premières années d'ancienneté et à 35 % pour les années suivantes.

9. Aux termes de l'article 22.5, en tout état de cause, ces indemnités ne pourront être inférieures à celles prescrites en cas de rupture du contrat de travail par la législation en vigueur et ne pourront donc pas être inférieures à l'indemnité légale de licenciement.

10. Il résulte de l'article 22.5 que l'indemnité de départ à la retraite prévue par les articles 22.3 et 22.4 ne peut être inférieure à l'indemnité légale de licenciement, que ce départ procède d'une demande du salarié ou d'une demande de l'employeur.

11. Les griefs qui soutiennent le contraire ne sont donc pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Havas voyages aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Havas voyages et la condamne à payer à Mme [H] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401166
Date de la décision : 20/11/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL

Il résulte de l'article 22.5 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme du 12 mars 1993 que l'indemnité de départ à la retraite prévue par les articles 22.3 et 22.4 ne peut être inférieure à l'indemnité légale de licenciement, que ce départ procède d'une demande du salarié ou d'une demande de l'employeur


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 26 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2024, pourvoi n°52401166


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 03/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401166
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award