LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
HM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 novembre 2024
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 679 F-B
Pourvoi n° W 23-15.153
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 NOVEMBRE 2024
M. [V] [I], domicilié [Adresse 1], [Localité 2], a formé le pourvoi n° W 23-15.153 contre le jugement rendu le 7 mars 2023 par le tribunal judiciaire de Caen (3e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Seegmuller [Localité 4], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 3], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Schmidt, conseiller doyen, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [I], de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de la société Seegmuller [Localité 4], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er octobre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen rapporteur, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Caen, 7 mars 2023) rendu en dernier ressort, invoquant des avaries subies en cours du déménagement de ses meubles confié à la société Seegmuller [Localité 4] et réalisé le 8 octobre 2020, M. [I] a assigné cette dernière en réparation de son préjudice.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. M. [I] fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ qu'il résulte de l'article L. 224-63 du code de la consommation que les protestations motivées émises par lettre recommandée dans le délai de dix jours calendaires révolus à compter de la réception des objets transportés entraînent une présomption de responsabilité du transporteur même en l'absence de réserves précises formulées à la livraison ; qu'en l'espèce, le jugement attaqué a relevé que la seule lettre de voiture signée par le client et versée aux débats portait la mention « avec réserves détaillées ci-dessous » mais n'énumérait aucune avarie constatée contradictoirement par ce dernier et le chef d'équipe, et qu'il en a déduit que le transporteur bénéficiait de la présomption de livraison conforme qui ne peut être renversée que par la preuve, produite par le client, que les avaries sont survenues durant le transport ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la lettre recommandée adressée au transporteur le 16 octobre 2020, soit huit jours après la réception des marchandises, ne comportait pas la formulation de réserves précises ayant pour effet d'entraîner une présomption de responsabilité du transporteur même en l'absence de réserves formulées dès la livraison, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 224-63 du code de la consommation ;
2°/ qu'en retenant que « les photographies produites, seraient-elles horodatées, ne portaient pas date certaine » quand leur horodatage avait précisément pour effet de leur conférer date certaine, le tribunal a méconnu l'article 12311 du code civil ;
3°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que pour écarter la responsabilité du déménageur, le jugement retient que les photographies produites par le client sont postérieures à la livraison intervenue le 8 octobre 2020 ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de l'horodatage des photographies qu'elles avaient été prises le 8 octobre 2020, le tribunal a méconnu le principe susvisé. »
Réponse de la Cour
3. En premier lieu, il résulte de l'article L. 224-63 du code de la consommation, applicable au contrat de transport de déménagement, que ce texte ne fait que proroger le délai dans lequel, sous peine d'extinction de son droit d'agir en responsabilité contre le transporteur, le destinataire qui se plaint de perte et d'avarie doit lui notifier sa protestation motivée. Il n'a ni pour objet ni pour effet de présumer de la responsabilité du transporteur du fait de ces pertes et avaries. En conséquence, à défaut de réserves précises lors de la livraison, il appartient au destinataire de rapporter la preuve que les dommages ont eu lieu au cours du déménagement.
4. Ayant constaté que la lettre de voiture signée par M. [I] portait la mention « avec réserves détaillées ci dessous » sans énumérer aucune avarie constatée en présence du chef d'équipe, le tribunal, qui n'avait pas à effectuer la recherche invoquée par la première branche, en a exactement déduit que le transporteur bénéficiait d'une présomption de livraison conforme et qu'il appartenait au client d¿établir que les avaries étaient survenues pendant le transport.
5. En second lieu, sous le couvert des griefs non fondés de dénaturation et de manque de base légale, le moyen, en ses deuxième et troisième branches, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par le juge du fond des éléments de preuve qui lui étaient soumis et dont il a déduit qu'il n'était pas établi que les dommages étaient survenus au cours du transport.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [I] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [I] et le condamne à payer à la la société Seegmuller [Localité 4] somme de 3 000 euros.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille vingt-quatre, et signé par lui, le conseiller doyen rapporteur et Mme Labat, greffier, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.