LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 novembre 2024
Rejet
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1126 F-D
Pourvoi n° F 22-21.391
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 NOVEMBRE 2024
La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Alpes-Maritimes, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 22-21.391 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-5), dans le litige l'opposant à Mme [R] [K], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [K], après débats en l'audience publique du 8 octobre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 juin 2022), Mme [K] a été engagée en qualité de fondée de pouvoir, à compter du 1er octobre 2009, par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Alpes-Maritimes.
2. Par arrêt du 14 décembre 2017, la cour d'appel a notamment dit que l'employeur était l'auteur de manquements répétés à l'exécution du contrat de travail de la salariée et responsable d'une atteinte à son état de santé et l'a condamné à lui payer une indemnité à ce titre.
3. Contestant son licenciement notifié par lettre du 9 août 2018 et se plaignant de harcèlement moral et de discrimination, elle a saisi la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le second moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la salariée diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et de dommages-intérêts pour licenciement nul, alors « que le harcèlement moral suppose des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'une décision unique de l'employeur, même maintenue dans le temps, et emportant plusieurs conséquences, ne peut pas caractériser un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu l'existence d'un harcèlement moral au prétexte de la perte par Mme [K] de son poste de fondée de pouvoir en 2011 dans des conditions selon elle injustifiées et de l'absence par la suite de réintégration à ce poste ; qu'en statuant ainsi au regard d'une unique décision de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L.1154-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
7. Contrairement à ce que soutient le moyen, le harcèlement moral n'implique pas que la répétition exigée par ce texte s'attache à des agissements de nature différente.
8. La cour d'appel a constaté que bien qu'il ait été jugé, dans l'arrêt du 14 décembre 2017, que la décision de l'agent comptable de lui retirer sa procuration n'était pas justifiée, la salariée n'avait pas été réintégrée dans ses fonctions de fondée de pouvoir à l'issue de son détachement auprès de l'établissement des invalides de la Marine et de son arrêt de travail pour maladie, alors même que le médecin du travail l'avait déclarée apte à reprendre son poste par avis du 19 mars 2018.
9. Elle a ensuite retenu que la salariée devait reprendre son poste, à temps partiel, sauf pour l'employeur à lui proposer une modification de son contrat de travail, ce qu'il n'avait pas fait et ajouté que lorsque l'agent comptable lui avait retiré sa procuration, l'empêchant ainsi selon la CPAM, d'accomplir ses fonctions, celle-ci ne lui a pas infligé de sanction ni proposé une modification de son contrat de travail pour adapter son poste aux circonstances de fait.
10. De ces constatations, dont il ressortait que la salariée avait subi des agissements répétés qui avaient eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail ayant altéré sa santé physique ou mentale et compromis son avenir professionnel, la cour d'appel en a exactement déduit l'existence d'un harcèlement moral.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes et la condamne à payer à Mme [K] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.