La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2024 | FRANCE | N°42400652

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 novembre 2024, 42400652


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


HM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 14 novembre 2024








Cassation partielle




M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 652 F-D


Pourvoi n° R 23-18.851








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 NOVEMBRE 2024


La société [B] et fils, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

HM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 novembre 2024

Cassation partielle

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 652 F-D

Pourvoi n° R 23-18.851

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 NOVEMBRE 2024

La société [B] et fils, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 4], a formé le pourvoi n° R 23-18.851 contre l'arrêt rendu le 25 mai 2023 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Axa France Iard, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 6],

2°/ à la société Cummins France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 5],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [B] et fils, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés Axa France Iard et Cummins France, après débats en l'audience publique du 24 septembre 2024 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mai 2023), en 2006, M. [B], gérant de la société [B] et fils, qui exerce une activité de transport fluvial, a commandé à la société Meuse et Sambre, exploitante d'un chantier naval, divers travaux d'aménagement d'une coque, comprenant l'installation d'un moteur de marque Cummins.

2. La livraison de ce moteur a été facturée à la société Meuse et Sambre le 31 mars 2008.

3. Le bateau a été assuré auprès des sociétés Groupama Transport, Generali et Helvetia Assurances, aux droits desquelles vient la société Helvetia Assurance (la société Helvetia).

4. Peu après la réception du bateau, intervenue en mars 2009, des dysfonctionnements du moteur ont été constatés.

5. La société [B] et fils, M. [B] et la société Helvetia ont assigné la société Cummins France (la société Cummins) et son assureur, la société Axa France Iard (la société Axa), afin d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. La société [B] et fils fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme prescrite son action en garantie des vices cachés, alors « que l'action en garantie des vices cachés doit, en application de l'article 1648, alinéa 1er, du code civil, être formée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice, sans pouvoir dépasser le délai-butoir, prévu à l'article 2232 du code civil, de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, lequel correspond, en matière de garantie des vices cachés, à celui de la vente conclue par la partie recherchée en garantie ; que le délai de prescription extinctive de l'article L. 110-4, I, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, ne peut pas être analysé en un délai-butoir spécial de nature à encadrer l'action en garantie des vices cachés ; que, conformément à l'article 26, I, de la loi du 17 juin 2008, le délai-butoir de l'article 2232 du code civil est applicable aux ventes commerciales ou mixtes conclues avant l'entrée en vigueur de cette loi si le délai de prescription décennal antérieur n'était pas expiré à cette date, compte étant alors tenu du délai déjà écoulé depuis celle du contrat conclu par la partie recherchée en garantie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que l'action en garantie des vices cachés doit certes, en application de l'article 1648 du code civil, être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, mais qu'elle est également enfermée dans le délai de prescription de cinq ans prévu par l'article L. 110-4, I, du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 ; qu'elle en a déduit que l'action en garantie des vices cachés introduite par la société [B] et fils était irrecevable comme étant prescrite au motif que l'assignation en référé aux fins d'ordonnance commune délivrée à la demande de la société [B] et fils n'était intervenue que le 7 mai 2014, soit au-delà du délai de cinq ans imparti par l'article L. 110-4 du code de commerce, qui avait commencé à courir le 19 juin 2008 et qui n'avait dès lors pas pu être interrompu par cette assignation ; qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que l'article L. 110-4, I, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, ne pouvait être analysé en un délai-butoir spécial de nature à encadrer l'action en garantie des vices cachés de la société [B] et fils, et, d'autre part que cette action devait se voir appliquer le délai-butoir de l'article 2232 du code civil si le délai de prescription décennal antérieur à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 n'était pas parvenu à expiration à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4, I, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2232 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1648, alinéa 1er, et 2232, alinéa 1er, du code civil :

7. Selon le premier de ces textes, l'action en garantie des vices cachés doit être intentée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

8. Aux termes du second, le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.

9. En application de ces textes, l'action en garantie des vices cachés doit être exercée dans les deux ans à compter de la découverte du vice sans pouvoir dépasser le délai-butoir de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, lequel est, en matière de garantie des vices cachés, le jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie. Ce délai-butoir est applicable aux ventes commerciales ou mixtes conclues avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, si le délai de prescription décennal antérieur n'était pas expiré à cette date, compte étant alors tenu du délai déjà écoulé depuis celle du contrat conclu par la partie recherchée en garantie.

10. Pour déclarer irrecevable comme prescrite l'action en garantie des vices cachés de la société [B] et fils, l'arrêt énonce qu'entre commerçants, l'action en garantie des vices cachés doit, en application de l'article 1648 du code civil, être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, qu'elle est également enfermée dans le délai de prescription prévu à l'article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente initiale. Il ajoute, après avoir relevé que la facture de livraison du moteur de marque Cummins émise à destination de la société Meuse et Sambre est datée du 31 mars 2008, qu'à cette date, le délai de prescription prévu à l'article L. 110-4 du code de commerce était de dix ans, qu'il a cependant été ramené à cinq ans par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et que, en application des dispositions transitoires figurant à l'article 26 de cette loi, et alors qu'à peine trois mois s'étaient écoulés à la date de son entrée en vigueur, soit au 19 juin 2008, le délai de cinq ans a commencé à courir pour toute sa durée. Il en déduit que l'assignation en référé du 7 mai 2014 délivrée par la société [B] et fils afin que l'ordonnance du 22 avril 2011 décidant d'une expertise lui soit déclarée commune est postérieure à l'échéance du délai de cinq ans imparti à l'article L. 110-4 du code de commerce.

11. En statuant ainsi, alors que le délai-butoir, initialement de dix ans et porté à vingt ans par la loi du 17 juin 2008, qui avait commencé à courir le 31 mars 2008, n'était pas expiré à la date à laquelle la société [B] et fils avait assigné les sociétés Cummins et Axa, le 7 mai 2014, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable comme prescrite l'action en garantie des vices cachés de la société [B] et fils et en ce qu'il rejette sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les sociétés Cummins France et Axa France Iard aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Cummins France et Axa France Iard et les condamne in solidum à payer à la société [B] et fils la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400652
Date de la décision : 14/11/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 mai 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 nov. 2024, pourvoi n°42400652


Composition du Tribunal
Président : M. Mollard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400652
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award