LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 octobre 2024
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 558 F-D
Pourvoi n° S 22-22.183
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024
1°/ la société [Localité 4] de Bresse, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ la société Nacapa, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° S 22-22.183 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2022 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Expertises Galtier, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Banque cantonale de Genève France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société civile immobilière [Localité 4] de Bresse et de la société Nacapa, de la SCP Duhamel, avocat de la société Expertises Galtier, après débats en l'audience publique du 17 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société civile immobilière [Localité 4] de Bresse (la SCI) et à la société Nacapa du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Banque cantonale de Genève France.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 9 juin 2022), par acte authentique du 15 juin 2012, la SCI, ayant pour actionnaire la société Nacapa, a acquis des sociétés civiles immobilières du Moulin et L'Hirondelle un groupe d'immeubles.
3. Préalablement à la vente, elle a confié une mission d'évaluation des immeubles à la société Expertises Galtier.
4. Le 18 avril 2016, l'établissement prêteur a prononcé la déchéance du terme, les échéances du prêt n'étant plus honorées par l'acquéreur.
5. La SCI et la société Nacapa ont assigné la société Expertises Galtier en paiement de dommages-intérêts pour manquement à ses obligations contractuelles.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, cinquième et sixième branches
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches
Enoncé du moyen
7. La SCI et la société Nacapa font grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de leurs demandes, alors :
« 2°/ que l'expert chargé par un candidat à l'acquisition de procéder à l'évaluation d'un immeuble de rapport occupé a pour obligation essentielle d'étudier la situation et la rentabilité locatives ; que s'il opte pour une méthode portant sur le revenu constaté, il ne peut se borner à prendre en considération le montant des loyers annoncés par le vendeur dans son état locatif, sans vérifier la réalité de leur encaissement ; qu'en jugeant pourtant que la société Expertises Galtier, qui avait expressément indiqué qu'elle avait fait le choix d'une évaluation selon le revenu constaté, pouvait faire l'économie d'une vérification de l'encaissement effectif des loyers, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
3°/ que l'expert chargé par un candidat à l'acquisition de procéder à l'évaluation d'un immeuble de rapport occupé a pour obligation essentielle d'étudier la situation et la rentabilité locatives ; que s'il ne dispose pas des documents utiles à cette fin, il doit en informer son client et les lui réclamer, sans pouvoir se contenter de déposer son travail en l'état ; qu'en excluant la responsabilité de la société Expertises Galtier ayant annoncé à tort une « très bonne rentabilité loyers/valeur vénale » et ayant proposé, en conséquence, une évaluation à hauteur de 2 300 000 euros, au prétexte que seul l'état locatif détaillé lui avait été remis par le donneur d'ordre, ni les états de contentieux ni les dénonciations de baux ne l'ayant été, documents qu'il appartenait pourtant à l'expert d'exiger, sans que celui-ci puisse se limiter à faire état d'une réserve sur la « vérification des encaissements de loyers », la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
4°/ que l'expert chargé par un candidat à l'acquisition de procéder à l'évaluation d'un immeuble de rapport occupé a pour obligation essentielle d'étudier la situation et la rentabilité locatives ; qu'il doit, à cet effet, vérifier ses sources ; qu'en retenant que la société Expertises Galtier n'avait pas à vérifier les documents que lui avaient remis par son client, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »
Réponse de la Cour
8. Ayant constaté que la société Expertises Galtier avait procédé à l'évaluation de l'immeuble à partir des documents communiqués par son client, dont la mission à elle confiée n'impliquait nullement la vérification, la cour d'appel a relevé que, si un état locatif détaillé lui avait été transmis, il n'en avait pas été de même de l'état des contentieux locatifs ou des dénonciations de baux, de sorte que l'étude avait conduit l'expert à se prononcer au vu d'un revenu annuel potentiel en émettant une réserve quant à la vérification de l'encaissement effectif des loyers.
9. Elle a pu en déduire qu'en l'état de cette réserve explicite qui dispensait l'expert d'exiger la production de documents qui ne lui avaient pas été remis, l'estimation des biens au vu d'un revenu potentiel, sans vérification de l'encaissement effectif des loyers, n'était pas fautive et rejeter, en conséquence, la demande principale en paiement et la demande subsidiaire d'expertise judiciaire.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société civile immobilière [Localité 4] de Bresse et la société Nacapa aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société civile immobilière [Localité 4] de Bresse et la société Nacapa et les condamne in solidum à payer à la société Expertises Galtier la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.