LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 octobre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 964 F-D
Pourvoi n° P 21-25.488
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024
La caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 21-25.488 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à M. [S] [L], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
M. [L] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Montfort, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. [L], après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Montfort, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 25 novembre 2021), à la suite d'un contrôle administratif portant sur la facturation des actes dispensés par M. [L] (le professionnel de santé), infirmier d'exercice libéral, la caisse primaire d'assurance maladie de Gironde (la caisse) lui a notifié, le 12 juillet 2017, un indu sur le fondement de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, puis le 22 décembre 2017, une pénalité financière.
2. Le professionnel de santé a saisi de recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen des moyens
Sur le second moyen du pourvoi principal présenté par la caisse, pris en ses première et deuxième branches et les moyens du pourvoi incident présenté par le professionnel de santé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal présenté par la caisse, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler l'indu d'une certaine somme notifié au professionnel de santé concernant M. [T], alors « que premièrement, la prise en charge par l'assurance maladie des actes effectués personnellement par un auxiliaire médical implique qu'ils aient fait l'objet antérieurement à l'engagement des soins d'une prescription médicale écrite, qualitative et quantitative ; que par suite, la prise en charge par l'assurance maladie ne peut intervenir que sur présentation de la prescription médicale établie antérieurement aux soins ; que le défaut de présentation de cette prescription ne peut être suppléée par la présentation d'une prescription
établie a posteriori ou d'une attestation certifiant a posteriori qu'une prescription avait été délivrée antérieurement ; qu'en écartant l'indu au titre des actes non prescrits concernant M. [T], sur la base d'une attestation du médecin traitant de ce dernier certifiant a posteriori avoir délivré une ordonnance prescrivant le traitement administré, les juges du fond ont violé les articles les articles L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale et 5 de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié, ensemble l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale et 5 C de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels, annexée à l'arrêté du 27 mars 1972, modifié :
5. Il résulte du second de ces textes, pris en application du premier, que la prise en charge par l'assurance maladie des actes effectués personnellement par un auxiliaire médical implique qu'ils aient fait l'objet antérieurement à l'engagement des soins d'une prescription médicale écrite, qualitative et quantitative.
6. Pour annuler l'indu concernant M. [T] réclamé par la caisse au titre du non-respect de l'article 5 de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels, l'arrêt retient que le professionnel de santé produit une attestation complémentaire du médecin traitant justifiant avoir délivré préalablement aux soins pratiqués du 1er mai 2015 au 1er juin 2016 une ordonnance médicale prescrivant le traitement administré.
7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les prescriptions médicales antérieures à l'exécution des soins n'avaient pas été produites, ce dont il résultait que les actes de soins litigieux ne répondaient pas aux conditions fixées par la nomenclature générale des actes professionnels, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le second moyen du pourvoi principal présenté par la caisse, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
8. La caisse fait grief à l'arrêt d'avoir annulé l'indu d'une certaine somme notifié au professionnel de santé concernant Mme [F], alors « que le paiement des soins dispensés par un infirmier exerçant à titre libéral est subordonné à la transmission par ce dernier des pièces justificatives dans les délais fixés par les articles R. 161-47 et R. 161-48 du code de la sécurité sociale ; qu'en cas de transmission hors délai, la caisse est fondée à solliciter restitution de l'indu correspondant ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 161-33, R. 161-47 et R. 161-48 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 161-33, alinéas 1 et 3, R. 161-47 et R. 161-48, I, du code de la sécurité sociale :
9. Il résulte de ces textes que lorsque le professionnel de santé n'a pas transmis, dans les délais fixés par les deux derniers, les ordonnances correspondant aux feuilles de soin électroniques, l'organisme d'assurance maladie peut exiger de celui-ci la restitution de tout ou partie des prestations servies à l'assuré.
10. Pour annuler l'indu concernant Mme [F], l'arrêt, après avoir constaté que le professionnel de santé était en possession d'une prescription répondant aux exigences de la nomenclature générale des actes professionnels au moment de la facturation, retient, que le fait qu'il n'ait pas sollicité le remboursement de cette facturation dans les délais prévus au code de la sécurité sociale est sans incidence sur la réalité de l'indu.
11. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de vérifier si les ordonnances correspondant aux soins infirmiers pour la période du 25 mai au 10 juin 2015 concernant Mme [F] avaient été adressées par le professionnel de santé dans les délais requis, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule l'indu d'un montant de 1 107,35 euros concernant M. [T] et l'indu d'un montant de 373,05 euros concernant Mme [F], l'arrêt rendu le 25 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] et le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.