LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 octobre 2024
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1032 F-D
Pourvoi n° N 23-14.892
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 OCTOBRE 2024
La société Father and sons, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 23-14.892 contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2023 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [N] [Z] [H] épouse [R], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à Pôle emploi, direction régionale Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de la société Father and sons, après débats en l'audience publique du 17 septembre 2024 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Nirdé-Dorail, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 janvier 2023), Mme [H] a été engagée en qualité de vendeuse par la société Father and sons le 14 mai 2007 et exerçait en dernier lieu les fonctions de directrice de magasin.
2. La salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 6 avril 2017 puis a repris ses fonctions le 12 septembre 2017, date à laquelle elle a été mise à pied à titre conservatoire.
3. Licenciée pour faute grave le 26 septembre 2017, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'ordonner le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage, de le condamner à payer à la salariée des sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité de préavis, des congés payés afférents et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de le débouter du surplus de ses demandes, alors « que le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour maladie et qui reprend son travail avant d'avoir fait l'objet de la visite médicale de reprise devant être organisée dans les huit jours de la reprise du travail seulement, est soumis au pouvoir disciplinaire de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la salariée, Mme [H], avait été placée en arrêt de travail pour maladie ordinaire à compter du 6 avril 2017 et qu'elle avait repris son poste de travail le 12 septembre 2017 à l'issue de cet arrêt de travail sans qu'il ne puisse être déduit d'aucun élément que l'employeur avait connaissance de cette date de reprise avant celle-ci ; qu'en se fondant néanmoins sur la circonstance que l'employeur n'a pas organisé la visite de reprise que n'empêchait pas la procédure de licenciement mise en oeuvre le jour de la reprise avec mise à pied à titre conservatoire, pour en déduire que le licenciement pour faute grave, prononcé alors que le contrat de travail était toujours suspendu, est sans cause réelle et sérieuse, quand la lettre de licenciement reprochait à la salariée des faits commis le jour de la reprise du travail et qu'elle avait été mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable le jour même, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-2, L. 1234-9, L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1235-4, L. 1331-1 et R. 4624-31 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L.1331-1 et R. 4624-31 du code du travail, le second dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 :
5. Il résulte de ces textes que le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour maladie et qui reprend son travail avant d'avoir fait l'objet de la visite médicale de reprise est soumis au pouvoir disciplinaire de l'employeur.
6. Pour juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à payer diverses sommes à ce titre, l'arrêt, qui constate que la reprise du travail par la salariée avait été effective le 12 septembre 2017, retient que l'employeur n'avait pas organisé la visite de reprise obligatoire, ce que n'empêchait nullement la procédure de licenciement mise en oeuvre le jour de la reprise avec mise à pied à titre conservatoire.
7. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de statuer sur le motif de licenciement invoqué, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme [H] de sa demande au titre d'un préjudice moral, l'arrêt rendu le 12 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne Mme [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Father and sons ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille vingt-quatre.