LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 24-80.655 F-D
N° 01206
ODVS
9 OCTOBRE 2024
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 9 OCTOBRE 2024
M. [L] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 janvier 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de viols et atteinte à l'intimité de la vie privée, a prononcé sur une demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 29 mars 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [L] [D], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 19 avril 2023, une information judiciaire a été ouverte contre M. [L] [D] des chefs de viols aggravés sur deux victimes et atteinte à l'intimité de la vie privée de l'une d'entre elles.
3. L'intéressé, mis en examen, a présenté une requête à fin d'annulation de pièces de la procédure.
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens
4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à annulation ou cancellation d'autres actes ou pièces de la procédure que celles figurant en cote D 56, a dit la procédure régulière jusqu'à la cote D 87 incluse et a fait retour de la procédure au juge d'instruction saisi en vue de la poursuite de l'information, alors « que dans ses conclusions, M. [D] soutenait, en se fondant sur des pièces précises du dossier de la procédure, que l'enquêteur avait fait preuve de partialité, et sollicitait en conséquence l'annulation de l'intégralité des procès-verbaux de sa garde à vue, ainsi que des éléments de preuves obtenus de façon déloyale, et de tous les actes subséquents qui en sont le support nécessaire et la destruction des enregistrements de la garde à vue (à savoir la cancellation des cotes D1, D2, D3, D6 à D72, D74 à D 87, ainsi que l'intégralité des cotes B, C et P) ; en jugeant n'y avoir lieu à annulation ou cancellation d'autres actes ou pièces de la procédure, sans répondre au moyen péremptoire de M. [D] sur ce point, la chambre de l'instruction a violé les articles 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
6. Selon ce texte, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
7. En laissant sans réponse l'articulation du mémoire régulièrement déposé devant elle pour le demandeur, qui invoquait un moyen de nullité de la procédure tirée du défaut d'impartialité de l'enquêteur, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision.
8. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
9. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions ayant écarté le moyen de nullité tiré du défaut d'impartialité de l'enquêteur. Les autres dispositions seront donc maintenues.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 janvier 2024, mais en ses seules dispositions ayant écarté le moyen de nullité tiré du défaut d'impartialité de l'enquêteur, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille vingt-quatre.