La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/10/2024 | FRANCE | N°52400992

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 octobre 2024, 52400992


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 9 octobre 2024








Cassation partielle
sans renvoi




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 992 F-D


Pourvoi n° C 22-20.054










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________
>
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024


La société Arcade nettoyage, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-20....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 octobre 2024

Cassation partielle
sans renvoi

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 992 F-D

Pourvoi n° C 22-20.054

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024

La société Arcade nettoyage, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-20.054 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2022 par la cour d'appel de Versailles (21e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [S] [D], épouse [E] [F], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de la société Arcade nettoyage, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2022), Mme [E] [F] a été engagée en qualité de chef d'équipe le 8 juillet 2011 par la société Aspirotechnique, aux droits de laquelle vient la société Arcade nettoyage (la société) dont elle était la filiale.

2. Convoquée le 22 février 2017 à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, la salariée a fait l'objet le 5 avril 2017 d'une mutation disciplinaire sur un autre site. La salariée ayant contesté les manquements invoqués et refusé sa nouvelle affectation, la société a maintenu la mutation disciplinaire par lettre du 20 avril 2017.

3. Convoquée le 2 mai 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 12 mai suivant, avec mise à pied conservatoire, elle a été licenciée le 6 juin 2017 pour faute grave.

4. La salariée a saisi la juridiction prud'homale en annulation de la mutation disciplinaire, pour contester son licenciement et obtenir paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'annuler la mutation disciplinaire

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de dire nulle la mutation disciplinaire notifiée le 5 avril 2017, alors « qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur de l'entreprise ; qu'en cas d'inopposabilité du règlement intérieur au salarié, à défaut pour l'employeur d'avoir accompli les formalités de publicité, il appartient au juge de rechercher si la sanction prononcée demeure justifiée au regard des dispositions du code du travail ou de la convention collective applicable à la relation de travail ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire nulle la mutation disciplinaire de la salariée que l'employeur ne justifiant pas des formalités de publicité du règlement intérieur de l'entreprise, la sanction de mutation disciplinaire édictée par ce règlement intérieur ne pouvait être prononcée à l'encontre de la salariée et devait être annulée, sans rechercher
si le prononcé de cette sanction demeurait possible en application des dispositions du code du travail ou de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail.

7. La cour d'appel, qui a constaté que l'employeur ne justifiait pas des formalités de publicité du règlement intérieur de l'entreprise, en a exactement déduit, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la mutation disciplinaire prononcée à l'encontre de la salariée devait être annulée.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

9. La société fait grief à l'arrêt de juger que le licenciement pour faute grave de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de la condamner à lui payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire et des congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors :

« 1°/ que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que la cassation, à intervenir sur le premier moyen de cassation, du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant déclaré nulle la mutation disciplinaire notifiée à la salariée le 5 avril 2017, entraînera par voie de conséquence l'annulation du chef du dispositif de l'arrêt ayant décidé qu'en raison de l'annulation de cette sanction, son licenciement pour faute grave, pour avoir refusé d'exécuter cette sanction disciplinaire, était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que commet une faute de nature à justifier son licenciement, le salarié qui refuse d'exécuter une sanction disciplinaire sans avoir préalablement soumis à l'appréciation du contrôle judiciaire le bien-fondé de cette sanction ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement pour faute grave de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse, motif pris que la mutation disciplinaire prise à son encontre étant nulle et de nul effet, le non-respect de cette sanction par la salariée était dénué de caractère fautif, bien que le refus d'exécution de cette sanction disciplinaire par la salariée, qui ne l'avait pas contestée par voie judiciaire, ait été fautif, de sorte qu'il lui appartenait de rechercher s'il était de nature à justifier son licenciement, la cour d'appel, qui a refusé de se prononcer en ce sens, a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 24 septembre 2017, L. 1235-1, L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

10. D'abord, le rejet du premier moyen en sa première branche rend sans portée la demande de cassation par voie de conséquence.

11. Ensuite, la cour d'appel a constaté que le licenciement de la salariée était motivé, d'une part, par son refus de se soumettre à la mutation disciplinaire, laquelle était nulle, de sorte que son refus de l'exécuter et son refus de quitter le site où elle était affectée n'étaient pas fautifs, d'autre part, par des faits de soustraction d'un passe d'accès dans le coffre de l'hôtel, lesquels n'étaient pas établis, et le contrôle des chambres, lequel s'inscrivait dans l'exécution de ses fonctions habituelles et n'était donc pas répréhensible.

12. En l'état de ces constatations, peu important que la salariée n'ait pas préalablement saisi le juge prud'homal pour contester sa mutation disciplinaire, elle a décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article 1235-1 du code du travail, que les griefs ne pouvaient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la société à payer une somme à titre de dommages-intérêts en conséquence de la mutation disciplinaire nulle

Enoncé du moyen

14. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts en conséquence de la nullité de la mutation disciplinaire, alors « que le juge ne peut méconnaître les limites du litige, telles qu'elles résultent des conclusions respectives des parties ; que dans ses conclusions d'appel, la salariée ne formulait aucune demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de sa mutation disciplinaire, qu'elle jugeait irrégulière ; qu'en condamnant néanmoins la société, après avoir annulé cette sanction, à payer à la salariée la somme de 750 euros en réparation de son préjudice, la cour d'appel a méconnu les limites du litiges, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

15. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

16. Pour condamner la société au paiement d'une somme au titre de la sanction nulle, l'arrêt retient que le préjudice subi par la salariée résultant de cette sanction irrégulière sera réparé par l'octroi de la somme de 750 euros à titre de dommages-intérêts.

17. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la salariée se bornait à demander la nullité de la mutation disciplinaire sans solliciter l'indemnisation du préjudice en résultant, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

18. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

19. La cassation prononcée sur le premier moyen, pris en sa première branche n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Arcade nettoyage venant aux droits de la société Aspirotechnique à payer à Mme [E] [F] la somme de 750 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la sanction nulle, l'arrêt rendu le 9 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne Mme [E] [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Arcade nettoyage ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400992
Date de la décision : 09/10/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 juin 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 oct. 2024, pourvoi n°52400992


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400992
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award