La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/10/2024 | FRANCE | N°52400975

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 octobre 2024, 52400975


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 2 octobre 2024








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 975 F-D


Pourvoi n° M 23-17.421


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de ca

ssation
en date du 20 avril 2023.






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, C...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 octobre 2024

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 975 F-D

Pourvoi n° M 23-17.421

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 avril 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 OCTOBRE 2024

M. [O] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 23-17.421 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2021 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant à la société Aldi marché [Adresse 2], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

La société Aldi marché [Adresse 2] a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal, invoque à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel, invoque à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Quellec, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [S], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Aldi marché [Adresse 2], après débats en l'audience publique du 4 septembre 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Quellec, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 octobre 2021), M. [S] a été engagé en qualité de responsable de magasin, le 7 janvier 2003, par la société Aldi marché [Adresse 2]. Dans le dernier état de la relation contractuelle, soumise à la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, il occupait les fonctions de responsable logistique.

2. Licencié le 23 juin 2017, le salarié a saisi, le 6 septembre 2017, la juridiction prud'homale de demandes en paiement au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident éventuel de l'employeur, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail n'était pas soumise à une convention de forfait en jours pour la période antérieure au 14 décembre 2016

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires, du travail dissimulé, du repos compensateur et du non-respect des temps de repos, alors « que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que satisfait à cette exigence le salarié qui produit au soutien de sa demande le décompte hebdomadaire de ses heures de travail ; qu'en retenant que le salarié ne produisait pas de décompte suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, quand il résultait de ses constatations qu'était versé aux débats un décompte mentionnant semaine par semaine un nombre global d'heures de travail réalisées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

5. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition des membres compétents de l'inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

6. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

7. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

8. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, l'arrêt relève que, pour étayer ses dires, ce dernier produit un décompte mentionnant, semaine par semaine, un nombre global d'heures de travail réalisées, qui ne précise pas, au jour le jour, l'amplitude horaire ni les pauses méridiennes, ainsi que l'attestation d'une ancienne collaboratrice, qui indique que l'intéressé effectuait de très grosses journées de travail, qu'il était souvent là avant elle et partait après elle, alors qu'elle effectuait elle-même des journées de plus de dix heures. Il retient que cette attestation est particulièrement vague et imprécise. Il ajoute que le décompte produit par le salarié ne précise pas les heures effectuées au jour le jour, qu'il n'est en conséquence pas suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement et qu'il n'est pas corroboré par une description des tâches expliquant la nécessité de réaliser de tels horaires, ni par aucune autre pièce.

9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen du pourvoi incident éventuel, pris en sa deuxième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail n'était pas soumise à une convention de forfait en jours pour la période postérieure au 14 décembre 2016

Enoncé du moyen

10. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail n'était pas soumise à une convention de forfait en jours, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant que ''l'avenant du 14 décembre 2016 n'est pas conforme, car il prévoit un nombre de jours travaillés supérieur à celui autorisé'', sans avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

11. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

12. Pour dire que le salarié n'était pas soumis à une convention de forfait en jours pour la période postérieure au 14 décembre 2016, l'arrêt retient que l'avenant du 14 décembre 2016 n'est pas conforme car il prévoit un nombre de jours travaillés supérieur à celui autorisé.

13. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré du dépassement du nombre maximal de jours travaillés autorisé, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la relation de travail n'était pas soumise à une convention de forfait en jours pour la période postérieure au 14 décembre 2016, déboute M. [S] de ses demandes en paiement au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires, du travail dissimulé, du repos compensateur et du non-respect des temps de repos, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400975
Date de la décision : 02/10/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 oct. 2024, pourvoi n°52400975


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400975
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award