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26/09/2024 | FRANCE | N°22400848

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 26 septembre 2024, 22400848


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


LM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 26 septembre 2024








Cassation partielle




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 848 F-B


Pourvoi n° Y 22-15.818






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 SEPTEMBRE 2024


La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre-Val de Loire, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 22-...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 septembre 2024

Cassation partielle

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 848 F-B

Pourvoi n° Y 22-15.818

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 SEPTEMBRE 2024

La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre-Val de Loire, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 22-15.818 contre l'arrêt rendu le 1er mars 2022 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à Mme [J] [B], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre-Val de Loire, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel , avocat de Mme [B], et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 juillet 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 1er mars 2022), à la suite de la réception de son relevé de carrière, Mme [B] (l'assurée) a, en 2018, sollicité le bénéfice de la majoration de la durée d'assurance vieillesse au titre de l'éducation d'un enfant handicapé, auprès de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre-Val de Loire (la caisse), qui le lui a refusé.

2. L'assurée a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir le recours, alors « que la majoration de la durée d'assurance pour avoir élevé un enfant handicapé implique l'ouverture du droit, au cours de la période considérée, au complément de l'allocation d'éducation spéciale ; que l'appréciation de l'ouverture de ce droit ne relève pas de la compétence de la CARSAT et du juge chargé de contrôler ses décisions, mais d'une commission d'éducation spéciale à laquelle la CARSAT ne peut se substituer lorsque cette commission n'a pas été saisie ; qu'en jugeant pourtant qu'il appartenait à la CARSAT, puis au juge saisi d'un recours contre la décision de refus de majoration de la durée d'assurance, d'apprécier rétrospectivement si les conditions spécifiques du versement du complément étaient remplies pendant la période d'attribution de l'allocation d'éducation spéciale, de sorte que le droit à ce complément était ouvert, la cour d'appel a violé l'article L. 351-4-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, ensemble les articles L. 541-1 et suivants et R. 541-1 et suivants même code, L. 241-6 et L. 241-9 du code de l'action sociale et des familles, et L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, dans leur version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article L. 351-4-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007, applicable au litige, les assurés sociaux élevant un enfant ouvrant droit, en vertu des premier et deuxième alinéas de l'article L. 541-1, à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et à son complément ou, en lieu et place de ce dernier, de la prestation de compensation (PCH) prévue par l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles bénéficient, sans préjudice, le cas échéant, de l'article L. 351-4, d'une majoration de leur durée d'assurance d'un trimestre par période d'éducation de trente mois dans la limite de huit trimestres.

6. Ce texte ne subordonnant le bénéfice de la majoration de la durée d'assurance au titre de l'enfant handicapé ni à l'obtention d'une décision d'ouverture du droit aux prestations concernées, ni au versement effectif de ces prestations, il appartient au juge de la sécurité sociale, saisi d'un litige relatif à l'attribution de cette majoration, de rechercher si l'enfant handicapé était, sur la période litigieuse, éligible à ces prestations.

7. C'est sans encourir les griefs du moyen que l'arrêt a décidé que les dispositions de l'article L. 351-4-1 du code de la sécurité sociale n'exigent pas le versement effectif des prestations mais imposent de vérifier, si nonobstant l'absence de demande du parent à bénéficier de la PCH ou du complément à l'AEEH, l'enfant handicapé y ouvrait droit.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

9. La caisse fait le même grief à l'arrêt, alors « que l'ouverture du droit au complément d'allocation d'éducation spéciale implique que l'enfant handicapé soit atteint d'un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours effectif à l'aide d'une tierce personne ou conduise l'un des parents à réduire son activité professionnelle ; qu'en s'abstenant de caractériser que ces conditions étaient remplies sur la période d'éducation de l'enfant (ie de la naissance au 1er octobre 2004), et en se fondant uniquement sur des données postérieures, au surplus au prix d'erreurs de dates, qui ne caractérisaient pas qu'avant le 1er octobre 2004, Mme [B] avait exposé des dépenses particulièrement coûteuses, avait effectivement eu recours à une tierce personne, ou avait réduit son activité professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 351-4-1, L. 541-1 et R. 541-2 du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 541-1 du code de la sécurité sociale, et les articles L. 245-1 et L. 245-3, 1°, du code de l'action sociale et des familles :

10. Selon le premier de ces textes en son premier alinéa, toute personne qui assume la charge d'un enfant handicapé a droit à une allocation d'éducation de l'enfant handicapé, si l'incapacité permanente de l'enfant est au moins égale à un taux que l'article R. 541-1, alinéa 1, du même fixe à 80 %.

11. Selon le deuxième alinéa de ce même texte, un complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé est accordé, selon les modalités fixées par l'article R. 541-2 du même code, pour l'enfant atteint d'un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l'aide d'une tierce personne.

12. Il résulte des deux derniers de ces textes que les personnes handicapées remplissant certaines conditions tenant à leur âge et à leur handicap ont droit à une prestation de compensation qui peut être affectée, dans des conditions définies par décret, à des charges liées à un besoin d'aides humaines, y compris, le cas échéant, celles apportées par les aidants familiaux.

13. Ayant constaté que l'assurée a bénéficié de l'AEEH de 1985 à 2004 pour son fils atteint d'une incapacité permanente dont le taux avait été fixé à 80 %, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, relève, d'une part, que l'assurée a bénéficié, en 2008, de la PCH au titre de l'aide aux transports en considération du coût des nombreux déplacements en taxi, qui étaient jusqu'à cette date assumés par celle-ci, et d'autre part, que l'assurée a obtenu la PCH au titre de l'aide humaine à raison de 55 heures par mois à compter du 1er janvier 2018. Il précise qu'à cette date, le taux d'incapacité du fils de l'assurée était de 80 %, comme avant 2004, et en déduit que l'aide humaine apportée par l'assurée à son fils jusqu'à ses 20 ans ne pouvait pas être moindre que celle retenue en 2018 par la commission départementale de l'autonomie des personnes handicapées pour l'octroi de la PCH. L'arrêt retient que les éléments versés aux débats établissent que l'assurée a élevé un enfant ouvrant droit à l'AEEH et à la PCH, de sorte qu'elle peut bénéficier de la majoration de la durée d'assurance.

14. En se déterminant ainsi, par des motifs, tirés exclusivement de la situation de l'enfant handicapé après 2004, insuffisants à caractériser que la nature ou la gravité du handicap dont il est atteint nécessitait sur la période litigieuse, soit entre 1985 et 2004, un recours à une aide humaine plus importante que celle d'enfant de même âge non atteint de déficience, et alors même que l'enfant ne pouvait ouvrir droit à la PCH durant sa minorité en l'état des textes applicables à cette prestation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement qui a déclaré le recours de Mme [B] recevable, l'arrêt rendu le 1er mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22400848
Date de la décision : 26/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

SECURITE SOCIALE, PRESTATIONS FAMILIALES


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 01 mars 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 26 sep. 2024, pourvoi n°22400848


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Fabiani - Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:22400848
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