LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 septembre 2024
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 450 F-D
Pourvoi n° H 22-19.345
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 SEPTEMBRE 2024
M. [V] [U], domicilié [Adresse 4], [Localité 3], a formé le pourvoi n° H 22-19.345 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à Mme [J] [L], domiciliée [Adresse 2], [Localité 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [U], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [L], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 juin 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 mai 2022), un jugement du 16 octobre 2009 a prononcé le divorce de Mme [L] et de M. [U], statué sur l'exercice de l'autorité parentale et fixé à 250 euros par mois la contribution de M. [U] à l'entretien et à l'éducation pour chacun de leurs quatre enfants.
2. M. [U] et Mme [L] ont chacun saisi le juge aux affaires familiales pour voir modifier les mesures ordonnées. Les deux instances ont été jointes.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. [U] fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande au titre de la répétition de l'indu de la part contributive versée pour l'entretien et l'éducation d'[F] irrecevable, alors :
« 1°/ qu'est compétente pour statuer, en appel, sur la demande en répétition des échéances versées indûment par le débiteur de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant la cour d'appel qui confirme le jugement en ce qu'il a prononcé la suppression de ladite contribution ; qu'en énonçant, pour déclarer irrecevable la demande de M. [U] tendant au remboursement de la part de contribution d'[F] versée entre le 1er janvier 2020 et le 1er août 2020, soit 1 931,93 euros, après avoir pourtant confirmé le jugement en ce qu'il avait supprimé ladite contribution mise à la charge du père du 1er janvier au 31 juillet 2020, que la juridiction familiale, en appel comme en première instance, était incompétente pour statuer sur la répétition de l'indu, ne pouvant que se borner à fixer, supprimer ou réviser la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé l'article 561 du code de procédure civile, ensemble les articles 1302 et 1302-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 561 alinéa 1er du code de procédure civile et les articles 1302, alinéa 1er et 1302-1du code civil :
5. Selon le premier de ces textes, « L'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel. » Aux termes du deuxième, « Tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. » En application du troisième : « Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. »
6. Pour déclarer irrecevable la demande de M. [U] au titre de la répétition de l'indu de la part contributive versée pour l'entretien et l'éducation de sa fille [F], tout en supprimant la contribution mise à sa charge à ce titre du 1er janvier au 31 juillet 2020, l'arrêt énonce, tant par motifs propres qu'adoptés, que cette demande n'est pas de la compétence de la cour d'appel statuant en appel d'une décision du juge aux affaires familiales, la juridiction familiale ne pouvant, en application de l'article L. 213-3 du code de l'organisation judiciaire, que se borner à fixer, supprimer ou réviser la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants.
7. En statuant ainsi, alors que la demande tendait au remboursement de sommes que M. [U] avait versées au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille [F] en exécution d'un précédent jugement, et que cette obligation, selon la décision du premier juge confirmée sur ce point en appel, avait été supprimée entre le 1er janvier 2020 et le 1er juillet 2020, d'où il résultait que lesdites sommes étaient indues et sujettes de plein droit à répétition, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, tel que suggéré par la défense, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que l'obligation pour Mme [L] de rembourser à M. [U] la somme de 1 913,93 euros au titre de la part contributive versée par celui-ci pour l'entretien de l'enfant [F] entre le 1er janvier et le 1er juillet 2020 résulte de plein droit de la suppression de cette contribution par une disposition confirmative non critiquée de l'arrêt.
10. La cassation du chef du dispositif déclarant irrecevable la demande de M. [U] au titre de la répétition de l'indu de la part contributive à l'entretien et à l'éducation de l'enfant [F], n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt disant ne pas y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et statuant sur les dépens, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
Rectification d'erreur matérielle
Vu l'article 462 du code de procédure civile :
11. Une erreur matérielle a été commise dans la rédaction de l'arrêt attaqué, page 11, deux dernières lignes, en ce que celui-ci indique que le montant de la part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants mise à la charge de M. [U] a été évalué à hauteur de 570 euros, au lieu de 425 euros par mois et par enfant.
12. Il y a lieu, en application de l'article 462 du code de procédure civile, de réparer cette erreur.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande de M. [U] au titre de la répétition de l'indu de la part contributive à l'entretien et à l'éducation de l'enfant [F], l'arrêt rendu le 12 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
RECTIFIE l'arrêt rendu le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Rouen (n° RG : 20/04088), en ce sens que le chiffre : « 570 euros » est remplacé, page 11, deux dernières lignes, par : « 425 euros par mois et par enfant » ;
DIT que les dépens seront supportés par moitié par chacune des parties ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille vingt-quatre.