LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 juillet 2024
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 413 F-D
Pourvoi n° R 23-11.675
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JUILLET 2024
M. [S] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-11.675 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2022 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à la société MJSA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
en la personne de M. [L] [G], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société d'exploitation des établissements Verge Claude,
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. [D], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 4 juin 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à M. [D] de sa reprise d'instance à l'encontre de la société MJSA, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société d'exploitation des établissements Verge Claude.
Désistement partiel
2. Il est donné acte à M. [D] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société MAAF assurances (la MAAF).
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 juin 2022), Mme [F] a vendu en 2009 à M. [D] et Mme [R] une maison d'habitation dont la construction a été confiée à la société Les Nouvelles constructions du sud, assurée auprès de la MAAF, avant sa dissolution amiable en décembre 2008.
4. La Société d'exploitation des établissements Verge Claude (la société Verge Claude), assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) a fourni et posé la charpente de la maison.
5. Se plaignant d'une non-conformité de l'habitation à la réglementation parasismique, M. [D], devenu l'unique propriétaire du bien immobilier, a, après expertise, assigné en indemnisation les sociétés MAAF, Axa et Verge Claude, désormais en liquidation judiciaire.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
6. M. [D] fait grief à l'arrêt de condamner solidairement les sociétés Verge Claude et Axa à lui payer les seules sommes de 6 773,41 euros au titre du non-respect aux règles parasismiques et de 895,36 au titre du préjudice accessoire, alors « que chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée ; qu'en condamnant néanmoins solidairement les sociétés Verge Claude et Axa à payer à M. [D] les seules sommes de 6 773,41 euros au titre de la reprise du désordre relatif au non-respect des règles parasismiques, évaluée à la somme de 135 468,38 euros, et 895,36 euros au titre des préjudices accessoires, évalués à la somme de 17 907, 26 euros, motifs pris que la part de responsabilité de la société Verge Claude dans la réalisation de l'entier dommage était de 5 %, bien que la société Verge Claude et son assureur aient dû être condamnés à réparer ces dommages dans leur totalité, sans qu'il y ait eu lieu de tenir compte du partage de responsabilité entre les différents responsables des dommages, la cour d'appel a violé les articles 1792 et 1203, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1203, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
7. Il résulte de ce texte que chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux, et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée.
8. Pour limiter l'obligation à réparation de la société Verge Claude et de son assureur, l'arrêt retient que l'intervention de la société Les Nouvelles constructions du sud n'étant pas démontrée sur le chantier, la garantie de son assureur n'était pas mobilisable, de sorte que les demandes formées à son encontre et les appels en garantie devaient être rejetés.
9. Puis, il relève que l'expert a retenu à la charge de la société Verge Claude une responsabilité à hauteur de 5 % s'agissant du non-respect des règles parasismiques, celle-ci ayant accepté de poser la charpente sur un support non conforme et que cette responsabilité n'avait pas été contestée.
10. Il en déduit qu'en application du partage de responsabilité ainsi retenu entre les sociétés Les Nouvelles constructions du sud et Verge Claude au titre du non-respect des règles parasismiques, cette dernière ne pouvait être tenue, avec son assureur, à indemniser M. [D] qu'à hauteur de 5 % du montant total de la reprise de ce désordre et des préjudices accessoires.
11. En statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que l'intervention de la société Verge Claude avait contribué à la réalisation d'un même dommage tenant au non-respect des règles parasismiques, ce dont il résultait que celle-ci devait être condamnée, avec son assureur, à le réparer dans sa totalité, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :
- condamne solidairement la Société d'exploitation des établissements Verge Claude et la société Axa France IARD à payer à M. [D], compte tenu du partage de responsabilité retenu, la somme de 6 773,41 euros TTC au titre du non-respect des règles parasismiques, avec application de l'indice BT01, l'indice de base étant celui de mars 2012 ;
- condamne solidairement la Société d'exploitation des établissements Verge Claude et la société Axa France IARD, compte tenu du partage de responsabilité retenu, à payer à M. [D] la somme de 895,36 euros TTC, au titre des préjudices accessoires, avec intérêt au taux légal à compter du 2 mai 2013, date de l'assignation ;
- rejette les demandes présentées par M. [D], la Société d'exploitation des établissements Verge Claude et la société Axa France IARD au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamne solidairement, dans la proportion de 5 %, la Société d'exploitation des établissements Verge Claude et la société Axa France IARD aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant les frais d'expertise judiciaire.
l'arrêt rendu le 9 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Axa France IARD et la société MJSA, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société d'exploitation des établissements Verge Claude, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Axa France IARD et la condamne, in solidum avec la société MJSA, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société d'exploitation des établissements Verge Claude, à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille vingt-quatre.