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26/06/2024 | FRANCE | N°12400379

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 juin 2024, 12400379


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


MY1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 26 juin 2024








Rejet




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 379 F-B


Pourvoi n° T 23-14.230


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [E].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 février 2023.






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 202...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 juin 2024

Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 379 F-B

Pourvoi n° T 23-14.230

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [E].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 février 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2024

Mme [X] [E], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 23-14.230 contre l'ordonnance rendue le 20 janvier 2023 par le premier président de la cour d'appel de Rennes, dans le litige l'opposant au centre hospitalier [3], dont le siège est [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de Mme [E], et après débats en l'audience publique du 14 mai 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Rennes, 20 janvier 2023), le 20 décembre 2022, Mme [E] a été admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète sur décision du représentant de l'Etat dans le département. Par ordonnance du 30 décembre 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé la poursuite de la mesure. Par arrêté du 8 janvier 2023, la patiente a fait l'objet d'un transfert dans une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) du centre hospitalier [3] de [Localité 4]. Le 11 janvier 2023 à 17h58, elle a été placée à l'isolement. Par ordonnance rendue le 14 janvier 2023 à 19h07, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien de la mesure d'isolement.

2. Le 18 janvier 2022 à 15h39, le directeur d'établissement a saisi le juge d'une nouvelle demande d'autorisation de poursuite de la mesure.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [E] fait grief à l'ordonnance d'autoriser le maintien de la mesure d'isolement, alors « que, lorsque le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention, en application du II de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, sont jointes à la requête les pièces mentionnées à l'article R. 3211-12 du même code ainsi que les précédentes décisions d'isolement ou de contention prises à l'égard du patient et tout autre élément de nature à éclairer le juge ; que l'article R. 3211-12, 5° du code de la santé publique prévoit que sont communiqués au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue l'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition ; qu'en décidant que cette prescription n'avait pas à être observée dès lors que l'article R. 3211-33-1 du code de la santé publique institue "un régime spécial pour l'audition du patient à l'état d'isolement", quand le renvoi aux pièces mentionnées à l'article R. 3211-12 dudit code était général et qu'elle constatait que, le 18 janvier 2023, le docteur [K] avait certifié que l'état de Mme [X] [E] ne permettait son audition par le juge des libertés et de la détention "ni par représentation physique, ni par moyen de télécommunication", mais que ce médecin avait « effectivement participé, parmi d'autres, à la mise en oeuvre de la mesure d'isolement », la cour d'appel a violé lesdits textes, ensemble l'article 6.1 de la convention EDH. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article R. 3211-33-1, III, 3°, du code de la santé publique, si le patient placé à l'isolement ou sous contention demande à être entendu par le juge des libertés et de la détention, saisi par le directeur de l'établissement, celui-ci communique au greffe un avis d'un médecin relatif à l'existence éventuelle de motifs médicaux faisant obstacle, dans son intérêt, à son audition et à la compatibilité de l'utilisation de moyens de télécommunication avec son état mental.

6. C'est à bon droit que le premier président, par motifs propres et adoptés, a retenu que ces dispositions spécifiques en matière d'isolement et de contention dérogeaient aux règles générales applicables à la procédure en matière de soins psychiatriques sans consentement prévues à l'article R. 3211-12, 5°, b) du code de la santé publique et n'imposaient pas que l'avis médical soit rédigé par un psychiatre ne participant pas à la prise en charge.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

8. Mme [E] fait le même grief à l'ordonnance, alors « qu'à titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà de la durée totale prévue au I de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique la mesure d'isolement et le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention du renouvellement de cette mesure ; qu'il résulte des constatations de l'ordonnance que Mme [X] [E] a été placée à l'isolement depuis le 11 janvier 2023 à 17h58, de sorte que la première période d'isolement venait à expiration le 14 janvier 2023 à 17h58 et que le juge des libertés et de la détention devait être informé sans délai du renouvellement au-delà de la durée totale de quarante-huit heures, soit le 16 janvier 2023 à 17h58 ; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, en retenant que "le renouvellement a été opéré le 17 janvier 2023 à 17h48, de sorte qu'il [le premier juge] a pu juger convenable le délai de prévenance de deux heures observé par le directeur du centre hospitalier", le président de la cour d'appel de Rennes a, dans son ordonnance attaquée, violé l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

9. Il résulte de l'article L. 3222-5-1, alinéa 5, du code de la santé publique, qu'après une première autorisation judiciaire de maintien d'une mesure d'isolement et si celle-ci est renouvelée par le médecin, le juge des libertés et de la détention doit être informé sans délai de ce renouvellement au-delà de quarante-huit heures après l'expiration du délai de vingt-quatre heures dont il disposait pour statuer sur la première requête.

10. C'est donc à bon droit qu'après avoir relevé que la mesure d'isolement avait débuté le 11 janvier 2023 à 17h58, le premier président s'est placé à la date du 17 janvier 2023 à 17h58 pour apprécier si le juge des libertés et de la détention avait été informé, sans délai, du renouvellement de la mesure à l'issue de la première autorisation de maintien.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

12. Mme [E] fait le même grief à l'ordonnance, alors « que la mesure d'isolement dont le maintien a été autorisé judiciairement court à compter du terme de la précédente période d'isolement et non à compter de l'autorisation délivrée par le juge des libertés et de la détention ; qu'il résulte des constatations de l'ordonnance que Mme [X] [E] a été placée à l'isolement depuis le 11 janvier 2023 à 17h58, de sorte que la première période d'isolement venait à expiration le 14 janvier 2023 à 17h58 et que le juge des libertés et de la détention devait être saisi avant l'expiration d'une nouveau délai courant à compter de cette date, pour venir ainsi à expiration le 17 janvier 2023 à 17h58 ; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, en retenant que "le directeur du centre hospitalier a saisi le juge des libertés et de la détention pour le renouvellement de la mesure le 18 janvier 2023 à 15h39, soit dans les délais requis", le président de la cour d'appel de Rennes a, dans son ordonnance attaquée, violé l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

13. Il résulte de l'article L. 3222-5-1, alinéa 5, du code de la santé publique, qu'après une première autorisation judiciaire de maintien d'une mesure d'isolement et si celle-ci est renouvelée par le médecin, le directeur de l'établissement doit saisir le juge des libertés et de la détention avant la soixante-douzième heure d'isolement après l'expiration du délai de vingt-quatre heures dont le juge disposait pour statuer sur la première requête.

14. C'est donc à bon droit qu'après avoir relevé que la mesure d'isolement avait débuté le 11 janvier 2023 à 17h58, le premier président a retenu que la nouvelle saisine du juge des libertés et de la détention, à l'issue de la première autorisation de maintien, devait avoir lieu avant le 18 janvier 2023 à 17h58.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400379
Date de la décision : 26/06/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

SANTE PUBLIQUE

En matière d'isolement et de contention, les dispositions spécifiques de l'article R. 3211-33-1, III, 3°, du code de la santé publique, dérogeant aux règles générales applicables à la procédure en matière de soins psychiatriques sans consentement prévues à l'article R. 3211-12, 5°, b), du même code, l'avis médical, qui indique les motifs médicaux faisant obstacle à l'audition du patient par le juge, peut être rédigé par un psychiatre participant à la prise en charge. Il résulte de l'article L. 3222-5-1, alinéa 5, du code de la santé publique, qu'après une première ordonnance de maintien d'une mesure d'isolement ou de contention, le délai de 48 heures dont dispose le médecin pour informer le juge des libertés et de la détention du renouvellement de la mesure court à compter de l'expiration du délai de 24 heures dont le juge disposait pour statuer sur la requête en première prolongation. Il résulte de ce même article qu'après une première ordonnance de maintien d'une mesure d'isolement ou de contention, le délai de 72 heures dont dispose le juge des libertés et de la détention pour statuer sur la nouvelle requête court à compter de l'expiration du délai de 24 heures dont celui-ci disposait pour statuer sur la requête en première prolongation


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 20 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 jui. 2024, pourvoi n°12400379


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400379
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