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19/06/2024 | FRANCE | N°42400371

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 juin 2024, 42400371


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


HM




Cet arrêt est rectifié par l'arrêt n° 539 rendu le 10 juillet 2024




COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 19 juin 2024








Cassation




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 371 F-D


Pourvoi n° N 22-16.843








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024


M. [N] [J], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-16.843 cont...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

HM

Cet arrêt est rectifié par l'arrêt n° 539 rendu le 10 juillet 2024

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 juin 2024

Cassation

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 371 F-D

Pourvoi n° N 22-16.843

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024

M. [N] [J], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-16.843 contre l'arrêt rendu le 11 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris, dont le siège est pôle fiscal parisien 1, pôle juridictionnel judiciaire, [Adresse 1], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vigneras, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel, avocat de M. [J], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Vigneras, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 avril 2022), à la suite d'une plainte de l'administration fiscale, à laquelle un procureur de la République avait transmis, en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, des informations laissant supposer que M. [J] était titulaire de comptes bancaires ouverts, à son nom, dans les livres d'une banque établie en Suisse, ce dernier a été renvoyé devant un tribunal correctionnel des chefs de fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale.

2. Par une proposition de rectification du 9 août 2016, l'administration fiscale a procédé à la taxation d'office des avoirs détenus sur ces comptes aux droits de mutation à titre gratuit, en application des articles L. 71 du livre des procédures fiscales et 755 du code général des impôts.

3. Le 7 mars 2017, les droits ont été mis en recouvrement.

4. Après rejet de sa réclamation contentieuse, M. [J] a assigné l'administration fiscale aux fins d'annulation de la décision de rejet et de décharge des sommes réclamées.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et sixième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. M. [J] fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement ayant accueilli sa demande en décharge portant sur les droits d'enregistrement mis à sa charge et de confirmer la décision du 18 avril 2016 par laquelle l'administration fiscale a rejeté sa demande en décharge portant sur ces mêmes impositions, alors « que les motifs qui sont le support nécessaire d'une décision de relaxe prononcée par le juge pénal ont l'autorité de la chose jugée à l'égard du juge de l'impôt, même lorsque les constatations du juge pénal ont été opérées dans le cadre d'un litige relatif à une imposition et à une période d'imposition autres que celles dont le juge de l'impôt a lui-même à connaître ; que le juge de l'impôt est donc tenu d'examiner les motifs d'une décision pénale qui constituent le support nécessaire de la relaxe prononcée en faveur du contribuable et rechercher, même d'office, si le juge pénal a procédé à des constatations de fait, revêtues de l'autorité de la chose jugée, qui sont de nature à lier sa propre appréciation ; que faute d'avoir procédé à cette recherche, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1355 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil :

7. L'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s'attache à ce qui a été définitivement, nécessairement et certainement décidé par le juge pénal sur l'existence du fait qui forme la base commune de l'action civile et de l'action pénale, sur sa qualification ainsi que sur la culpabilité de celui à qui le fait est imputé.

8. Pour rejeter les demandes de M. [J], l'arrêt retient que les rappels d'impôts supplémentaires couvrent les droits d'enregistrement, au titre de l'année 2016, sur le fondement de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales et que le jugement correctionnel du 16 février 2018 porte sur les minorations des déclarations d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 à 2012, les minorations d'impôts de solidarité sur la fortune au titre des années 2010 à 2012 et la minoration de la contribution exceptionnelle sur la fortune due au titre de l'année 2012, de sorte que l'autorité de la chose jugée ne peut être accueillie.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la décision de relaxe dont avait bénéficié M. [J] n'était pas fondée sur des constatations de fait du juge pénal qui s'imposaient à elle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

10. M. [J] fait le même grief à l'arrêt, alors « que pour la période antérieure au 1er janvier 2019, les particuliers sont tenus de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger (CGI, art. 1649 A) ; qu'un compte bancaire ne peut cependant être regardé comme ayant été utilisé par un contribuable pour une année donnée que si ce dernier a, au cours de cette année, effectué au moins une opération de crédit ou de débit sur le compte ; que ne constituent pas de telles opérations, notamment, des opérations de crédit qui se bornent à inscrire sur le compte les intérêts produits par les sommes déjà déposées au titre des années précédentes ou encore des opérations de débit correspondant au paiement des frais de gestion pour la tenue du compte ; que les comptes dormants n'entrent donc pas dans le champ de l'obligation déclarative instituée par l'article 1649 A ; qu'en l'espèce, il n'a jamais démontré ni même soutenu que les comptes dont M. [J] aurait été titulaire en Suisse auraient eu un caractère actif au cours de la période en litige ; qu'en retenant cependant que ces comptes entraient dans le champ de l'obligation déclarative instituée par l'article 1649 A, sans rechercher s'ils avaient été actifs au cours de la période en litige, la cour a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1649 A. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

11. Le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit.

12. Cependant M. [J], qui contestait devant la cour d'appel être co-titulaire des comptes bancaires litigieux, contestait nécessairement les avoir utilisés.

13. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 1649 A du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989 de finances pour 1990 et 344 A de l'annexe III du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 91-150 du 7 février 1991 :

14. Selon le premier de ces textes, les personnes physiques domiciliées ou établies en France sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes bancaires ouverts, utilisés ou clos à l'étranger.

15. Selon le second, un compte bancaire est réputé avoir été utilisé par l'une des personnes astreintes à l'obligation de déclaration précitée, dès lors que celle-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration.

16. Pour rejeter les demandes de M. [J], l'arrêt retient qu'il ressort du rapport de synthèse des services de police du 24 juillet 2015 que celui-ci était devenu co-titulaire, en avril 2005, des quatre comptes bancaires détenus auprès de la banque établie en Suisse et qu'en réponse à la demande d'informations et de justifications de l'administration ainsi qu'à la mise en demeure du 6 juin 2016, M. [J] n'a apporté aucune justification sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur les comptes.

17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui incombait, si les comptes bancaires litigieux avaient été utilisés par M. [J] au cours de la période en litige, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques et le condamne à payer à M. [J] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près de la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, économique et financière, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin, et signé par lui et M. Ponsot conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile,


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400371
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 avril 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 jui. 2024, pourvoi n°42400371


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Gury & Maitre, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400371
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