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19/06/2024 | FRANCE | N°42400362

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 juin 2024, 42400362


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


CC






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 19 juin 2024








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 362 F-D


Pourvoi n° Z 23-13.546








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________





ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024


La société Banque populaire Grand Ouest, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 23-...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CC

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 juin 2024

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 362 F-D

Pourvoi n° Z 23-13.546

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024

La société Banque populaire Grand Ouest, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 23-13.546 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2022 par la cour d'appel de Rennes (3e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à M. [N] [P], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Banque populaire Grand Ouest, de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [P], après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 décembre 2022), par un acte du 11 octobre 2016, la société Banque populaire Atlantique, devenue Banque populaire Grand Ouest (la banque), a consenti à la société Les Crépidules (la société) un prêt, garanti par le cautionnement solidaire de M. [P] à concurrence de la somme de 7 750 euros.

2. Par un acte du 15 décembre 2017, M. [P] s'est rendu caution solidaire du remboursement de toutes sommes qui seraient dues par la société à la banque dans la limite de 2 500 euros.

3. La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la disproportion manifeste de ses engagements sur le fondement des articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation, dans leur rédaction alors applicable.

4. Après avoir jugé les deux cautionnements manifestement disproportionnés aux biens et revenus de M. [P], la cour d'appel a dit que ce dernier n'était pas en mesure d'y faire face au moment où il a été appelé et que la banque ne pouvait donc pas s'en prévaloir.

Sur le moyen

Enoncé du moyen

5. La banque fait grief à l'arrêt de dire qu'elle ne peut pas se prévaloir de l'engagement de caution de M. [P] du 11 octobre 2016 au titre du prêt n° 08691089, de dire qu'elle ne peut pas se prévaloir de l'engagement de caution de M. [P] du 15 décembre 2017 au titre de toutes sommes qui lui seraient dues par la société dans la limite de 2 500 euros et de rejeter la demande en paiement présentée par elle à l'encontre de M. [P], alors :

« 1°/ qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; que, pour apprécier si le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, lui permet de faire face à son obligation, il doit être tenu compte de ses revenus à cette date ; qu'en considérant au contraire que la disproportion devrait s'apprécier, au jour où la caution est appelée, ''uniquement au regard du patrimoine de cette dernière'', sans tenir compte de ses revenus à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 332-1 du code de la consommation, alors applicable ;

2°/ qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; qu'en considérant que la banque ne rapportait aucun élément pour apprécier le patrimoine de la caution au jour où elle a été appelée, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les revenus mensuels de M. [P] en augmentation en considération de ses charges, au jour où il a été appelé 2020, ne permettaient pas à ce dernier, qui procédait d'ailleurs à un règlement mensuel de 427 euros par mois pour apurer sa dette, de faire face à son obligation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 332-1 du code de la consommation, alors applicable. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, applicable en la cause :

6. Aux termes de ces textes, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

7. La capacité de la caution à faire face à son obligation, au moment où elle est appelée, s'apprécie par rapport aux biens et revenus de celle-ci.

8. Pour dire que la banque ne pouvait pas se prévaloir des cautionnements consentis par M. [P], après avoir relevé que ceux-ci étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus, l'arrêt énonce que la disproportion manifeste s'apprécie, au jour où la caution est appelée, uniquement au regard du patrimoine de cette dernière. Il ajoute que la banque n'apportant aucun élément concernant le patrimoine de M. [P], elle ne justifie pas de ce que le patrimoine de ce dernier, au moment où celui-ci est appelé, lui permette de faire face à son obligation.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les revenus de M. [P] ne lui permettaient pas, à la date où il a été appelé, de faire face à son obligation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la société Banque populaire Grand Ouest ne peut pas se prévaloir de l'engagement de caution de M. [P] du 11 octobre 2016 au titre du prêt n° 08691089 ni de celui du 15 décembre 2017 au titre de toutes sommes qui seraient dues par la société Les Crépidules à la banque, l'arrêt rendu le 13 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne M. [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [P] et le condamne à payer à la société Banque populaire Grand Ouest la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400362
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 13 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 jui. 2024, pourvoi n°42400362


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400362
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