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19/06/2024 | FRANCE | N°42400359

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 juin 2024, 42400359


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


HM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 19 juin 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 359 F-B


Pourvoi n° B 22-12.877








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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1°/ La direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3],


2°/ la directrice générale des d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

HM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 juin 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 359 F-B

Pourvoi n° B 22-12.877

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JUIN 2024

1°/ La direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3],

2°/ la directrice générale des douanes et droits indirects, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° B 22-12.877 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Lyon (1ère chambre civile A), dans le litige les opposant à la société EDF renouvelables développement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 4] et de la directrice générale des douanes et droits indirects, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société EDF renouvelables développement, après débats en l'audience publique du 7 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 16 décembre 2021), au cours de l'année 2013, la société EDF en développement, devenue la société EDF renouvelables développement (la société EDF), spécialisée dans le secteur des énergies renouvelables, a importé en France des panneaux solaires et des modules photovoltaïques en provenance de la République populaire de Chine.

2. Le 23 octobre 2014, l'administration des douanes a adressé à la société EDF un avis de résultat de contrôle aux termes duquel elle lui reprochait un défaut de régularisation des droits antidumping, considérant que les droits provisoires, qu'elle avait garantis au titre des importations des produits déclarés par elle comme en provenance de Chine, étaient devenus définitifs par application du règlement d'exécution de l'Union européenne n° 1238/2013 du 2 décembre 2013.

3. Le 20 janvier 2015, l'administration des douanes a notifié à la société EDF un procès-verbal d'infraction et émis un avis de paiement d'un montant de 544 921 euros, composé des droits antidumping et de la TVA. Le 2 février 2015, elle a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) du même montant puis, a rejeté, le 8 février 2016, la contestation formée par la société EDF.

4. Le 20 janvier 2016, la société EDF a assigné l'administration des douanes aux fins d'annulation de l'AMR.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'administration des douanes fait grief à l'arrêt d'annuler l'avis de mise en recouvrement émis le 2 février 2015 à l'encontre de la société EDF, alors « qu'en estimant que la procédure de redressement dont la société EDF avait fait l'objet était irrégulière, dès lors que la communication du montant de la dette douanière de cette société n'avait pas été précédée d'une prise en compte, quand elle a elle-même relevé que la dette douanière de la société EDF était constituée de droits antidumping, lesquels n'ont pas à être pris en compte dans la comptabilité de l'administration des douanes préalablement à la communication de leur montant au débiteur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 217, § 1, du code des douanes communautaire. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 217, paragraphe 1, alinéa 1er, du code des douanes communautaires, tout montant de droits à l'importation ou de droits à l'exportation qui résulte d'une dette douanière doit être calculé par les autorités douanières dès qu'elles disposent des éléments nécessaires et faire l'objet d'une inscription par lesdites autorités dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (prise en compte). L'alinéa 2, sous a), du même article prévoit que le premier alinéa ne s'applique pas dans les cas où un droit antidumping ou compensateur provisoire a été institué.

7. Selon l'article 218, paragraphe 2, alinéa 2, du même code, lorsque la dette douanière concerne un droit antidumping provisoire, la prise en compte de ce droit doit intervenir au plus tard deux mois après le moment où le règlement instituant un droit antidumping ou compensateur définitif est publié au Journal officiel des Communautés européennes.

8. Le règlement d'exécution (UE) n° 1238/2013 du 2 décembre 2013 instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine prévoit à son article 1er, paragraphe 3, que, sauf indication contraire, les dispositions en vigueur en matière de droits de douane sont applicables.

9. La Cour de justice a dit pour droit, d'une part, que la réglementation douanière dans son ensemble, telle qu'elle se trouve notamment concrétisée dans le code des douanes, n'est applicable à des droits antidumping que si les règlements instituant de tels droits le prévoient, et que tel est le cas du règlement d'exécution n° 1238/2013 du Conseil du 2 décembre 2013 (arrêt du 22 mai 2019, n° C-226/18, Krohn & Schröder GmbH), d'autre part, qu'il découle de l'article 221, paragraphe 1, du code des douanes que la communication du montant des droits de douane au débiteur ne peut intervenir qu'après la prise en compte d'un tel montant, qui est elle-même définie à l'article 217, paragraphe 1, du code des douanes comme étant l'opération consistant, pour l'autorité douanière compétente, à calculer ledit montant dès qu'elle dispose des éléments nécessaires (arrêts du 23 février 2006, Molenbergnatie, C-201/04, point 46 ; du 16 juillet 2009, Snauwaert e.a., C-124/08 et C-125/08, points 21 et 23 ; du 15 mars 2018, n° C-256/16, Deichmann SE contre Hauptzollamt Duisburg, point 82).

10. Il en résulte que les droits antidumping provisoires, institués par le règlement (UE) n° 513/203 du 4 juin 2013, et dont la collecte définitive a été adoptée par le règlement d'exécution (UE) n° 1238/2013 du 2 décembre 2013, qui sont soumis aux dispositions du code des douanes communautaire, doivent faire l'objet d'une prise en compte avant d'être communiqués au débiteur.

11. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

12. L'administration des douanes fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en toute hypothèse, en considérant que la procédure de redressement dont la société EDF avait fait l'objet était irrégulière, dès lors que l'avis de résultat de contrôle daté du 23 octobre 2014 et reçu le 27 octobre 2014, qui valait communication des droits à régler, n'avait pas été précédé d'une prise en compte, quand seul le procès-verbal de notification d'infraction douanière du 20 janvier 2015 valait communication des droits, de sorte que c'est cet acte et non l'avis de résultat de contrôle préalable qui devait être précédé d'une prise en compte, la cour d'appel a violé les articles 217, §1, et 221, §1, du code des douanes communautaire. »

Réponse de la Cour

13. L'arrêt, après avoir rappelé, d'une part, que selon l'article 217 du code des douanes communautaire, tout montant de droits à l'importation ou de droits à l'exportation qui résulte d'une dette douanière doit être calculé par les autorités douanières dès qu'elles disposent des éléments nécessaires et faire l'objet d'une inscription par lesdites autorités dans les registres comptables ou tout autre support qui en tient lieu (prise en compte), d'autre part, que l'article 221, paragraphe 1, du code des douanes communautaire dispose que le montant des droits doit être communiqué au débiteur selon des modalités appropriées dès qu'il a été pris en compte, énonce exactement qu'il ressort de ces textes que, pour être recouvrés par la voie de l'AMR, les droits qui en font l'objet doivent avoir été régulièrement communiqués au débiteur, cette communication devant avoir été précédée de leur prise en compte.

14. L'arrêt relève ensuite que si l'administration des douanes, par un procès-verbal du 20 janvier 2015, a notifié à la société EDF les infractions qu'elle a retenues contre elle, toutefois, dès le 23 octobre 2014, elle a adressé à cette société un avis de résultat de contrôle, reçu le 27 octobre 2014, qui précise que le montant de 544 921 euros de droits et taxes éludés se compose de droits antidumping à hauteur de 455 621 euros et de la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 89 300 euros, et retient qu'il résulte de ses termes que cet avis valait communication des droits à régler, au sens de l'article 221 du code des douanes communautaire, de sorte que la prise en compte de la dette douanière devait être antérieure au 27 octobre 2014, date de réception de l'avis.

15. Enfin, après avoir rappelé que la Cour de justice a dit pour droit que le montant des droits constatés par les autorités est réputé pris en compte lorsque les autorités douanières inscrivent ce montant dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (CJUE, 26 octobre 2017, n° C-40716, « Aqua Pro » SIA c. Valsts ienemumu dienests), l'arrêt retient que, pour justifier la prise en compte, l'administration des douanes se borne à produire deux pièces intitulées « bordereaux », éditées le 5 octobre 2021, non numérotées, lesquelles n'établissent pas que la communication des droits ait été précédée de leur prise en compte.

16. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a retenu, d'une part, que l'avis de résultat de contrôle du 23 octobre 2014 permettait au débiteur de connaître le montant de la dette douanière, sa nature et son fait générateur, ce dont elle a déduit à bon droit qu'il valait communication des droits à régler au sens de l'article 221, paragraphe 1, du code des douanes communautaire, d'autre part, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que l'administration des douanes ne rapportait pas la preuve que cette communication ait été précédée de leur prise en compte, en a exactement déduit que la procédure était irrégulière.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le directeur régional des douanes et des droits indirects de [Localité 4] et la directrice générale des douanes et des droits indirects aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le directeur régional des douanes et des droits indirects de [Localité 4] et la directrice générale des douanes et des droits indirects ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400359
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

UNION EUROPEENNE - Douanes - Dette douanière - Recouvrement - Prise en compte et communication - Domaine d'application - Droits antidumping provisoires

UNION EUROPEENNE - Règlement (UE) n° 513/2013 de la Commission du 4 juin 2013 - Droits antidumping provisoires - Prise en compte antérieure avant la communication au débiteur - Nécessité

Des droits antidumping provisoires, institués par le règlement (UE) n° 513/2013 de la Commission du 4 juin 2013, et dont la collecte définitive a été adoptée par le règlement d'exécution (UE) n° 1238/2013 du Conseil du 2 décembre 2013, qui sont soumis aux dispositions du code des douanes communautaire, doivent faire l'objet d'une prise en compte avant d'être communiqués au débiteur


Références :

Règlement (UE) n° 513/2013 de la Commission du 4 juin 2013

règlement d'exécution (UE) n° 1238/2013 du Conseil du 2 décembre 2013.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 16 décembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 jui. 2024, pourvoi n°42400359


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400359
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