LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 mai 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 493 F-D
Pourvoi n° Y 22-19.797
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MAI 2024
M. [Z] [E], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 22-19.797 contre l'arrêt rendu le 19 mai 2022 par la cour d'appel de Toulouse (3e chambre), dans le litige l'opposant à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. [E], de la SCP Duhamel, avocat de la société Allianz IARD, après débats en l'audience publique du 23 avril 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 19 mai 2022), M. [E], qui avait souscrit un contrat d'assurance « multirisques habitation » à effet au 5 juin 2013 auprès de la société Allianz IARD (l'assureur), a été victime d'un cambriolage le 11 août 2014.
2. Après avoir été indemnisé du sinistre, il a sollicité de l'assureur la prise en charge de préjudices complémentaires.
3. L'assureur ayant refusé sa garantie pour ces préjudices, M. [E] l'a assigné en exécution du contrat. Devant le juge de la mise en état, l'assureur a soulevé la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
4. M. [E] fait grief à l'arrêt d'accueillir la fin de non recevoir tirée de la prescription et de déclarer irrecevables comme tardives ses demandes tendant à voir l'assureur condamné à lui verser diverses sommes en réparation du sinistre, notamment au titre du préjudice matériel, des pertes financières liées au retard d'indemnisation et du préjudice moral, alors « que l'article R. 112-1 du code des assurances prévoit que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription de l'article L. 114-1 du code des assurances, les dispositions législatives concernant l'interruption de la prescription ; que cette obligation d'information n'est satisfaite que par le rappel, in extenso, du contenu des textes prévoyant les causes d'interruption de la prescription ; qu'il ressort des constatations mêmes de l'arrêt que M. [E] soutenait dans ses conclusions d'appel que la police d'assurance ne visait pas clairement toutes les causes de prescriptions, de sorte que la prescription biennale ne lui était pas opposable ; qu'en se bornant à énoncer néanmoins, que les conditions générales rappelaient à l'article 7.6 page 48, les articles L. 114-1, L. 114-2 et L. 114-3 relatifs à la prescription abrégée en matières d'assurance et les articles 2240 et suivants du code civil quant aux causes ordinaires de prescription, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le contrat d'assurance précisait bien de manière exhaustive les dispositions de ces articles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 112-1, L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
Vu l'article R. 112-1 du code des assurances :
5. Il résulte de ce texte que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1, les différentes causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code.
6. Pour déclarer irrecevable comme prescrite l'action de M. [E] contre l'assureur, l'arrêt, après avoir retenu que la prescription biennale avait été acquise, relève que les conditions générales du contrat rappellent les articles L. 114-1, L. 114-2 et L. 114-3 relatifs à la prescription abrégée en matière d'assurance et les articles 2240 et suivants du code civil quant aux causes ordinaires de prescription.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à établir que les causes ordinaires d'interruption de la prescription étaient énoncées de manière exhaustive dans le contrat d'assurance, ce que M. [E] contestait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée ;
Condamne la société Allianz IARD aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Allianz IARD et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille vingt-quatre.