LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 mai 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 491 F-D
Pourvoi n° A 22-23.456
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MAI 2024
La société [S] & associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], représentée par M. [I] [S], a formé le pourvoi n° A 22-23.456 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2022 par la juridiction du premier président de la cour d'appel de Bordeaux, dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Demeures de Salanganes, représenté par son syndic, la société Foncia, dont le siège est [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société [S] & associés, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Demeures de Salanganes, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 avril 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué, rendu par la juridiction du premier président d'une cour d'appel (Bordeaux, 27 septembre 2022), et les productions, le syndicat des copropriétaires de la copropriété Les Demeures de Salanganes (le syndicat des copropriétaires), représenté par son syndic, la société Foncia, a confié à la société [S] & associés (l'avocat) la défense de ses intérêts dans un contentieux de droit immobilier.
2. Par jugement du 2 octobre 2018, un tribunal de grande instance a alloué diverses sommes au syndicat des copropriétaires.
3. L'appel formé contre ce jugement a été déclaré irrecevable par un arrêt du 20 mars 2020.
4. Le 1er février 2019, une convention prévoyant un honoraire de résultat a été signée entre le syndicat des copropriétaires, représenté par la société Foncia, et l'avocat.
5. La société Foncia s'étant opposée au paiement de l'honoraire de résultat, l'avocat a saisi, le 11 janvier 2021, le bâtonnier de son ordre à fin de fixation de ses honoraires.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. L'avocat fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance, de dire que la convention d'honoraire régularisée le 1er février 2019 est nulle et de nul effet et de le débouter de sa demande d'honoraire de résultat, alors « que, si l'honoraire de résultat ne peut être valablement stipulé qu'avant que le résultat ne soit obtenu, l'accord entre les parties sur l'existence d'un tel honoraire peut avoir lieu après la réalisation de diligences par l'avocat ; qu'en retenant, pour juger que la convention d'honoraire régularisée le 1er février 2019 était nulle et de nul effet, qu'il n'était pas établi qu'un tel honoraire avait été convenu « antérieurement au jugement du 2 octobre 2018, prestation objet du mandat confié » sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce jugement constituait une décision de justice irrévocable quand l'accord des parties sur l'existence d'un honoraire de résultat peut avoir lieu après la réalisation de diligences par l'avocat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10, alinéa 3, de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 et de l'article 10 du décret du 12 juillet 2005 dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1226 du 2 août 2017. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 :
8. Il résulte de ce texte que si l'honoraire de résultat ne peut être valablement stipulé qu'avant que le résultat ne soit obtenu à la suite d'un acte ou d'une décision irrévocable, l'accord entre les parties sur l'existence d'un tel honoraire peut avoir lieu après la réalisation de diligences par l'avocat.
9. Pour annuler la convention et débouter l'avocat de sa demande au titre de l'honoraire de résultat, l'arrêt retient que l'avocat n'est pas en mesure de justifier de l'envoi ou du retour d'une convention d'honoraire signée antérieurement au jugement du 2 octobre 2018, prestation objet du mandat confié.
10. L'arrêt ajoute que la régularisation d'une telle convention le 1er février 2019 est nulle et de nul effet.
11. En statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée si ce jugement était irrévocable au jour de la signature de la convention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable en la forme l'appel formé par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Demeures de Salanganes, l'arrêt rendu le 27 septembre 2022, entre les parties, par la juridiction du premier président de la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Demeures de Salanganes aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Demeures de Salanganes et le condamne à payer à la société [S] & associés la somme de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille vingt-quatre.