LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
SH
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 mai 2024
Cassation partielle
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 272 FS-B
Pourvoi n° Y 22-12.736
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 MAI 2024
1°/ M. [W] [K],
2°/ Mme [E] [B], épouse [K],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Y 22-12.736 contre l'arrêt rendu le 3 février 2022 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige les opposant à la société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Calloch, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme [K], de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 26 mars 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Calloch, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, Mme Vallansan, M. Riffaud, Mmes Fèvre, Guillou, M. Bedouet, Mme Schmidt, conseillers, Mmes Brahic-Lambrey, Champ, M. Boutié, Mme Coricon, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 février 2022), la société Green Experiment (la société), ayant pour gérant M. [K], a remis à la société BNP Paribas (la banque) un billet à ordre sur lequel M. [K] a porté son aval.
2. Le 9 décembre 2016, à la suite de l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société, la banque a assigné M. [K] en paiement du montant du billet à ordre.
Examen des moyens
Sur le second moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme [K] font grief à l'arrêt de condamner M. [K] à payer à la banque une somme comme avaliste d'un billet à ordre, alors « que la régularité du billet à ordre suppose qu'il soit daté ; qu'en l'espèce, il a été constaté que la date initiale a été biffée et qu'une autre date a été apposée ; que cette circonstance rendait le billet à ordre irrégulier ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 512-1, 6°, et L. 512-2 du code de commerce :
5. Il résulte de ces textes que le titre dans lequel fait défaut l'indication de la date où il est souscrit ne vaut pas comme billet à ordre. Toute modification de la date initialement apposée, non approuvée par le souscripteur, équivaut à un défaut de date.
6. Pour condamner M. [K] à payer, en sa qualité d'avaliste, le billet à ordre litigieux, l'arrêt, après avoir relevé qu'il comporte une date raturée et une date rajoutée d'une écriture différente de celle ayant apposé les autres mentions, retient que la seconde date a manifestement annulé et remplacé la précédente, qui correspondait à un jour non ouvré, sans rendre incertaine la date du billet à ordre et sans vicier celui-ci, puisqu'elle n'affecte d'aucune ambiguïté la date de création du titre correspondant à celle de remise des fonds.
7. En statuant ainsi, alors qu'un billet à ordre, sur lequel figure la mention d'une première date ensuite raturée, puis d'une seconde date ajoutée au-dessus par une autre personne que le souscripteur dans des conditions indéterminées, doit être considéré comme dépourvu de date, de sorte qu'il ne vaut pas titre cambiaire et que, par voie de conséquence, l'aval donné sur ce titre est irrégulier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en tant que celui-ci a débouté la société BNP Paribas de sa demande en paiement de la somme de 140 000 euros et condamne M. [W] [K] à payer à la société BNP Paribas la somme de 140 000 euros au titre de l'engagement d'avaliste, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 juin 2016 jusqu'à parfait paiement, l'arrêt rendu le 3 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen.
Remet sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen autrement composée.
Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas et la condamne à payer à M. et Mme [K] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-quatre.