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04/04/2024 | FRANCE | N°32400194

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 04 avril 2024, 32400194


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3


MF






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 4 avril 2024








Cassation partielle




Mme TEILLER, président






Arrêt n° 194 F-D


Pourvoi n° K 22-20.107








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_____________________

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024


Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], représenté par son syndic la société Cime, dont le siège est [Adresse 7], a formé le pourvoi n° K 2...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 avril 2024

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 194 F-D

Pourvoi n° K 22-20.107

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 AVRIL 2024

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], représenté par son syndic la société Cime, dont le siège est [Adresse 7], a formé le pourvoi n° K 22-20.107 contre les arrêts rendus les 21 mai 2021 et 8 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Les Souscripteurs du Lloyds de Londres, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 14], prise en sa qualité d'assureur décennal de la société Global architecture,

2°/ à M. [P] [O],

3°/ à Mme [Y] [L], épouse [O],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

4°/ à la société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 16],

5°/ à M. [R] [X], domicilié [Adresse 1], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société GM constructions,

6°/ à M. [S] [G], domicilié [Adresse 11],

7°/ à la société GLM constructions, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 19], en liquidation judiciaire,

8°/ à la société Atland résidentiel, anciennement dénommée société Financière rive gauche puis Atland développement, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, dont le siège est [Adresse 9],

9°/ à la société SMA, société anonyme, dont le siège est [Adresse 13],

10°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 4],

11°/ à la société Financière rive gauche groupe Martinsa Fadesa, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert,

12°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], dont le siège est [Adresse 6], représenté par son syndic la société Gérance de Passy, dont le siège est [Adresse 12],

13°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [Adresse 8],

14°/ à la société Global architecture, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 10],

15°/ à la société Allianz IARD, dont le siège est [Adresse 15], venant aux droits de la société Gan Eurocourtage,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], de la SAS Hannotin Avocats, avocat de la société Atland résidentiel, de la SCP Le Griel, avocat de M. [X], ès qualités, après débats en l'audience publique du 27 février 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Les Souscripteurs du Lloyds de Londres, MAAF assurances, Mutuelle des architectes français, SMA, Financière rive gauche groupe Martinsa Fadesa (la société Financière rive gauche), venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, Axa France IARD, Allianz IARD, venant aux droits de la société Gan Eurocourtage, M. et Mme [O], M. [G] et le syndicat des copropriétaires [Adresse 6].

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 21 mai 2021, rectifié par arrêt du 8 avril 2022), la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, aux droits de laquelle vient désormais la société Atland résidentiel, anciennement dénommée Financière rive gauche, puis Atland développement, a détruit un bâtiment en fond de parcelle située au [Adresse 5], en vue de construire un immeuble avec jardin.

3. Sont notamment intervenues à l'opération de construction, la société Global architecture, en qualité de maître d'oeuvre, et la société GLM constructions, désormais en liquidation judiciaire, chargée du lot gros oeuvre.

4. Après réception, des infiltrations provoquées par l'absence d'étanchéité d'un mur enterré soutenant les terres du jardin créé au sein de la nouvelle construction ont affecté les propriétés mitoyennes de M. et Mme [O], de M. [G] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 6].

5. Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a, après expertise, assigné en réparation les intervenants à l'acte de construire et leurs assureurs ainsi que M. et Mme [O], M. [G] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6].

Examen des moyens

Sur le premier moyen, en ce qu'il vise le rejet de la demande de garantie formée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] contre la société Financière rive gauche, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, devenue Atland résidentiel, au titre des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. et Mme [O], de M. [G] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 6]

Enoncé du moyen

6. Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en garantie à l'encontre de la société Financière rive gauche, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, devenue Atland résidentiel, au titre des condamnations prononcées contre elle au profit de M. et Mme [O], de M. [G] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], alors « que toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire est responsable de plein droit, envers l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui en compromettent la solidité ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en retenant, pour écarter la responsabilité de la société Atland développement, venant aux droits de la SCI [Localité 17] Croix Nivert, société de construction-vente, maître de l'ouvrage, de toute responsabilité des désordres affectant les murs mitoyens au jardin situés en fond de parcelle, qu'il n'était pas rapporté la preuve de son immixtion dans la réalisation des travaux de construction, quand, en sa qualité de vendeur-constructeur, la société Atland développement était responsable de plein droit des désordres décennaux affectant l'ouvrage qu'elle avait fait construire, puis revendu, la cour d'appel a violé les articles 1792 et 1792-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a constaté que les dommages subis par les tiers victimes, à raison desquels le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], condamné à réparation sur le fondement du trouble anomal de voisinage, sollicitait la garantie du maître de l'ouvrage, résultaient de l'absence d'étanchéité de murs mitoyens enterrés, imputable au maître d'oeuvre et à l'entreprise de gros oeuvre auxquels celle-ci avait fait appel.

8. Ayant souverainement retenu qu'aucune immixtion fautive du maître de l'ouvrage dans les travaux de construction ayant causé lesdits dommages n'était établie, elle en a déduit, à bon droit, que les recours du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] contre celui-ci ne pouvaient être accueillis.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, en ce qu'il vise le rejet de la demande du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à l'encontre de la société Financière rive gauche, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, devenue Atland résidentiel, au titre du coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres affectant les ouvrages qu'elle a fait réaliser

Enoncé du moyen

10. Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande contre la société Financière rive gauche, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, devenue Atland résidentiel, au titre du coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres entachant les ouvrages qu'elle a fait réaliser, alors « que toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire est responsable de plein droit, envers l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui en compromettent la solidité ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en retenant, pour écarter la responsabilité de la société Atland Développement, venant aux droits de la SCI [Localité 17] Croix Nivert, société de construction-vente, maître de l'ouvrage, de toute responsabilité des désordres affectant les murs mitoyens au jardin situés en fond de parcelle, qu'il n'était pas rapporté la preuve de son immixtion dans la réalisation des travaux de construction, quand, en sa qualité de vendeur-constructeur, la société Altand Developpement était responsable de plein droit des des désordres décennaux affectant l'ouvrage qu'elle avait fait construire, puis revendu, la cour d'appel a violé les articles 1792 et 1792-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

11. La société Atland résidentiel, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, conteste la recevabilité du moyen au motif que celui-ci est nouveau, mélangé de fait et de droit.

12. Cependant, le moyen est de pur droit, dès lors qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.

13. Il est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 1792 et 1792-1 du code civil :

14. En application de ces textes, toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire est responsable de plein droit, à l'égard des acquéreurs, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

15. Pour rejeter la demande de condamnation à l'encontre du maître de l'ouvrage au titre des travaux de traitement de l'étanchéité de la paroi enterrée en fond de parcelle et des murs mitoyens ainsi que de remise en état du jardin, partie commune à usage privatif, l'arrêt retient que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] n'apporte pas la preuve d'une immixtion de celui-ci dans la réalisation des travaux.

16. En statuant ainsi, après avoir constaté que la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, société de construction-vente, était le maître de l'ouvrage de la construction édifiée au [Adresse 5], ce dont il résultait que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] était constitué entre les acquéreurs de lots, à l'égard desquels la première était tenue d'une responsabilité de plein droit à raison des désordres de nature décennale affectant l'ouvrage qu'elle avait fait construire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

17. Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] fait grief à l'arrêt de condamner la société Global architecture à le garantir à hauteur de 20 % de la condamnation prononcée contre lui à l'égard de M. et Mme [O] et de fixer sa créance de garantie au passif de la société GLM constructions à hauteur de 80 % de cette somme, alors « que chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la victime ; qu'en refusant de condamner in solidum les sociétés Global Architecture et GLM Construction à garantir le syndicat des copropriétaires de sa condamnation à verser aux époux [O] la somme de 273 930,87 euros en réparation de leur préjudice de jouissance, quand il s'évinçait de ses propres constatations que ces deux sociétés avaient contribué à la survenance du dommage à l'origine du préjudice subi par les époux [O], la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil :

18. En application de ce texte, chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné in solidum à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilités auquel il est procédé entre eux, lequel n'affecte que leurs rapports réciproques mais non le caractère et l'étendue de leur obligation à l'égard de la victime du dommage.

19. L'arrêt, après avoir condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer, sur le fondement du trouble anomal de voisinage, une certaine somme à M. et Mme [O] en réparation de leur préjudice de jouissance résultant de l'absence d'étanchéité du mur mitoyen, condamne la société Global architecture à garantir le syndicat des copropriétaires à hauteur de 20 % de la condamnation prononcée de ce chef et fixe sa créance de garantie au passif de la société GLM constructions à hauteur de 80 % de la somme allouée.

20. En statuant ainsi, après avoir retenu que les désordres causés côté [Adresse 18] à M. et Mme [O] étaient imputables aux sociétés Global architecture et GLM constructions, la cour d'appel, en ne prononçant pas de condamnation à garantie in solidum contre les deux co-auteurs du même dommage, a violé le texte susvisé.

Mise hors de cause

21. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Atland résidentiel, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] tendant à la condamnation de la société Financière rive gauche groupe Martinsa Fadesa, venant aux droits de la société civile immobilière [Localité 17] Croix Nivert, devenue Atland développement et désormais Atland résidentiel, à lui payer la somme de 110 676, 67 euros au titre des travaux de traitement de l'étanchéité de la paroi enterrée en fond de parcelle et des murs mitoyens ainsi que de remise en état du jardin et en ce qu'il condamne la société Global architecture à le garantir à hauteur de 20 % de la condamnation prononcée contre lui à l'égard de M. et Mme [O] et fixe sa créance de garantie au passif de la société GLM constructions à ce titre à hauteur de 80 % de cette somme, l'arrêt rendu le 21 mai 2021 rectifié le 8 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Atland résidentiel ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne les sociétés Atland résidentiel et Global architecture aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Atland résidentiel et la société Global architecture à payer, chacune, la somme de 1 500 euros au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 32400194
Date de la décision : 04/04/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 mai 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 04 avr. 2024, pourvoi n°32400194


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SAS Hannotin Avocats, SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Le Griel

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:32400194
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