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27/03/2024 | FRANCE | N°52400377

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mars 2024, 52400377


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CL6






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 27 mars 2024








Cassation




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 377 F-D


Pourvoi n° M 23-12.959








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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_______________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MARS 2024


Mme [O] [E], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 23-12.959 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Nîmes...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CL6

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mars 2024

Cassation

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 377 F-D

Pourvoi n° M 23-12.959

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MARS 2024

Mme [O] [E], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 23-12.959 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile - 5e chambre sociale PH), dans le litige l'opposant à la société Hennes & Mauritz (H&M), société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Rodrigues, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de Mme [E], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Hennes & Mauritz, après débats en l'audience publique du 28 février 2024 où étaient présentes Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Rodrigues, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 janvier 2023), Mme [E] a été engagée en qualité de vendeuse par la société Hennes et Mauritz (H&M), à compter du 18 octobre 2007, suivant contrat à durée déterminée à temps partiel devenu, par avenant du 16 décembre 2007, un contrat à durée indéterminée, puis, par avenant du 1er juillet 2008, un contrat à temps complet. Par un nouvel avenant du 1er août 2015, le temps de travail de la salariée a été réduit à temps partiel.

2. Après avoir été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 1er février 2018, la salariée a été licenciée le 18 janvier 2019.

3. Elle a saisi la juridiction prud'homale le 27 juin 2019 en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et en condamnation de l'employeur au paiement de rappels de salaires, congés payés afférents, réévaluation des congés payés pris, et dommages-intérêts.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que les faits sont prescrits et de la déclarer irrecevable en ses demandes pour forclusion, alors :

« 1°/ que, de première part, la durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail, et non à la prescription biennale de l'article L. 1471-1 du code du travail ; qu'en retenant, par conséquent, pour déclarer la salariée irrecevable en ses demandes, que le délai de prescription auquel était soumise l'action aux fins de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, qui tendait à la condamnation de l'employeur à lui payer une somme à titre de rappel de salaires et diverses sommes subséquentes, avait commencé à courir le 1er août 2015 pour arriver à échéance deux ans plus tard, le 1er août 2017 et que la saisine du conseil de prud'hommes de Nîmes en date du 27 juin 2019, qui portait sur la demande de requalification du contrat de travail et ses conséquences indemnitaires, était donc intervenue au-delà de la date du 1er août 2017 et devait être déclarée irrecevable, quand le délai de prescription de trois ans, posé par les dispositions de l'article L. 3245-1 du code du travail, était applicable à l'action exercée par la salariée, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1471-1 et L. 3245-1 du code du travail ;

2°/ que, de seconde part, il résulte de la combinaison des articles L. 3245-1 et L. 32421 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible ; que pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré ; qu'en fixant, dès lors, pour déclarer la salariée irrecevable en ses demandes, le point de départ du délai de prescription auquel était soumise l'action exercée par la salariée, qui tendait à la condamnation de l'employeur à lui payer une somme à titre de rappel de salaires pour la période de trois ans antérieure au 18 janvier 2019 et diverses sommes subséquentes, au jour de la conclusion de l'avenant au contrat de travail en date du 1er juin 2015, par lequel le temps de travail de la salariée avait été réduit, quand le délai de prescription auquel était soumise l'action exercée par la salariée n'avait commencé à courir qu'à compter des dates auxquelles les créances salariales étaient devenues exigibles, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 3242-1 et L. 3245-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. L'employeur soutient que le moyen est nouveau, voire contraire à l'argumentation en fait développée dans les conclusions d'appel de la salariée.

6. Toutefois, étant de pur droit, le moyen est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 3242-1 et L. 3245-1 du code du travail :

7. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.

8. Aux termes de ce texte, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

9. Il résulte de la combinaison des articles L. 3242-1 et L. 3245-1 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré.

10. Pour déclarer irrecevables pour forclusion les demandes de la salariée, l'arrêt relève que celle-ci a signé le 1er août 2015 un avenant à son contrat de travail diminuant son temps de travail qui prévoyait la répartition de ses heures hebdomadaires et précisait que l'horaire journalier de travail lui serait notifié avec un délai de prévenance minimum de trois jours et que cette répartition pourrait être modifiée dans certains cas mentionnés et pourrait l'amener à travailler tous les jours ouvrables de 6 heures à 23 heures, la modification devant lui être notifiée au moins trois jours à l'avance sauf accord préalable de sa part.

11. L'arrêt constate que la salariée a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein aux motifs que le contenu contractuel l'a maintenue à la disposition constante de son employeur et que le délai de prévenance de trois jours porté au contrat de travail est contraire à celui de sept jours de la convention collective.

12. Il retient, d'abord, que les éléments développés au soutien de la requête sont contenus dans l'avenant au contrat de travail signé le 1er août 2015. Il en conclut que la salariée a eu connaissance dès cette signature des termes de l'avenant et donc des faits qui lui permettaient d'intenter une action. Il retient, ensuite, que le délai de prescription de son action aux fins de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein a débuté le 1er août 2015, pour arriver à échéance deux ans plus tard, le 1er août 2017. Il ajoute que la saisine du conseil de prud'hommes en date du 27 juin 2019, qui porte sur la demande de requalification du contrat de travail et ses conséquences indemnitaires, est donc intervenue au-delà de cette date.

13. En statuant ainsi, alors que le délai de prescription d'une action en paiement de salaires, fondée sur la requalification d'un contrat à temps partiel en contrat à temps complet, ne court pas à compter de la date de conclusion du contrat ou de son avenant mais à compter de celle à laquelle la créance salariale est devenue exigible et que cette action est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail, ce dont elle aurait dû déduire, d'une part, que l'action de la salariée, introduite devant la juridiction prud'homale le 27 juin 2019, était recevable et, d'autre part, que la demande en paiement pouvait porter sur les sommes dues au titre des trois années précédant cette date ou des trois années précédant la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Hennes et Mauritz aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hennes et Mauritz et la condamne à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400377
Date de la décision : 27/03/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nimes, 10 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mar. 2024, pourvoi n°52400377


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400377
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