La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/03/2024 | FRANCE | N°52400313

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mars 2024, 52400313


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 20 mars 2024








Cassation partielle




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 313 F-D


Pourvoi n° S 22-19.170


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [Z] [J].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour

de cassation
en date du 19 mai 2022.






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mars 2024

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 313 F-D

Pourvoi n° S 22-19.170

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [Z] [J].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 19 mai 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 MARS 2024

M. [K] [Z] [J], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 22-19.170 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Trans 2B, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est, [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. [Z] [J], après débats en l'audience publique du 13 février 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, M. Gambert, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 novembre 2021), M. [Z] [J] a été engagé en qualité de conducteur livreur, à compter du 21 mai 2019, par la société Trans 2B.

2. Par lettre du 23 septembre 2019, il a été licencié pour faute grave, l'employeur lui reprochant notamment le fait de s'être masturbé dans le camion mis à sa disposition dans un lieu public.

3. Contestant cette rupture, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement licite et justifié par une faute grave et de le débouter de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement nul, de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, alors « qu'un fait de la vie personnelle ne peut justifier un licenciement disciplinaire ; qu'en retenant, pour déclarer le licenciement justifié par une faute grave, que M. [Z] [J] ne peut légitimement soutenir que l'employeur a violé sa vie privée en ce que les faits reprochés se sont déroulés sur le lieu de trajet entreprise/domicile, au sein du véhicule de la société, à l'issue de sa journée de travail, quand il résultait de ces constatations que les faits reprochés à M. [Z] [J] se sont déroulés en dehors du temps et du lieu de travail, de sorte qu'ils se rattachaient à sa vie personnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, 1234-1 et L. 1226-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail :

5. Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Ass. plén., 22 décembre 2023, pourvoi n° 21-11.330, publié).

6. Pour dire le licenciement fondé sur une faute grave, l'arrêt retient que les pièces produites, à savoir la copie du courrier anonyme daté du 26 juin 2019 et l'attestation du coordinateur d'exploitation, établissent la matérialité des faits et qu'à supposer illicite le moyen de preuve résultant de l'utilisation du système de géolocalisation, l'atteinte au droit à la vie privée du salarié est limitée dans la mesure où ce dernier ne conteste pas qu'il conduisait un véhicule de la société, que les faits se sont déroulés entre le siège de l'entreprise et son domicile, à l'issue de sa journée de travail.

7. Il en déduit, d'une part, que l'utilisation du système de géolocalisation était indispensable à l'exercice par la société de son droit à la preuve et strictement proportionnée au but poursuivi et ne doit pas être écartée des débats et, d'autre part, que le salarié ne peut légitimement soutenir que l'employeur a violé sa vie privée en ce que les faits reprochés se sont déroulés sur le lieu de trajet entreprise/domicile, au sein du véhicule de la société.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les faits avaient été commis en dehors du temps de travail et que la seule circonstance que le salarié se trouvait, lors du trajet effectué entre son lieu de travail et son domicile, dans le véhicule professionnel mis à sa disposition ne pouvait suffire à rattacher les faits à sa vie professionnelle, ce dont il résultait que les faits, qui ne constituaient pas un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail, ne pouvaient justifier le licenciement prononcé pour motif disciplinaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation des chefs de dispositif disant le licenciement du salarié licite et justifié par une faute grave et le déboutant de ses demandes indemnitaires afférentes, n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt déboutant le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, en l'absence de lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement de M. [Z] [J] licite et justifié par une faute grave et en ce qu'il le déboute de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement nul et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne la société Trans 2B aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Trans 2B à payer à la SCP Boutet et Hourdeaux la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400313
Date de la décision : 20/03/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 25 novembre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mar. 2024, pourvoi n°52400313


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400313
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award