LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
HP
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 février 2024
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 225 F-D
Pourvoi n° W 22-18.369
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 FÉVRIER 2024
La société Activium information design, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-18.369 contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [R] [T], domicilié [Adresse 2],
2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lacquemant, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Activium information design, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [T], après débats en l'audience publique du 23 janvier 2024 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lacquemant, conseiller rapporteur, Mme Palle, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Activium information design du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 novembre 2021), M. [T] a été engagé en qualité d'ingénieur systèmes par la société Aenix le 1er décembre 1990. Il occupait en dernier lieu le poste de directeur technique.
3. En juillet 2013, la société Aenix a été reprise par la société Activium information design et le contrat de travail du salarié a été transféré à cette dernière société.
4. Licencié pour faute grave le 30 janvier 2017, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié certaines sommes au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, alors « qu'en cas de transfert d'entreprise au sens de l'article L. 1224-1 du code du travail, les conventions et accords collectifs applicables dans l'entité transférée sont automatiquement mis en cause, sans que le nouvel employeur ait à les dénoncer et à informer les salariés des conventions et accords collectifs de travail nouvellement applicables ; qu'en affirmant, pour juger que l'indemnité de licenciement et l'indemnité de préavis devaient être déterminées selon les règles édictées par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie applicable au litige", que le contrat de travail du salarié a été transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail", que pour l'obtention d'un changement de convention collective applicable, l'employeur doit notifier sa dénonciation au comité d'entreprise, aux comités d'établissement, aux délégués du personnel, aux délégués syndicaux ou aux salariés mandatés et en informer les salariés" et que la société ne justifie pas de cette notification auprès des instances représentatives, ni de l'information sur les avenants contractuels remis au salarié de l'application d'une autre convention collective que celle figurant sur son contrat de travail", la cour d'appel, qui a méconnu les conséquences du transfert d'entreprise sur l'application des accords collectifs, a violé les articles L. 2261-2 et L. 2261-14 du code du travail dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 2261-2, alinéa 1er, et L. 2261-14 du code du travail, le second dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :
6. Selon le premier de ces textes, la convention applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur.
7. Il résulte du second, que lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.
8. Pour dire que l'indemnité conventionnelle de licenciement doit être calculée selon les règles édictées par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, l'arrêt constate, d'une part, que le contrat de travail a été transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, d'autre part, que l'employeur ne justifie pas de la notification de la dénonciation de la convention collective applicable aux instances représentatives du personnel ni de l'information sur les avenants contractuels remis au salarié de l'application d'une autre convention collective que celle figurant sur son contrat de travail.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'entreprise cessionnaire appliquait la convention collective de la papeterie, fournitures de bureau, commerce de détail et que le licenciement était intervenu plus d'un an après le transfert du contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas retenu que l'application de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie avait été contractualisée, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. La cassation des chefs de dispositif relatifs à l'indemnité conventionnelle de licenciement, au préavis et aux congés payés afférents n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Activium information design à payer à M. [T] les sommes de 118 807,05 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 41 366,10 euros au titre du préavis et 4 136,61 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 3 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Condamne M. [T] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille vingt-quatre.