LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 février 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 141 F-D
Pourvoi n° C 22-19.732
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 FÉVRIER 2024
Mme [U] [X], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 22-19.732 contre l'arrêt rendu le 4 avril 2022 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Assurance du crédit mutuel IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [X], de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de la société Assurance du crédit mutuel IARD, après débats en l'audience publique du 9 janvier 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 4 avril 2022), le 11 décembre 2017, le véhicule appartenant à Mme [X] a été percuté par un autre véhicule, assuré par la société Assurance du crédit mutuel IARD (l'assureur).
2. Mme [X] a assigné l'assureur en indemnisation de ses préjudices matériels.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. Mme [X] fait grief à l'arrêt de limiter la condamnation de l'assureur au paiement de la somme de 1 280,14 euros [lire 453,30 euros], alors « que l'assureur du responsable ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui ; que comme l'avait fait valoir Mme [X] dans ses conclusions d'appel, elle seule était propriétaire du véhicule accidenté, elle seule avait réglé les frais de réparation et elle seule avait mandaté l'expert pour évaluer le montant de son préjudice, ce que ne pouvait ignorer la compagnie ACM ; qu'en estimant cependant qu'il y avait lieu de déduire de la somme mise à la charge de l'assureur du responsable celle de 826,84 euros versée par ce dernier à M. [R] [X] au motif inopérant et à tout le moins insuffisant selon lequel c'était ce nom qui figurait sur le constat amiable, la cour d'appel a violé l'article L. 124-3 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 124-3 du code des assurances :
5. Selon ce texte, l'assureur, à l'encontre duquel est exercée une action directe, ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré.
6. Pour condamner l'assureur à payer à Mme [X] une somme, correspondant à l'évaluation de ses préjudices, déduction faite du montant d'un chèque établi par l'assureur et libellé à l'ordre de M. [R] [X], l'arrêt relève que Mme [X] a elle même écrit le nom et l'adresse de ce dernier sur le constat amiable d'accident aux rubriques « preneur d'assurance / assuré » et « conducteur ». Il constate également que l'assureur a été invité à participer aux opérations d'expertise du véhicule à l'adresse de M. [R] [X].
7. Il retient que ces éléments justifient le fait que l'assureur ait enregistré M. [R] [X] en tant que tiers victime. Il ajoute que Mme [X] ne s'en explique pas et est la seule à l'origine de la mention figurant sur le constat amiable.
8. En statuant ainsi, en soustrayant des sommes payées au tiers lésé une somme versée à un tiers, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Assurance du crédit mutuel IARD à payer à Mme [X] la somme de 453,30 euros avec intérêts à taux légal à compter du 30 avril 2018 et en ce qu'il statue sur les dépens d'appel et l'application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel, l'arrêt rendu le 4 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne la société Assurance du crédit mutuel IARD aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Assurance du crédit mutuel IARD et la condamne à payer à Mme [X] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-quatre.