LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
COUR DE CASSATION
CC
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QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
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Audience publique du 7 février 2024
NON-LIEU A RENVOI
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 155 F-D
Pourvoi n° D 23-18.633
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 FÉVRIER 2024
Par mémoire spécial présenté le 17 novembre 2023, Mme [X] [I], domiciliée [Adresse 1], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité (n° 1138) à l'occasion du pourvoi n° D 23-18.633 formé contre l'arrêt n°RG 21/02054 rendu le 16 mai 2023 par la cour d'appel de Rennes (3ème chambre commerciale), dans une instance l'opposant :
1°/ à la Société générale, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ au Fonds commun de titrisation Ornus, ayant pour société de gestion la société Eurotitrisation, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], représenté par la société MCS et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], agissant en qualité de recouvreur, venant aux droits de la Banque Tarneaud.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Calloch, conseiller, les observations de la SCP Duhamel, avocat de Mme [I], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société générale, de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat du Fonds commun de titrisation Ornus, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 février 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Calloch, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Le 30 septembre 2013, la société Besse et Aupy (la société) a souscrit au profit de la société Banque Tarneaud (la banque) un billet à ordre que Mme [I], présidente de la société souscriptrice, a avalisé.
2. A la suite de la liquidation judiciaire de la société, la banque a assigné Mme [I], en sa qualité d'avaliste, en paiement du montant du billet à ordre.
3. Par arrêt du 16 mai 2023, la cour d'appel de Rennes a condamné Mme [I] à payer au Fonds la somme de 200 000 euros.
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
4. A l'occasion du pourvoi formé contre cet arrêt, Mme [I] a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « Les articles L. 511-21, L. 512-1 et L. 512-4 du code de commerce, qui prévoient les règles applicables à l'aval du billet à ordre, contreviennent-ils aux dispositions de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui consacre le principe d'égalité des citoyens devant la loi, en ne prévoyant aucune disposition empêchant le créancier professionnel de se prévaloir de l'aval consenti par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, en n'imposant pas à tout avaliste personne physique s'engageant à l'égard d'un créancier professionnel de faire précéder sa signature, à peine de nullité de l'aval, d'une mention manuscrite ayant pour objet de l'informer de l'étendue de son engagement, en particulier sur sa durée ou son caractère solidaire, et en ne mettant à la charge du créancier professionnel aucune obligation d'information de l'avaliste sur la défaillance du débiteur principal et sur l'évolution du montant de la dette garantie, quand de telles protections sont prévues pour les cautions personnes physiques engagées à l'égard d'un créancier professionnel, pourtant tenues d'un engagement de même nature que celui de l'avaliste, y compris lorsqu'elles dirigent la société dont elles garantissent la dette (article L. 341-4 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, devenu L. 332-1 et L. 343-4 du même code, et article 2300 du code civil, à propos de la disproportion de l'engagement de la caution ; articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, devenus L. 331-1 et L. 331-2 du même code, et article 2297 du code civil, à propos du formalisme de l'engagement de caution ; article L. 341-6 du code de la consommation, devenu L. 333-2 du même code, article L. 313-22 du code monétaire et financier, et article 2299 du code civil à propos de l'obligation d'information de la caution) ? »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
5. Les dispositions contestées sont applicables au litige, qui concerne une demande de paiement dirigée contre l'avaliste d'un billet à ordre.
6. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
7. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
8. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux dans la mesure où, contrairement à la caution, le donneur d'aval garantit le paiement d'un titre et souscrit un engagement gouverné par les règles propres du droit cambiaire qui sont nécessaires à la sécurité et la transmission des effets de commerce et que la différence de traitement ainsi opérée est donc en rapport direct avec l'objet des textes qui l'établissent.
9. En conséquence, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille vingt-quatre.