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24/01/2024 | FRANCE | N°42400031

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 janvier 2024, 42400031


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


FB






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 24 janvier 2024








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 31 FS-B


Pourvoi n° F 21-17.776


















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE

FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 24 JANVIER 2024


1°/ La direction régionales des douanes et droits indirects du [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3],


2°/ l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 janvier 2024

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 31 FS-B

Pourvoi n° F 21-17.776

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 24 JANVIER 2024

1°/ La direction régionales des douanes et droits indirects du [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3],

2°/ le directeur général des douanes et droits indirects, domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° F 21-17.776 contre l'arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant à la société Chuchu Decayeux, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction régionales des douanes et droits indirects du [Localité 4] et du directeur général des douanes et droits indirects, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Chuchu Decayeux, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 28 novembre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot, Mmes Fèvre, Ducloz, MM. Alt, Calloch, conseillers, M. Blanc, Mmes Vigneras, Lion, Lefeuvre, M. Maigret, conseillers référendaires, Mme Gueguen, premier avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 11 mars 2021) et les productions, le 13 mars 2015, la société Chuchu Decayeux a procédé à une importation de marchandises en provenance de la République populaire de Chine. Le même jour, la société Agence maritime Rommel, commissionnaire en douane agréé, chargée, selon mandat de représentation directe, d'accomplir les formalités douanières, a souscrit la déclaration en douane correspondante en utilisant son propre crédit d'enlèvement.

2. Le 2 avril 2015, la société Agence maritime Rommel a reçu de la société Chuchu Decayeux une somme égale au montant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à l'importation due au titre de l'opération, mais ne s'est pas acquittée de cette taxe auprès de l'administration des douanes.

3. Le 14 avril 2015, la société Agence maritime Rommel a été mise en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 26 mai 2015.

4. Le 20 juillet 2015, à défaut d'avoir reçu le paiement de la TVA à l'importation, l'administration des douanes a émis contre la société Chuchu Decayeux un avis de mise en recouvrement (AMR) de la somme correspondant à la TVA à l'importation due.

5. Après le rejet de sa contestation, la société Chuchu Decayeux a assigné l'administration des douanes en annulation de l'AMR, en décharge de la TVA à l'importation mise en recouvrement et en responsabilité.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. L'administration des douanes fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Chuchu Decayeux la somme de 85 252 euros à titre de dommages et intérêts et, prononçant la compensation avec le montant de la TVA à l'importation due par cette société, d'ordonner un dégrèvement total sur l'AMR émis le 20 juillet 2015, alors « qu'en relevant, pour condamner l'administration des douanes à payer à la société Chuchu Decayeux, à titre de dommages et intérêts, le montant de la TVA due à l'importation qui avait été versé à son commissionnaire en douane, la société Agence maritime Rommel, mais qui avait été absorbé par les pertes de cette société, que l'administration douanière avait commis une faute en n'exigeant pas de la société Agence maritime Rommel, dont elle aurait connu les difficultés financières, qu'elle constitue une caution, quand la possibilité laissée par la loi à l'administration des douanes d'exiger une caution du débiteur de la dette douanière ne constitue qu'une simple faculté dont l'exercice relève de son pouvoir discrétionnaire, de sorte que le défaut d'exercice de cette faculté ne peut constituer une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration, la cour d'appel a violé les articles 114, 1 ter, et 401 du code des douanes et l'article 190, paragraphe 1, du code des douanes communautaire. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 114, 1, 1 bis et 1 ter, du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 :

7. En premier lieu, il résulte de la combinaison de ce texte et de l'article 293 A du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003, que le commissionnaire en douane agissant en exécution d'un mandat de représentation indirecte donné par la personne désignée comme destinataire réel des biens dans la déclaration d'importation bénéficie, en tant que débiteur de la TVA à l'importation, solidairement avec le redevable de cette taxe, de la dispense légale de caution prévue à l'article 114, 1 bis, du code des douanes.

8. Au commissionnaire en douane agissant en exécution d'un mandat de représentation indirecte, doit être assimilé le commissionnaire en douane qui, bien qu'agissant en exécution d'un mandat de représentation directe, utilise son propre crédit d'enlèvement et se trouve, de ce fait, également débiteur de la TVA à l'importation et des taxes assimilées.

9. Il s'ensuit que la société Agence maritime Rommel bénéficiait de la dispense de caution prévue par le texte susvisé.

10. En second lieu, il résulte du texte susvisé, d'une part, que la constitution d'une caution en cas d'enlèvement des marchandises avant acquittement des droits et taxes exigibles a pour finalité exclusive de garantir leur paiement effectif, d'autre part, que la possibilité laissée à l'administration des douanes d'exiger du redevable de la TVA à l'importation et des taxes assimilées qu'il fournisse une caution lorsqu'il enlève les marchandises avant acquittement de ces taxes ne constitue qu'une simple faculté.

11. Il s'ensuit que le défaut d'exercice de cette faculté ne peut constituer une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration des douanes.

12. Pour condamner l'administration des douanes à payer à la société Chuchu Decayeux des dommages et intérêts à hauteur du montant de la TVA à l'importation due par celle-ci, l'arrêt énonce que, si l'article 114, 1 ter, du code des douanes ne fait pas obligation à l'administration des douanes d'exiger un cautionnement pour la TVA liquidée, il lui confère cependant une prérogative qu'elle ne peut refuser d'utiliser qu'à condition de le faire sans commettre de faute engageant sa responsabilité.

13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement concernant la validité de l'avis de mise en recouvrement n° 962/15/367 du 20 juillet 2015, l'arrêt rendu le 11 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen autrement composée ;

Condamne la société Chuchu Decayeux aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Chuchu Decayeux et la condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects et à la direction régionale des douanes et droits indirects du [Localité 4] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400031
Date de la décision : 24/01/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

DOUANES - Commissionnaire agréé - Débiteur de la TVA à l'importation - Dispense légale de caution

DOUANES - Commissionnaire agréé - Commissionnaire agissant en exécution d'un mandat de représentation directe - Dispense légale de caution - Conditions - Utilisation de son propre crédit d'enlèvement DOUANES - Responsabilité civile - Faute - Exclusion - Cas - Enlèvement des marchandises avant acquittement de la TVA - Défaut d'exercice de la faculté d'exiger la présentation d'une caution

Il résulte de la combinaison de l'article 114 du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012, et de l'article 293 A du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003, que le commissionnaire en douane agissant en exécution d'un mandat de représentation indirecte donné par la personne désignée comme destinataire réel des biens dans la déclaration d'importation bénéficie, en tant que débiteur de la TVA à l'importation, solidairement avec le redevable de cette taxe, de la dispense légale de caution prévue au 1 bis du premier de ces textes. Au commissionnaire en douane agissant en exécution d'un mandat de représentation indirecte doit être assimilé le commissionnaire en douane qui, bien qu'agissant en exécution d'un mandat de représentation directe, utilise son propre crédit d'enlèvement et se trouve, de ce fait, également débiteur de la TVA à l'importation et des taxes assimilées. Le défaut d'exercice de la faculté, prévue à l'article 114, 1 ter, du code des douanes, d'exiger la présentation d'une caution en cas d'enlèvement des marchandises avant acquittement de la TVA à l'importation exigible ne peut constituer une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration des douanes


Références :

Article 114 du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012

article 293 A du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 11 mars 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 jan. 2024, pourvoi n°42400031


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 06/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400031
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