LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
SMSG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 décembre 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 823 F-D
Pourvoi n° C 21-25.340
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 DÉCEMBRE 2023
1°/ M. [D] [E],
2°/ Mme [Y] [I], épouse [E],
Domiciliés tous deux [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° C 21-25.340 contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2021 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 1re chambre), dans le litige les opposant :
1°/ au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances, domicilié [Adresse 3],
2°/ au directeur général des finances publique, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de M. [E] et Mme [I], épouse [E], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône et du directeur général des finances publique, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 octobre 2021), M. [E], qui est inscrit au registre du commerce et des sociétés (RCS) de Nîmes depuis le 1er janvier 2015 au titre d'une activité de location meublée professionnelle, et son épouse, ont exclu de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), au titre de l'année 2016, les biens immobiliers situés à Chaumont-sur-Tharonne, Caen, Montpellier et Roquebrune-Cap-Martin.
2. Le 29 septembre 2017, l'administration fiscale a adressée à M. et Mme [E] une proposition de rectification, réintégrant lesdits biens immobiliers et engendrant une imposition supplémentaire à l'ISF au titre de l'année 2016.
3. Après avoir émis, le 16 octobre 2017, un avis de mise en recouvrement, l'administration fiscale a rejeté, le 6 décembre 2017, la réclamation contentieuse de M. et Mme [E].
4. M. et Mme [E] ont alors assigné l'administration fiscale aux fins d'annulation de la décision de rejet de leur réclamation et de décharge de l'imposition et des majorations appliquées au titre de l'ISF.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. M. et Mme [E] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors que « selon l'article 885 R du code général des impôts dans sa version en vigueur à la date des impositions en litige, "sont considérés comme des biens professionnels au titre de l'impôt sur la fortune, les locaux d'habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés par des personnes louant directement ou indirectement ces locaux, qui, inscrites au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueurs professionnels, réalisent plus de 23 000 euros de recettes annuelles et retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62" ; qu'en considérant que, pour apprécier si la condition tenant au seuil de 50 % des revenus du foyer fiscal est satisfaite, il faut prendre en compte le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par l'activité de location meublée professionnelle, de sorte que les dotations aux amortissements s'imputent sur le montant des recettes de location, la cour d'appel, qui a mis en oeuvre une restriction que le texte ne prévoit pas, a violé ce texte. »
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'article 885 R du code général des impôts, alors applicable, sont considérés comme des biens professionnels au titre de l'ISF les locaux d'habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés par des personnes louant directement ou indirectement ces locaux, qui, inscrites au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueurs professionnels, réalisent plus de 23 000 euros de recettes annuelles et retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du même code.
7. Les bénéfices tirés de l'activité de location de locaux d'habitation meublés relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, le bénéfice net annuel dégagé par cette activité, qui correspond au bénéfice imposable, doit être déterminé conformément aux dispositions de l'article 38, 2, du code général des impôts, afin d'apprécier s'il représente plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories visées à l'article 885 R du code général des impôts.
8. L'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que pour apprécier la condition de seuil de 50 % des revenus édictée à l'article 885 R du code général des impôts, il convient de prendre en compte le bénéfice net annuel dégagé par l'activité de location meublée, afin de permettre la comparaison avec l'ensemble des revenus professionnels du foyer fiscal, y compris le bénéfice tiré de la location, étant observé qu'il est constant que le bénéfice imposable au titre des bénéfices industriels et commerciaux est le bénéfice net déterminé dans les conditions prévues à l'article 38, 2, du code général des impôts, ce bénéfice s'entendant de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés.
9. L'arrêt retient que M. et Mme [E] ne peuvent se prévaloir d'une analyse subjective des conditions posées par l'article 885 R du code général des impôts, alors que ce texte fait l'objet d'une interprétation objective et univoque constante fondée sur les termes précisément employés.
10. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a retenu à bon droit que la détermination du bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par l'activité de location meublée professionnelle implique la prise en compte des dotations aux amortissements, en a exactement déduit que les conditions pour bénéficier de l'exonération des immeubles concernés à l'imposition au titre de l'ISF pour l'année 2016 n'étaient pas remplies, compte tenu du résultat déficitaire de l'activité de loueur meublé professionnel exercée par M. [E].
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [E] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [E] et les condamne à payer au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille vingt-trois.