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10/10/2023 | FRANCE | N°23-80014

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 octobre 2023, 23-80014


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° X 23-80.014 F-D

N° 01140

MAS2
10 OCTOBRE 2023

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 10 OCTOBRE 2023

M. [M] [Y], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 1er décembre 2022, qu

i, dans la procédure suivie contre M. [F] [U] du chef de violences, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires amplia...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° X 23-80.014 F-D

N° 01140

MAS2
10 OCTOBRE 2023

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 10 OCTOBRE 2023

M. [M] [Y], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 1er décembre 2022, qui, dans la procédure suivie contre M. [F] [U] du chef de violences, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ampliatif et personnel ont été produits.

Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de M. [M] [Y], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 septembre 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement devenu définitif sur l'action publique, le tribunal correctionnel a déclaré M. [F] [U] coupable de violences commises au préjudice de M. [M] [Y], reçu la constitution de partie civile de ce dernier et renvoyé sur les intérêts civils.

3. Par jugement ultérieur sur les intérêts civils, le tribunal a annulé une expertise médicale précédemment ordonnée et débouté la partie civile de l'ensemble de ses demandes.

4. M. [Y] a relevé appel de cette dernière décision.

Examen des moyens

Sur les premiers moyens, pris leur troisième branche, et les deuxièmes moyens, pris en leur deuxième branche

5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur les troisièmes moyens

Enoncé des moyens

6. Le troisième moyen du mémoire ampliatif et le troisième moyen du mémoire personnel critiquent l'arrêt attaqué en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise, alors « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que le principe du contradictoire peut être rétabli et respecté tant que le rapport définitif n'est pas déposé, qu'en l'absence de grief établi, laquelle résulte directement de l'absence de demande de convocation, de l'absence de volonté de M. [U] ou de son conseil de se rendre à l'expertise qui se déroulait à 18 000 kms, et de l'absence de demande de communication du pré-rapport par M. [U] et de son conseil. »

Réponse de la Cour

7. Les moyens sont réunis.

8. Pour annuler l'expertise médicale de la victime, l'arrêt attaqué énonce que le rapport établi le 10 janvier 2020 par M. [S] [K], médecin, ne mentionne pas la convocation de M. [U] et de son avocat pour les opérations d'expertise et que l'expert a, par un message électronique du 20 janvier 2020, refusé de communiquer son rapport à l'avocat du prévenu.

9. Le juge relève que le principe du contradictoire impose que les parties soient convoquées et leurs avocats avisés des opérations et réunions d'expertise et qu'il s'agit d'une formalité substantielle.

10. Il ajoute, par motifs adoptés du premier juge, que M. [U] a été privé de la possibilité d'avoir, par lui-même ou par l'intermédiaire d'un médecin de son choix, sa propre analyse du récit et de l'examen de la victime.

11. Le juge retient que l'expert s'est fondé sur un entretien avec la partie civile et un examen clinique de celle-ci auxquels le prévenu et son avocat n'ont pas été invités à assister.

12. En l'état de ces seules énonciations, la cour d'appel, qui a caractérisé sans insuffisance ni contradiction la méconnaissance d'une formalité substantielle et l'atteinte portée par celle-ci aux intérêts du prévenu, a justifié sa décision.

13. En conséquence, les moyens doivent être écartés.

Mais sur les premiers moyens, pris en leurs première et deuxième branches, et les deuxièmes moyens, pris en leur troisième branche

Enoncé des moyens

14. Le premier moyen du mémoire ampliatif et le premier moyen du mémoire personnel critiquent l'arrêt attaqué en ce qu'il a violé le principe d'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, alors :

« 1°/ que le Juge ne peut statuer en contradiction avec une décision de justice passée en force de chose de jugée, que si le prévenu est reconnu coupable des faits reprochés, le préjudice en résultant reste en discussion dans la limite des faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale ; que, pour débouter M. [Y] de ses demandes, l'arrêt retient uniquement qu'aucune nouvelle expertise n'est sollicitée; qu'en se déterminant ainsi, cependant qu'il était constaté par jugement du 23 novembre 2017, que M. [U] était coupable du chef de violences volontaires ayant entraîné une ITT supérieure à 8 jours sur la personne de M. [Y], ce dont il résultait nécessairement que M. [Y] avait subi au moins le préjudice d'une ITT supérieure à 8 jours,
la cour d'appel a procédé par contradiction de motifs en refusant d'indemniser ce chef de préjudice découlant directement de cette décision ;

2°/ qu'en application du principe de l'autorité, au civil, de la chose jugée au pénal, si la responsabilité du prévenu reconnu coupable des faits reprochés est acquise, l'évaluation du préjudice en résultant reste en discussion dans la limite des faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale ; que, pour débouter M. [Y] de ses demandes, l'arrêt retient uniquement qu'aucune nouvelle expertise n'est sollicitée ; qu'en se déterminant ainsi, cependant qu'il était constaté par jugement du 23 novembre 2017, que M. [U] était coupable du chef de violences involontaires ayant entraîné une ITT supérieure à 8 jours sur la personne de M. [Y], ce dont il résultait nécessairement que M. [Y] avait subi un préjudice, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé. »

15. Le deuxième moyen du mémoire ampliatif et le deuxième moyen du mémoire personnel critiquent l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté la partie civile, alors :

« 3°/ que le juge ne peut, sans commettre un déni de justice, refuser d'évaluer le montant d'un dommage dont il constate l'existence en son principe. En s'y soustrayant, sa décision, rendue en violation de l'article 4 du Code civil et en méconnaissance de la jurisprudence sur ce point constante de la Haute cour, encourt logiquement la cassation, en violation des articles 1382 du code civil dans sa version applicable en Polynésie française, et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

16. Les moyens sont réunis.

Vu les articles 2, 3 du code de procédure pénale et 1240 du code civil :

17. Il résulte de ces textes qu'il appartient aux juridictions du fond de réparer, dans son intégralité et sans perte ni profit, dans la limite des conclusions des parties, le préjudice résultant de la déclaration de culpabilité de l'auteur du dommage.

18. Pour débouter la partie civile, l'arrêt attaqué énonce qu'en l'absence de demande d'une nouvelle mesure d'instruction, les demandes en réparation de M. [Y], qui sont exclusivement fondées sur le rapport d'expertise annulé, doivent être écartées.

19. En se déterminant ainsi, alors que l'affirmation de l'existence du préjudice résultait de la déclaration de culpabilité du prévenu et qu'il lui appartenait, au besoin en ordonnant une mesure d'instruction, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, d'en rechercher l'étendue pour le réparer dans son intégralité, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.

20. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.

Portée et conséquences de la cassation

21. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions ayant débouté M. [Y] de ses demandes en réparation de son préjudice. Les autres dispositions seront donc maintenues.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les quatrièmes moyens de cassation proposés, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Papeete en date du 1er décembre 2022, mais en ses seules dispositions ayant débouté M. [Y] de ses demandes en réparation de son préjudice, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 23-80014
Date de la décision : 10/10/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 01 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 oct. 2023, pourvoi n°23-80014


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:23.80014
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