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13/09/2023 | FRANCE | N°22-10950

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 septembre 2023, 22-10950


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Rejet

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 866 F-D

Pourvoi n° H 22-10.950

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

La société [I] Yang-Ting, société d'

exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 4], prise en la personne de Mme [P] [I], agissant en qualité de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

OR

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2023

Rejet

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 866 F-D

Pourvoi n° H 22-10.950

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

La société [I] Yang-Ting, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 4], prise en la personne de Mme [P] [I], agissant en qualité de liquidateur judiciare de la société Voxtur, a formé le pourvoi n° H 22-10.950 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [K] [X], domicilié [Adresse 3], [Localité 6],

2°/ à l'association AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 5],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société [I] Yang-Ting, après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présentes Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Valéry, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 octobre 2021), M. [X] a signé le 30 mars 2015 avec la société Voxtur un contrat de location longue durée d'un véhicule, ainsi qu'un contrat d'adhésion au système informatisé développé par cette société sous le nom de « Le Cab ».

2. La société a rompu les relations contractuelles le 15 juin 2016.

3. M. [X] a saisi la juridiction prud'homale.

4. La société Voxtur a été placée en liquidation judiciaire le 9 juin 2020, et la
société [I] Yang-Ting désignée en qualité de liquidateur juidiciaire.

Examen des moyens

Sur le second moyen

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le liquidateur fait grief à l'arrêt de requalifier le contrat de prestation liant M. [X] à la société Voxtur en contrat de travail à durée indéterminée, alors :

« 1°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail
sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que l'exercice d'une activité professionnelle au sein d'un service organisé unilatéralement par l'employeur peut constituer un indice du lien de subordination ; qu'en se bornant à constater, pour considérer qu'il aurait été établi que le chauffeur réalisait des prestations dans le cadre d'un service organisé et dans un lien de subordination constant à l'égard de la société Voxtur, que la rémunération des chauffeurs était calculée par le système informatisé de la plate-forme, que les chauffeurs n'étaient pas libres de choisir leurs véhicules, lesquels devaient correspondre ''au standard Le Cab'', que le système informatisé permettait de ''localiser en temps réel chaque véhicule connecté'', que la société Voxtur adressait aux chauffeurs des notes, telles qu'un document intitulé ''quand travailler pour gagner plus d'argent'', qu'elle avait mis en place un système de notation pouvant entraîner la résiliation du contrat, que les contrats de location de véhicule et d'adhésion à la plate-forme étaient interdépendants, que certains avantages étaient subordonnés au respect de certaines prescriptions, qu'un refus de course pouvait entraîner une déconnection et que la société Voxtur avait mis en place un système de fidélisation des chauffeurs tenant à l'octroi de rabais et/ou de bonus, motifs insuffisants à caractériser l'exercice par M. [X] de son activité professionnelle au sein d'un service organisé unilatéralement par la société Voxtur, après avoir expressément constaté que les chauffeurs étaient libres de choisir leurs horaires de travail, de travailler ou de ne pas travailler, et l'autonomie dans l'organisation de leur travail en résultant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-6 du code du travail ;

2°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se bornant à constater, pour considérer qu'il aurait été établi que le chauffeur réalisait des prestations dans le cadre d'un service organisé et dans un lien de subordination constant à l'égard de la société Voxtur, que la plate-forme de la société Voxtur organisait une répartition des courses en fonction de la localisation des chauffeurs, que la société Voxtur délivrait des conseils aux chauffeurs afin qu'ils développent leurs chiffres d'affaires ainsi que dans certaines circonstances et à l'occasion de certains événements, tels une grève de taxis, la Cop 21 ou la fashion week, qu'elle organisait des événements tels des tirages au sort permettant l'octroi de cadeaux et subordonnés notamment à un maintien de l'acceptation des propositions de courses de 95 %, et qu'elle avait mis en place un système de fidélisation par octroi de points, et de réduction sur le prix du loyer du véhicule, motifs impropres à caractériser un pouvoir de direction que la société Voxtur aurait exercé sur M. [X], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-6 du code du travail ;

3°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se bornant à constater, pour considérer qu'il aurait été établi que le chauffeur réalisait des prestations dans le cadre d'un service organisé et dans un lien de subordination constant à l'égard de la société Voxtur, que celle-ci avait mis en place un système de fidélisation par l'octroi de ''points de course'', de ''bonus fidélité'' et de remise sur la location du véhicule, ce qui ne signifie pas que les chauffeurs auraient été incités à ne pas se déconnecter et à demeurer à la disposition de la société Voxtur, et après avoir constaté par ailleurs la liberté pour les chauffeurs de choisir leurs horaires de travail, voire de choisir de ne pas travailler, donc l'autonomie de ces derniers, la cour d'appel n'a pas caractérisé le pouvoir de contrôle que la société Voxtur aurait exercé sur M. [X], privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Selon l'article L. 8221-6 du code du travail, les personnes physiques, dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail. L'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre.

8. Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 13 nov. 1996, n° 94-13187, Bull. V n° 386, Société générale), le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

9. Selon cette même jurisprudence, peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

10. A cet égard, la cour d'appel a constaté que la société déterminait le montant des courses qu'elle facturait au nom et pour le compte du chauffeur, la rémunération étant calculée à la course et transférée sur le compte bancaire du chauffeur ou donnant lieu à un prélèvement sur son compte en cas de solde négatif entre le montant des courses et le prix de la location, qu'elle adressait aux chauffeurs des instructions lors de certaines occasions les invitant par exemple à réaliser des courses durant la Fashion Week et leur indiquant les sanctions prévues en cas de désaffection ou retard de course.

11. Elle a aussi retenu que la société avait mis en place un système de notation prévu à l'article 3 de son contrat d'adhésion selon lequel une notation insuffisante selon les critères définis en annexe 3 pouvait entraîner, à l'initiative de la société, la résiliation du contrat dès lors que la qualité des prestations du chauffeur ne serait pas conforme aux prescriptions figurant à cette annexe, qu'elle procédait à des déconnexions du chauffeur durant vingt minutes en cas de refus de course, et que le chauffeur était contraint de travailler exclusivement pour la société Voxtur dans la mesure où même s'il pouvait librement réaliser des courses, pour son propre compte et s'il était libre de choisir ses horaires de travail ou choisir de ne pas travailler, cette liberté ne se confondait pas avec la liberté du travailleur indépendant dans les modalités d'exécution de ses prestations, au profit d'une clientèle qui lui était propre tout en assumant les risques de son entreprise.

12. La cour d'appel a ainsi pu déduire de ses constatations que le chauffeur réalisait des prestations dans le cadre d'un service organisé et dans un lien de subordination à l'égard de la société Voxtur.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [I] Yang-Tingen, en sa qualité de liquidateur judiciaire, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Valéry, conseiller référendaire, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22-10950
Date de la décision : 13/09/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 sep. 2023, pourvoi n°22-10950


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.10950
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