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06/09/2023 | FRANCE | N°21-24455

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 septembre 2023, 21-24455


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HP

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 septembre 2023

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 839 F-D

Pourvoi n° R 21-24.455

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023

M. [N] [J], domicilié [Adresse 2], a formÃ

© le pourvoi n° R 21-24.455 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

HP

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 septembre 2023

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 839 F-D

Pourvoi n° R 21-24.455

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023

M. [N] [J], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-24.455 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant au Centre national d'études spatiales, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [J], de la SCP Richard, avocat du Centre national d'études spatiales, après débats en l'audience publique du 14 juin 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Bérard, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2020), M. [J] a été engagé par le Centre National d'études spatiales (le CNES) par contrat à durée indéterminée du 19 janvier 1977, avec prise d'effet au 15 février 1977, en qualité de cadre II. En son dernier état, la rémunération mensuelle brute du salarié s'élevait à 7 529,43 euros. Le statut collectif du règlement du personnel du CNES du 1er mars 1994 est applicable à la relation de travail.
Le salarié a exercé des fonctions de conseiller du salarié à partir du 15 décembre 2009, ce mandat a été renouvelé en dernier lieu le 15 janvier 2013.

2. Invité, au regard des dispositions de l'accord CNES du 24 décembre 2013 relatif au contrat de génération, à se positionner sur ses intentions de départ à la retraite par lettre du 17 juin 2014, le salarié a, par lettre du 21 juillet 2014, fait part de son intention de partir à la retraite à partir du moment où il atteindrait l'âge lui accordant une pension vieillesse au taux plein. Le CNES a organisé un entretien avec le salarié au sujet de la date de départ en retraite qui s'est tenu le 30 juillet 2014 et à l'issue duquel il a informé le salarié qu'il envisageait de procéder à sa mise à la retraite, que son préavis débuterait le 1er septembre 2014 pour se terminer le 28 février 2015 au soir et qu'il serait donc radié des effectifs au 1er mars 2015.

3. Le 16 septembre 2014, le CNES a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de procéder à la mise à la retraite du salarié. Le 8 octobre 2014, l'inspecteur du travail a signifié sa décision aux termes de laquelle il ne disposait plus de la compétence matérielle pour statuer sur la demande de mise à la retraite du salarié au jour de la demande formulée par l'employeur. Entre temps, le salarié avait, par lettre du 30 septembre 2014, indiqué au CNES que, ne souhaitant pas polémiquer, il avait entrepris les démarches afin de faire liquider ses retraites au 1er mars 2015.

4. Le salarié a été admis au bénéfice de la retraite à compter du 1er mars 2015 et a reçu à la suite de la rupture de son contrat de travail l'indemnité de fin de carrière prévue par le règlement du CNES.

5. Le 4 août 2015, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en indemnité pour violation du statut protecteur, pour préjudice moral et pour préjudice résultant de l'exécution fautive et de mauvaise foi du contrat et de diverses demandes à caractère indemnitaire liées à un licenciement nul.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter, salarié protégé, de ses demandes, alors « qu'en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, une décision rendue par l'inspecteur du travail à l'égard d'un délégué du personnel s'impose au juge judiciaire, tant dans ses motifs qu'en son dispositif ; que les juges du fond ont constaté que par une décision du 8 octobre 2014, l'inspecteur du travail avait dit que par courrier remis en mains propres à Monsieur [J] le 14 août 2014, l'employeur avait informé ce dernier qu'il procédait à sa mise à la retraite (?) [et] que l'employeur a[vait] reconnu avoir connaissance du mandat de Monsieur [J] avant l'engagement de la procédure de mise à la retraite comme en attest[ait] le courrier de la Direccte Île-de-France du 29 janvier 2013 l'en avisant, qui était joint à la demande qui [lui] avait été adressée le 16 septembre 2014", de sorte que l'inspecteur du travail ne dispos[ait] plus de la compétence matérielle pour statuer sur la demande de mise à la retraite de Monsieur [J] au jour de la demande formulée par l'employeur" ; que, tenue par cette décision administrative, dont les termes étaient expressément constatés par le jugement, le juge judiciaire était tenu d'admettre que le 14 août 2014, l'employeur avait notifié à Monsieur [J] sa mise à la retraite sans avoir préalablement sollicité l'autorisation de l'inspecteur du travail et que, consécutivement, la rupture du contrat de travail, advenue illégalement à cette date, était nulle et de nul effet ; qu'en jugeant au contraire, pour débouter Monsieur [J] de sa demande en requalification de sa mise à la retraite en licenciement nul et de ses demandes pécuniaires subséquentes, que le salarié, délégué syndical, n'aurait pas été mis à la retraite par son employeur, mais aurait effectué un départ volontaire à la retraite ne requérant pas l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a méconnu l'autorité de la chose décidée par
l'administration et violé la loi des 16 et 24 août 1790. »

Réponse de la Cour

Vu le principe de la séparation des pouvoirs et la loi des 16 et 24 août 1790 :

7. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre d'une mise à la retraite en violation du statut protecteur de conseiller du salarié, l'arrêt retient, que si le salarié soutient que sa mise à la retraite a été effectuée, d'office, à la date d'un courrier du CNES du 13 août 2014 alors que ce n'était que le 17 décembre 2014 qu'il allait atteindre avec ses 65 ans l'âge du taux plein, il résulte de ce courrier, qui faisait suite à un courrier du salarié du 21 juillet 2014 établi en termes clairs et précis, que l'agent a bien manifesté un souhait quant à sa retraite et que, par ailleurs, il ressort des termes du courrier du 30 septembre 2014 adressé par le salarié à son employeur qu'il a réitéré son choix après l'entretien du 30 juillet 2014, que ces démarches constituent donc des actes positifs de l'agent en vue d'une liquidation volontaire de ses droits à la retraite au 1er mars 2015. Il ajoute que s'il est exact que la situation de l'agent doit être assimilée à celle d'un délégué syndical, le CNES n'avait pas, dans le cadre d'un départ volontaire à la retraite, à saisir l'inspection du travail et qu'en conséquence, les développements du salarié sur l'interprétation à donner de la nature de la décision rendue quant à une incompétence matérielle pour saisine tardive de l'administration est inopérante, que cette erreur de saisine ne peut non plus constituer une reconnaissance par le CNES de l'existence d'une mise à la retraite d'office qu'elle a toujours niée, qu'il en est de même pour l'attestation pôle emploi datée du 24 février 2015 et que si le CNES a qualifié le motif de la rupture du contrat de travail, en case 38 : « mise à la retraite par l'employeur », le salarié ne peut en tirer comme conséquence une reconnaissance d'une mise à la retraite d'office alors que l'expression « mise à la retraite » signifie que la rupture du contrat de travail repose sur le fait que le salarié a droit à une retraite mais ne modifie pas le principe selon lequel le salarié décide seul s'il demande la liquidation de sa retraite.

8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que, par la décision de l'inspecteur du travail du 8 octobre 2014, celui-ci avait décidé qu'il ne disposait plus de la compétence matérielle pour statuer sur la demande de mise à la retraite du salarié au jour de la demande formulée par l'employeur, soit le 16 septembre 2014, que l'employeur avait informé le salarié le 14 août 2014 qu'il procédait à sa mise à la retraite, de sorte que la décision de l'inspecteur du travail ne pouvait s'être fondée sur la lettre du salarié du 30 septembre 2014 postérieure à la demande d'autorisation de mise à la retraite, la cour d'appel, qui a méconnu l'autorité de la chose décidée par l'administration excluant un départ volontaire à la retraite, a violé le principe et le texte susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le Centre national d'études spatiales aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le Centre national d'études spatiales et le condamne à payer à M. [J] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-24455
Date de la décision : 06/09/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 septembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 sep. 2023, pourvoi n°21-24455


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 12/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.24455
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