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06/09/2023 | FRANCE | N°21-21259

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 septembre 2023, 21-21259


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 septembre 2023

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 813 F-D

Pourvoi n° S 21-21.259

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023

La société Deg, société

à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-21.259 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2021 par la cour d'appe...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 septembre 2023

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 813 F-D

Pourvoi n° S 21-21.259

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 SEPTEMBRE 2023

La société Deg, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-21.259 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2021 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section 2), dans le litige l'opposant à M. [W] [T], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société Deg, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [T], après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 17 juin 2021), M. [T] a été engagé le 18 octobre 2010 en qualité de directeur des opérations par la société Deg (la société).

2. Par lettre du 15 novembre 2016, l'employeur lui a fait savoir qu'il envisageait de supprimer son poste en raison des difficultés financières de l'entreprise, lui a adressé une proposition de reclassement sur un poste de responsable commercial et lui a demandé d'y répondre au plus tard le 25 novembre 2016. Le salarié a refusé cette proposition le 27 novembre 2016.

3. Par lettre du 16 décembre 2016, la société lui a notifié les motifs économiques de la rupture en lui précisant qu'en cas de refus du contrat de sécurisation professionnelle, cette lettre constituerait la notification de son licenciement.

4. Après avoir refusé le contrat de sécurisation professionnelle, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est intervenu sans cause réelle et sérieuse, de déclarer recevable sa demande concernant l'irrégularité de la procédure et, en conséquence, de la condamner à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre d'indemnité pour non respect de la procédure, alors « que les dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail en vertu desquelles, lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 du même code, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception en lui précisant qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus ne sont pas applicables lorsque, en cas de suppression d'un poste pour un motif économique susceptible de justifier le licenciement, l'employeur propose au salarié un autre emploi au titre de l'obligation de reclassement ; que le reclassement du salarié doit toujours être recherché avant toute mesure de licenciement puisque ce n'est que si l'employeur est confronté à l'impossibilité de reclasser le salarié qu'il doit mettre en oeuvre la procédure de licenciement ; que l'arrêt constate que, par courrier du 15 novembre 2016, la société a fait part au salarié de son intention de supprimer son poste de directeur des opérations en raison des difficultés financières qu'elle connaissait et lui a proposé un poste de reclassement comme responsable commercial ; qu'en se fondant, pour considérer que cette proposition de reclassement avait été faite en dehors de la procédure de licenciement et que le salarié aurait dû bénéficier du délai d'un mois prévu par l'article L. 1222-6, sur la circonstance que la procédure de licenciement n'avait été mise en oeuvre que le 26 novembre 2016 par la convocation à l'entretien préalable tout en constatant que son licenciement avait été motivé par la suppression de son poste de directeur des opérations, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015 ensemble l'article L. 1222-6 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1222-6 du code du travail :

6. Selon ce texte, lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée.

7. Il en résulte que ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la proposition d'emploi est faite à un salarié en exécution par l'employeur de son obligation de reclassement en vue d'éviter le licenciement résultant de la suppression d'un emploi.

8. Pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société à lui verser des dommages-intérêts, l'arrêt, après avoir relevé que, par lettre du 15 novembre 2016, la société avait fait part de son intention de supprimer le poste de directeur des opérations du salarié en raison des difficultés financières qu'elle connaissait et lui avait proposé un poste de reclassement comme responsable commercial, retient qu'il s'agissait d'une proposition de modification de son contrat et non d'une proposition de reclassement puisque la procédure de licenciement n'a été mise en oeuvre que par la convocation à entretien préalable intervenue le 26 novembre suivant.

9. Il ajoute que cette lettre ne précisait pas, contrairement à ce qu'impose l'article L. 1222-6, que le salarié disposait d'un délai de réflexion d'un mois, mais sollicitait tout au contraire une réponse de sa part pour le 25 novembre, soit 10 jours plus tard et qu'après la réponse négative du salarié, par courriel du 27 novembre, la procédure de licenciement avait été initiée le 26 novembre avant même la réception de ce refus.

10. Il en conclut que le délai prévu par l'article L. 1222-6 du code du travail étant un délai de réflexion accordé au salarié pour lui permettre de prendre parti sur la proposition de modification de son contrat de travail, en mesurant les conséquences de sa décision, le licenciement économique intervenu avant que ce délai soit expiré est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la proposition d'emploi faite au salarié avait été formulée dans le cadre de la procédure de licenciement de l'intéressé, lequel avait été prononcé à raison d'une suppression d'emploi consécutive à des difficultés économiques, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquence de la cassation

12. Le moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision de condamner la société à payer au salarié une somme à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de l'arrêt critiqués par ce moyen.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse et condamne la société Deg à payer à M. [T] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts à ce titre, l'arrêt rendu le 17 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne M. [T] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-21259
Date de la décision : 06/09/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 17 juin 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 sep. 2023, pourvoi n°21-21259


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 12/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.21259
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